Africa-Press – Benin. L’acronyme BTL, pour Bolloré Transport & Logistics, lancé en 2016 afin de remplacer en Afrique BAL (Bolloré Africa Logistics), n’a plus lieu d’être à l’heure où le groupe vient de vendre ses dernières activités liées aux transports et à la logistique. Cyrille Bolloré et le conseil d’administration du Groupe Bolloré ont accepté le 8 mai, les 5 milliards d’euros proposés depuis le 18 avril lors de « négociations exclusives » avec Rodolphe Saadé, le PDG de CMA CGM.
« La logistique demeure un secteur d’activité clé dans la composition du groupe », assurait pourtant le fils de Vincent Bolloré lors de ses vœux de fin d’année 2022 aux salariés. Quelques mois seulement après avoir déjà vendu l’ensemble des actifs africains de BAL à la compagnie maritime Mediterranean Shipping Company (MSC) pour 5,7 milliards d’euros – et rebaptisé depuis Africa Global Logistics –, c’est au tour du réseau logistique mondial de changer de mains, le fils tournant définitivement la page écrite par le père depuis 1986. Et « la consultation des instances représentatives du personnel compétentes », cité dans un communiqué du groupe ne devrait rien y changer.
Bolloré dans l’édition et l’entertainment
Si l’opération devenait définitive avant la fin de cette année, le groupe Bolloré disposerait alors d’un trésor de guerre qui lui permettrait de s’offrir Vivendi – valorisé à plus de 11 milliards d’euros, et dont il détient déjà 29,7 % –, pour fusionner le conglomérat avec le groupe Lagardère. Son objectif : devenir un acteur de taille internationale dans les médias et dans l’édition.
D’ailleurs, dès l’offre de la CMA CGM connue, l’action Vivendi gagnait 6 % à la Bourse de Paris, comme un premier signal favorable des marchés sur une possible OPA dans les prochains mois.
Bolloré quitte la logistique mais pas l’Afrique. Exit les ports et les entrepôts de stockage, place aux librairies et aux écoles avec Hachette, aux médias en tout genre avec Canal Plus et Havas. Sans oublier un jour prochain l’agriculture, dossier sur lequel planchent, depuis plusieurs mois et dans la confidence, quelques personnes au siège français de Puteaux.
En termes de desserte, maritime ou terrestre, les conséquences de la vente de BTL n’auront que très peu d’effets pour le continent, l’ensemble des activités africaines de l’opérateur ayant déjà été cédées à MSC en décembre. « Seul un article du contrat signé alors stipule qu’AGL reste le correspondant de BTL sur le continent pour deux ans », précise un expert du dossier. Avec peu de chance d’aller au-delà, tant il est difficile d’imaginer que MSC, comme CMA CGM, puissent se satisfaire d’une telle situation plus longtemps.
Boulimie d’acquisitions de CMA CGM
Avec l’achat de BTL, le troisième armateur mondial revient dans la course dominée par l’italo-suisse MSC, suivi dans son sillage par le danois Maersk. Les trois géants des mers ont profité de leurs énormes bénéfices engrangés ces deux dernières années pour également s’implanter à coup de milliards sur terre et dans les airs.
Sauvé de la faillite en 2009 par l’État français, encore en grande difficulté dix ans plus tard, CMA CGM réalise aujourd’hui la plus grosse acquisition de son histoire. La énième en quelques mois, pour la compagnie marseillaise qui affiche une boulimie à la mesure des 23,5 milliards d’euros de bénéfices engrangés en 2022. Après avoir acheté des terminaux aux États-Unis et au Liban, l’armateur a poursuivi ses investissements dans la logistique, démarrés en 2019 avec le suisse Ceva, en reprenant l’américain Ingram Micro en 2021, puis Gefco et Colis Privé l’année dernière. CMA CGM est également entré pour 9 % au capital d’Air-France-KLM pour renforcer sa propre flotte d’avions-cargos, et pour 10 % dans celui d’Eutelsat.
Avec BTL, la compagnie maritime française continue de tisser sa toile à travers le monde. À la suite de ce rachat, sa filiale Ceva Logistics fait son entrée parmi les cinq plus gros acteurs du secteur et voit son expertise renforcée dans des secteurs à forte valeur ajoutée comme le luxe, l’aéronautique ou la santé. Un moyen pour CMA CGM de séduire encore un peu plus les plus gros chargeurs mondiaux, de Michelin à Apple en passant par LVMH, tous demandeurs d’une solution de transport intégrée, « jusqu’au dernier kilomètre ».
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