Africa-Press – Côte d’Ivoire. L’océan, cet inconnu. 66% de la surface de la planète est occupée par des fonds marins de plus de 200 mètres de profondeur. Et pourtant, l’humain n’en a visité que 0,001%, « soit approximativement un dixième de la taille de la Belgique”, écrivent les chercheurs américains de la « Ocean Discover league » dans un article de Science Advances du 7 mai 2025. Pas étonnant, donc, que les représentants des Etats qui se sont succédé à la tribune de la conférence onusienne sur l’océan (UNOC), tout juste achevée à Nice, aient tous réclamé plus de connaissances scientifiques afin d’asseoir leurs décisions sur des résultats sérieux.
La troisième conférence de l’UNOC a débouché sur des initiatives qui devraient accélérer les programmes de recherche sur l’océan. Le contexte international est favorable. L’accord sur le statut juridique sur la haute mer (BBNJ) devrait entrer en vigueur à la fin de l’année avec une première « conférence des parties » (COP1) en 2026, assurant ainsi un cadre d’action pour la recherche océanographique. La décision de l’administration Trump d’ouvrir la voie à l’exploitation des fonds marins a amené l’ensemble des Etats présents à Nice à réaffirmer le rôle prépondérant de l’Autorité internationale des fonds marins (AIFM), créée en 1994, et rappelé qu’une éventuelle exploitation de ces zones devront s’appuyer sur un code minier « garant de la protection de la biodiversité et des écosystèmes marins », ce qui implique de mieux les connaître. 37 Etats exigent même une pause de précaution de l’exploitation minière des fonds marins.
Les scientifiques font des recommandations
Du 3 au 6 juin, le « One Ocean Science Congress » avait déjà positionné la science comme un acteur majeur de la conférence onusienne puisque les 2000 scientifiques présents ont transmis des recommandations que les gouvernants ont largement endossées. Les annonces se sont donc succédé. La « mission Neptune », dont les contours restent à définir, devra réunir « les expertises océanographiques et les meilleurs technologies, y compris spatiales, afin d’investir dans une connaissance utile et accessible librement à toutes les parties”, indique succinctement « les engagements de Nice pour l’océan », document qui regroupe toutes les initiatives prises pendant l’UNOC. La place de plus en plus prépondérante du spatial dans la recherche océanographique se concrétise par l’alliance « Space4Ocean », où les satellites sont appelés à renforcer leur rôle dans les mesures biochimiques et physiques des masses d’eau, mais aussi dans la surveillance des activités humaines. Dans ce registre, le fait que la société privée « Mercator Ocean » devienne une organisation intergouvernementale soutenue par douze Etats européens est également un signal fort. La nouvelle organisation devra développer les systèmes numériques qui décriront de plus en plus précisément l’état global des mers.
De nouvelles entités vont par ailleurs servir d’outils pour les scientifiques, mais aussi les gouvernants et les sociétés civiles. C’est le cas du nouveau baromètre « Starfish » qui donnera désormais un état des lieux annuel de l’océan, permettant ainsi de mesurer les évolutions de l’écosystème marin dans son ensemble. La Plateforme internationale pour la durabilité de l’océan (IPOS) se veut également au service des Etats. « Notre objectif, c’est d’arriver en soutien aux Etats qui se posent des questions concrètes et précises sur leur activité en mer, explique Françoise Gaill, conseillère scientifique au CNRS et à l’origine de cette création. Ainsi, le Costa Rica a sollicité l’IPOS pour mieux connaître l’impact de sa pêche sur ses littoraux.” 140 universités abritant des unités travaillant sur l’océan ont par ailleurs lancé le « réseau international des universités marines » pour comparer leurs approches pédagogiques et construire de nouvelles filières de formation. La “Coalition pour une intelligence artificielle écologiquement durable » s’est dotée en février dernier d’une voie de recherche consacrée à l’océan.
Des rendez vous importants sur l’exploitation des fonds marins et la pollution plastique
Nice a été également l’occasion de rappeler le lancement en 2025 de « la décennie de l’action pour la science de la cryosphère » pilotée par l’Unesco. Ce programme international devra mettre en cohérence toute la recherche portant notamment sur les Pôles. Le CNRS a ainsi profité de l’UNOC pour publier sa prospective polaire à l’horizon 2035. Cette décennie aura pour point d’orgue l’année polaire internationale prévue en 2032.
Les barnums de l’UNOC à peine repliés, les diplomates ont déjà deux autres dates importantes à leur agenda de l’été. Du 15 juillet au 2 août, une nouvelle session de négociations sur l’exploration et l’exploitation des fonds marins se déroulera à Kingston (Jamaïque) et confrontera partisans et opposants à l’activité minière dans l’océan. Du 5 au 14 août, à Genève (Suisse), reprendront les discussions autour du « traité plastique » qui opposera cette fois les partisans d’une réduction de la production de plastique et ceux qui la rejettent.
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