La formation de nos souvenirs casse l’ADN des neurones… et c’est une bonne chose  !

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La formation de nos souvenirs casse l’ADN des neurones… et c’est une bonne chose  !
La formation de nos souvenirs casse l’ADN des neurones… et c’est une bonne chose  !

Africa-Press – Benin. On ne fait pas d’omelette sans casser des œufs… et on ne fait pas de souvenir sans casser de l’ADN ! En effet, une nouvelle étude vient de montrer que la formation d’un souvenir nécessite la cassure et la réparation de l’ADN des neurones impliqués.

Une découverte étonnante, qui élucide une partie du mystère entourant le fonctionnement de la mémoire, et qui pourrait expliquer en partie les pertes de mémoire liées à l’âge. Cette étude a été publiée le 27 mars 2024 dans la revue Nature par des chercheurs des universités américaines Albert Einstein et Northwestern, en collaboration avec l’université danoise Aarhus.

Les neurones impliqués dans un souvenir s’enflamment ensemble

La formation d’un souvenir implique plusieurs neurones, qui se connectent lorsque nous vivons pour la première fois une expérience, par exemple se taper le pouce avec le marteau en essayant de planter un clou sur le mur. Cette connexion laisse une trace, nommée “engramme”, qui lie ces neurones. Ainsi, la prochaine fois qu’on voit le marteau, cette connexion nous rappellera la douleur ressentie auparavant, et nous indiquera de faire plus attention à notre pouce cette fois-ci. Mais comment se forme cette trace qui connecte les neurones d’un souvenir ? Par la douleur, en quelque sorte.

Les chercheurs ont étudié cette question en donnant un petit coup d’électricité à des souris confrontées à un nouvel environnement, pour qu’elles associent ce milieu à de la douleur. En conséquence, les souris montraient des signes de peur lorsqu’elles y étaient placées à nouveau.

Les chercheurs ont ensuite regardé l’activité des neurones de l’hippocampe (structure cérébrale essentielle pour la mémoire). Mettant en évidence que les neurones impliqués dans cette nouvelle expérience exprimaient davantage des gènes liés à l’inflammation, et que cela était encore le cas 96 heures après.

La formation du souvenir casse l’ADN pour créer cette inflammation

Le gène le plus activé était celui codant pour la protéine TLR9, spécialisée dans la détection de bouts d’ADN. Elle est importante pour l’immunité, car elle alerte l’organisme lors d’une infection en détectant l’ADN bactérien, mais elle peut aussi détecter des morceaux d’ADN provenant de l’organisme lui-même.

Suivant cette piste, les chercheurs ont analysé tous les fragments d’ADN retrouvés à l’extérieur du noyau de ces cellules. Montrant qu’ils provenaient tous de l’ADN génomique des neurones, c’est-à-dire que l’ADN à l’intérieur de leur noyau se casserait lors de la formation du souvenir. Et que des bouts de cet ADN se retrouveraient à l’extérieur du noyau, où ils sont détectés par TLR9.

Pour résumer, l’activité neuronale lors de la formation d’un souvenir serait tellement forte qu’elle causerait ces cassures de l’ADN dans tous les neurones impliqués, déclenchant une réponse inflammatoire menée par TLR9. Un stress commun à ces neurones qui pourrait constituer la première étape de la construction de la trace laissée par le souvenir.

En d’autres termes, ces neurones se rappelleront ensemble l’évènement qui a déclenché cette inflammation. L’ADN génomique de ces cellules est ensuite réparé rapidement, donc ces cassures ne causent pas de dommages à long terme, leur seule conséquence est ce signal inflammatoire ponctuel qui lie ensemble les neurones d’un même souvenir.

Un système qui pourrait devenir dysfonctionnel avec l’âge

D’ailleurs, les souris gardaient ce souvenir uniquement si le système inflammation-réparation génomique était fonctionnel. Des souris modifiées génétiquement pour ne pas exprimer TLR9 dans les neurones avaient plus de mal à se rappeler cet évènement. Aussi, ces souris sans TLR9 avaient plus de mal à réparer les cassures d’ADN causées par là formation du souvenir.

Ce mécanisme étonnant, qui nécessite une première étape négative (cassure de l’ADN) pour assurer une deuxième étape positive (formation d’un souvenir), pourrait être lié aux pertes de mémoire observées avec l’âge. Si jamais le système de réparation de l’ADN faiblit (ce qui est le cas avec le vieillissement), ces cassures d’ADN ne seraient pas réparées et s’accumuleraient dans ces neurones. Favorisant peut-être leur décadence et donc la dégradation de la mémoire, fonction qu’elles assurent en temps normal.

Mais il ne suffirait pas d’essayer d’améliorer ce mécanisme devenu défaillant en ajoutant du TLR9. Car la suractivation de cette protéine dans des cellules gliales (des cellules immunitaires du cerveau) est associée à de la neurodégénérescence. Cette étude, qui présente un nouveau mécanisme pour la construction de la mémoire, pose donc aussi de nouvelles questions sur la dégénérescence neuronale et la perte de mémoire qui s’ensuit.

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