Coupe du monde : dans le rétroviseur de 1986, le Maroc précurseur

13
Coupe du monde : dans le rétroviseur de 1986, le Maroc précurseur
Coupe du monde : dans le rétroviseur de 1986, le Maroc précurseur

Africa-Press – Côte d’Ivoire. Avant l’exploit d’atteindre les quarts de finale en 2022, le Maroc a été la première nation africaine à se qualifier pour le 2e tour d’une Coupe du monde.

Si la victoire obtenue devant l’Espagne a ouvert pour la première fois les portes d’un quart de finale de Coupe du monde aux Lions de l’Atlas, elle réveille le souvenir d’une sélection marocaine entrée dans la légende, celle qui a permis à l’Afrique d’avoir un de ses représentants au second tour d’un Mondial. C’était en 1986 au Mexique. Dans cette 13e édition où l’Argentine a triomphé en finale de l’Allemagne de l’Ouest par le score de 3 buts à 2, le Maroc faisait sa deuxième apparition en Coupe du monde. Avec une équipe bâtie autour de l’ossature de l’équipe des Forces armées royales, les FAR de Rabat, le Maroc avait alors réalisé une performance inédite. À LIRE AUSSICoupe du monde 2022 : le Maroc réédite l’exploit de 1986

Le succès de cette équipe, le Maroc le doit à José Mehdi Faria, entraîneur brésilien qui s’est par la suite naturalisé marocain. Ancien joueur de Fluminense, il y commencera sa carrière managériale et entraînera les petites catégories entre 1968 et 1979 avant de monnayer ses talents à Al Saad (Qatar). Il rejoindra ensuite le Maroc, où il écrira l’histoire du FAR Rabat entre 1982 et 1988, en remportant deux championnats, trois coupes et une Coupe des Clubs Champions de 1985, la première coupe d’Afrique remportée par un club marocain.

Remembering José Mehdi Faria, our managerial legend, who would have been 85 today. We miss you, Coach! #MehdiFaria pic.twitter.com/OUJ0k6WrEj

Pour rappel, José Faria a été nommé sélectionneur en 1983, après le succès du Maroc aux Jeux méditerranéens. À cette époque, les joueurs évoluaient encore en majorité au pays et étaient de véritables stars. Éliminés au tour final des qualifications pour la Coupe d’Afrique des nations (CAN) de 1984 et ce par le Nigeria, les joueurs marocains ne manquèrent pas le rendez-vous pour le Mondial de 1986. Opposés à l’Égypte au 3e tour des éliminatoires, les Lions de l’Atlas sont sortis vainqueurs 2-0 avant d’accéder au tour final contre la Libye, qui avait créé la sensation en éliminant le Ghana d’Abedi Pelé. Après une victoire à Casablanca (3-0), le Maroc a concédé une défaite 1-0 à Benghazi, ce qui lui a permis de valider son premier billet pour un mondial depuis 1970, l’année où le Brésil de Pelé a décroché sa troisième étoile avec des joueurs aujourd’hui entrés dans la légende du ballon rond : Gerson, Carlos Alberto, Jairzinho, Tostao, Rivelino, entre autres. La CAN ayant eu lieu quelques mois plus tard, les Pharaons d’Égypte prendront leur revanche dans le dernier quart d’heure d’une demi-finale accrochée grâce à un but de Taher Abouzaid, en route vers leur 3e titre. Une déception pour les hommes de Mehdi Faria, certes, mais une bonne préparation avant le mondial.

Après seize ans d’absence, il importait de bien figurer et de donner une belle image du continent africain qui n’avait droit à cette époque qu’à deux places dans un mondial à vingt-quatre équipes. « En Coupe du monde, il y a des équipes qui jouent pour le titre, comme l’Allemagne ou l’Argentine, et celles qui veulent juste participer. Nous étions de cette catégorie », confiait humblement l’ancien attaquant Aziz Bouderbala.

On retrouve logiquement cinq joueurs des FAR de Rabat dans la liste, dont le Ballon d’Or Africain 1985, Mohamed Timoumi, gaucher magique et meneur de jeu de l’équipe vainqueur de la Coupe d’Afrique des Clubs Champions. La liste aurait pu s’étendre à sept joueurs sans les absences de Haidamou, forfait à quelques jours du mondial, et de Fadili, titulaire indiscutable lors de la CAN quelques mois auparavant. S’ajoute à cette ossature le futur Ballon d’or africain 1986, Badou Zaki du Wydad Casablanca qui rejoindra le RCD Majorque après le mondial, Aziz Bouderbala du Wydad aussi qui jouera au Racing Paris et à Lyon, le défunt maître à jouer Abdelmajid Dolmy (Raja Casablanca), seul rescapé de l’équipe vainqueur de la CAN 1976, ou encore Krimau, un des meilleurs attaquants du Championnat de France de cette époque. Placée dans le groupe de l’Angleterre de Lineker, la Pologne de Boniek, médaillée de bronze en 1982, et le Portugal, le Maroc avait fort à faire.

La chaleur étouffante jouait en sa faveur et avec une préparation de trois semaines en altitude à Monterrey, le Maroc a connu une préparation optimale. Après deux matchs nuls et vierges face à la Pologne et à l’Angleterre, les Marocains joueront relâchés, ce qui leur a permis de réaliser un récital face au voisin ibérique du Portugal (3-1) avec notamment un doublé du capitaine Abderrrazak Khairi. C’est ainsi que le Maroc est devenu la première sélection africaine à accéder au deuxième tour de la Coupe du monde.

Opposé à la République fédérale d’Allemagne, future finaliste, le Maroc, après une âpre bataille, s’est incliné dans les derniers instants sur un coup franc de Lothar Matthäus. Cruel dénouement alors qu’à ce stade du match, l’objectif était d’atteindre les tirs au but où un grand Badou Zaki aurait pu faire la différence. Matthäus, récemment interviewé, a rendu hommage à la sélection marocaine. « On a affronté une sélection marocaine très coriace qui nous a créé beaucoup de problèmes tactiques grâce à son jeu collectif et le talent fou de ses joueurs. Il faut avouer qu’on a été très chanceux en marquant un but dans les ultimes minutes du match », a-t-il dit.

Après avoir fait vibrer tout un peuple, la sélection de José Faria a reçu l’accueil qu’elle méritait de retour au pays. « Les gens nous attendaient par milliers à l’aéroport, près de 300 000 personnes étaient présentes au stade Mohamed V et ses abords pour la réception organisée en notre honneur par feu Sa Majesté Hassan II », raconte encore aujourd’hui Bouderbala. À la suite de leur élimination, Hassan II leur avait suggéré de rester au Mexique jusqu’au bout de la compétition, et même de prendre des jours de vacances aux États-Unis entièrement à ses frais avant un retour triomphal au pays.

Le Maroc de 1986, assurément une source d’inspiration pour le football africain et plus particulièrement pour l’équipe de Walid Regragui. Au Qatar, celle-ci est à la fois le porte-drapeau du Maroc et l’emblème du football africain. Face au Portugal d’un Cristiano Ronaldo remplaçant en huitième de finale contre la Suisse, les Lions de l’Atlas ont une nouvelle carte de légende à jouer : celle de faire accéder une équipe africaine pour la première fois à une demi-finale de Coupe du monde. Pour un pays arabo-berbère qui revendique fort son africanité, ce serait un moment exceptionnel à partager avec la planète foot.

Pour plus d’informations et d’analyses sur la Côte d’Ivoire, suivez Africa-Press

LAISSER UN COMMENTAIRE

Please enter your comment!
Please enter your name here