Un lien étonnant entre la schizophrénie et une malformation du crâne

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Un lien étonnant entre la schizophrénie et une malformation du crâne
Un lien étonnant entre la schizophrénie et une malformation du crâne

Africa-Press – Côte d’Ivoire. Des chercheurs de l’Hôpital de recherche pour enfants Saint-Jude, aux Etats-Unis, ont publié une étude dans la revue Nature Communications, révélant un potentiel lien entre le syndrome de délétion 22q11.2 (plus communément appelé syndrome de DiGeorge ou encore syndrome vélo-cardio-facial) et un risque plus important de développer la schizophrénie (lire l’encadré ci-dessous).

Le syndrome de délétion 22q11.2 est une anomalie chromosomique concernant 1 naissance sur 2148, ce qui en fait la délétion (ou la suppression) de gènes la plus commune chez les êtres humains. Elle se traduit le plus souvent par des malformations cardiaques ou faciales, un retard de développement et une immunodéficience. La plupart des délétions qu’entraîne ce syndrome comportent le gène Tbx1, impliqué dans le développement cardiaque, facial ou en encore parathyroïdien.

Au-delà des malformations, 30% des patients atteints du syndrome de délétion 22q11.2 présentent une schizophrénie. L’équipe de chercheurs du docteur Stanislav Zakharenko a alors décidé de se pencher sur le lien entre le syndrome de délétion 22q11.2 et l’apparition de la schizophrénie. Ils ont ainsi pu découvrir que l’haploinsuffisance du gène Tbx1 – c’est-à-dire le fait qu’il n’y a qu’une seule copie fonctionnelle de ce gène au lieu de deux normalement, entraînant une perturbation dans le développement de l’organisme – cause une malformation dans le crâne du patient, plus précisément au niveau de l’os appelé fossa surbacuata et abritant le flocculus et le paraflocculus, deux parties du cervelet impliquées dans la fonction auditive, la perte de l’audition et l’apparition d’acouphènes.

La schizophrénie: des causes encore floues

La schizophrénie est un trouble neuropsychiatrique se manifestant notamment par des hallucinations, dans 70% des cas, des délires, un discours et des comportements désorganisés, une apathie sociale et des difficultés à reconnaître les visages et leurs émotions associés dans 50% des cas. Elle toucherait entre 0,7 et 1% de la population mondiale, dont environ 600.000 personnes en France.

Les causes de la schizophrénie restent encore assez floues, bien que de nombreuses pistes soient en cours d’études par les scientifiques. Ainsi, selon la Société Québécoise de la Schizophrénie et des psychoses apparentées (SQS), la chimie du cerveau, avec un fonctionnement anormal des neurotransmetteurs, comme la dopamine, pourrait être l’une des causes de la schizophrénie. L’hérédité semble, elle aussi, jouer un rôle majeur dans le développement de ce trouble mental.

« Ce serait incroyable car tout partirait d’un os »

Le flocculus et le paraflocculus des patients atteint d’un syndrome de délétion 22q11.2 présentent donc une dysplasie, c’est-à-dire une anomalie, survenue lors de leur croissance, et sont en général 70% plus petits que la moyenne parce qu’ils ont moins de place pour se développer suite à la malformation de l’os abritant l’endroit du cerveau où ils se situent. Ainsi, le syndrome de délétion 22q11.2 n’entraînerait pas directement de changements au niveau du cerveau, mais plutôt aux alentours de celui-ci, dans les os.

Des recherches menées notamment par Tae-Yeon Eom ont révélé qu’un gène supprimé dans le syndrome de délétion 22q11.2 entraîne des régions malformées du cervelet. Crédits: Hôpital de recherche pour enfants Saint-Jude

« Nous avons constaté que les circuits neuronaux à l’intérieur du flocculus et du paraflocculus sont dysfonctionnels », explique Stanislav Zakharenko, an parlant des patients atteints du syndrome de DiGeorge. Ainsi, la réduction de taille de ces deux parties du cervelet pourrait, d’après l’équipe de recherche, certainement être la cause d’hallucinations auditives – l’un des symptômes majeurs de la schizophrénie – puisqu’elles sont reliées au cortex auditif. De plus, la région contrôle également la stabilité de la vision lorsque la tête bouge et joue un rôle crucial dans l’identification des visages, les patients atteints de schizophrénie peinent généralement à les reconnaître justement. D’après le docteur Zakharenko, si ces résultats sont confirmés par de futures études, « ce serait incroyable car tout partirait d’un os ».

En plus de l’haploinsuffisance en Tbx1, le syndrome de délétion 22q11.2 entraîne une perte en gène Dgcr8. Ce second gène est responsable de la formation d’une poche du cerveau permettant l’entrée des informations auditives dans le thalamus, une partie du cerveau où les informations orales sont traitées, le thalamus est, lui aussi, associé aux hallucinations auditives. Le syndrome de délétion 22q11.2, entraînant une perte du gène Tbx1 et du gène Dgcr8, serait donc la cause du développement d’hallucinations auditives et de troubles dans la reconnaissance des visages, deux grands symptômes de la schizophrénie, puisque ces deux gènes jouent un rôle important dans la construction de structures osseuses abritant des zones du cerveau responsables des informations, notamment auditives.

Des résultats concluants mais encore trop peu précis

Pourtant, d’après Stanislav Zakharenko, il est encore difficile d’établir de manière précise comment le flocculus et le paraflocculus affectent les fonctions du cortex auditif, ce qui complexifie encore davantage l’identification de causes à l’apparition de la schizophrénie. Ainsi, ce scientifique espère pouvoir suivre « cette chaîne d’évènements, partant de la malformation du crâne en passant par la dysplasie du flocculus et du paraflocculus jusqu’au dysfonctionnement du cortex auditif » afin de comprendre les rouages du développement de la schizophrénie chez les patients atteints du syndrome de délétion 22q11.2.

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