Les forces de la région du Tigré ont attaqué la région d’Afar, accusant le gouvernement éthiopien de violations du cessez-le-feu. Le chef du Tigré a averti des conséquences graves, tandis que les autorités d’Afar signalent des attaques sur des civils. La tension monte alors que les deux parties s’accusent mutuellement de provocations.
La direction du Front de libération du peuple du Tigré a accusé le Premier ministre éthiopien Abiy Ahmed de violer le cessez-le-feu signé entre les deux parties. Parallèlement, les autorités locales de la région d’Afar, à l’est de l’Éthiopie, ont signalé une nouvelle attaque par les forces du Tigré.
Le président du Front de libération du peuple du Tigré, Debretsion Gebremichael, a mis en garde contre des “violations graves et répétées” commises par le gouvernement fédéral éthiopien concernant l’accord de cessation des hostilités (CoHA), qui est à la base de l’accord de paix de Pretoria signé entre les deux parties.
Debretsion a déclaré dans un communiqué que les récentes déclarations du Premier ministre Abiy Ahmed au parlement, où il a rejeté l’accord de Pretoria et attaqué le Front de libération du peuple du Tigré, constituent un “recul clair des engagements politiques sur lesquels repose l’accord”, soulignant que ces positions “sont en contradiction avec le principe de dialogue pacifique accepté par les parties signataires”.
Il a ajouté que “les violations ne se limitaient pas aux déclarations”, précisant qu’un groupe armé actif dans la région d’Afar, “recevant un soutien direct du gouvernement fédéral”, avait lancé une attaque lors de la visite du président de l’administration régionale temporaire du Tigré, le général Tadesse Woldemichael, dans le sud du Tigré la semaine dernière, entraînant des blessures parmi ses accompagnateurs.
Le président du Tigré a affirmé que ce groupe avait déclaré entrer dans un “conflit ouvert” avec le Tigré et avait demandé un soutien gouvernemental pour ses opérations, notant que les forces fédérales avaient mené une “attaque par drone” sur des sites à la frontière entre le Tigré et l’Afar, causant des pertes humaines et matérielles, qualifiant cet incident de “violation flagrante du principe de silence des armes et de résolution des différends par le dialogue”.
Debretsion a conclu son communiqué en affirmant que le Front de libération du peuple du Tigré reste attaché à la paix et à la mise en œuvre complète de l’accord de Pretoria, appelant les Nations Unies, l’Union africaine et la communauté internationale à exercer une pression diplomatique urgente sur le gouvernement fédéral “pour mettre fin aux hostilités et s’engager à nouveau dans un dialogue sérieux et de bonne foi”.
Dans le même temps, les autorités locales d’Afar, dans le nord-est de l’Éthiopie, ont annoncé tard mercredi que la région avait été attaquée par les forces du Tigré, qui ont pris le contrôle de six villages et bombardé des civils, marquant un nouvel indicateur des conflits internes que connaît le pays.
L’administration locale d’Afar a déclaré dans un communiqué que le Front de libération du peuple du Tigré “est entré dans la région d’Afar et a pris le contrôle par la force de six villages, bombardant les civils avec des mortiers” et de l’artillerie lourde.
Elle a ajouté que les forces du Tigré avaient attaqué la région de Megale, la deuxième plus grande région de l’Afar, et “ont ouvert le feu avec des armes lourdes sur des civils”.
Elle a indiqué que la région d’Afar est en état d’alerte grave, menaçant la sécurité et la stabilité de la région, et a averti que la région prendra des mesures pour défendre ses frontières et ses citoyens si les attaques persistent.
L’administration d’Afar n’a pas fourni d’informations sur le nombre de victimes.
En réponse aux accusations, Getachew Reda, conseiller du Premier ministre éthiopien Abiy Ahmed, a déclaré que des éléments au sein du Tigré cherchent à provoquer le gouvernement en attisant le combat en Afar, soulignant que le gouvernement fédéral reste engagé envers l’option de la paix malgré les provocations répétées du Front de libération du peuple du Tigré.
Ces développements surviennent après des rapports sur des mouvements militaires de groupes dissidents des forces du Tigré soutenus par des acteurs internes et externes, ravivant les craintes d’un effondrement de l’accord de Pretoria qui a mis fin à une guerre sanglante de deux ans dans le nord de l’Éthiopie.
Il convient de rappeler que les rebelles de la région du Tigré (nord) ont mené une guerre civile dévastatrice contre le gouvernement central de 2020 à 2022, faisant environ 600 000 morts et s’étendant à la région d’Afar, dont les forces soutenaient les autorités fédérales, alors que les relations entre la capitale et d’autres régions restent tendues.
Le Front de libération du peuple du Tigré a dominé la scène politique en Éthiopie de 1991 à 2018, lorsqu’il a été marginalisé avec l’ascension au pouvoir du Premier ministre Abiy Ahmed.
En mai dernier, la Commission électorale a interdit au parti d’exercer toute activité politique.
Le mois dernier, le gouvernement central a accusé le Front de libération du peuple du Tigré dans une lettre à l’ONU d’établir des relations avec l’Érythrée voisine et de “préparer activement une guerre contre l’Éthiopie”.
De plus, le ministère des Finances a annulé le versement de plus de deux milliards de birr (13,1 millions de dollars) au Tigré, et Abiy a déclaré au parlement la semaine dernière qu’une grande partie du budget alloué au Tigré avait été détournée à des fins militaires.
La région, qui compte environ six millions d’habitants, souffre de difficultés financières, tandis qu’environ un million de personnes restent déplacées en raison de la guerre civile de deux ans.
Le conflit en Éthiopie a débuté en novembre 2020, lorsque le gouvernement fédéral a lancé une offensive contre le Tigré, marquant le début d’une guerre civile dévastatrice. Cette guerre a causé la mort de centaines de milliers de personnes et a déplacé des millions.
En novembre 2022, un accord de paix a été signé à Pretoria, mais des tensions persistent, notamment en raison de violations répétées du cessez-le-feu par les deux parties. La situation reste fragile, avec des accusations réciproques et des mouvements militaires inquiétants dans la région.

