Africa-Press – Burkina Faso. La Banque mondiale a organisé, le jeudi 10 juillet 2025 à Ouagadougou, une cérémonie de dissémination d’un rapport sur la situation économique du Burkina Faso, édition d’avril 2025. Le rapport met en évidence les tendances économiques récentes, analyse les perspectives à court et moyen termes, et consacre un chapitre spécial au secteur de l’énergie, domaine stratégique pour le Burkina. La cérémonie a été présidée par le chargé de mission du ministre de l’économie et des finances, François Xavier Bambara, représentant le ministre.
La note sur la situation économique du Burkina comporte deux chapitres. Le premier chapitre présente l’évolution de l’économie et de la pauvreté observée dans le pays en 2024 ainsi que les perspectives de 2025 à 2027. Le second chapitre propose une analyse approfondie du secteur de l’électricité au Burkina et des recommandations sur la manière d’atteindre les objectifs de la politique énergétique.
Ainsi, sur l’évolution de l’économie et de la pauvreté et perspectives, il ressort que l’économie burkinabè a enregistré une croissance, passant de 3% en 2023 à 5% en 2024 et ce, sous l’impulsion des secteurs des services et de l’agriculture. « Le secteur des services demeure le principal moteur de la croissance, contribuant à hauteur de 3,1 points de pourcentage (pp) à la croissance des services de l’administration publique et autres services communautaires ou personnels, qui représentent 22% de l’économie. La croissance de ce secteur a été soutenue par une amélioration progressive de la sécurité, qui a également stimulé la vente au détail, le commerce et les services de réparation. L’agriculture a contribué à hauteur de 1, 9 pp à la croissance globale du PIB, grâce aux conditions météorologiques favorables, au meilleur accès aux terres cultivables et au soutien accru du gouvernement. En revanche, le secteur secondaire a contribué à hauteur de -0, 5 pp, en raison de la baisse de la production minière industrielle, liée à l’insécurité persistante », détaille l’étude.
L’inflation est, elle, passée de 0,7 % en 2023 à 4,2% en 2024, en raison de l’augmentation des coûts des denrées alimentaires et de l’énergie, dans un contexte de contraintes d’approvisionnement et d’incertitudes sur les marchés. Selon les services de la Banque mondiale, les principaux facteurs expliquant la hausse de l’inflation en 2024 ont été l’insécurité et les contraintes logistiques affectant l’approvisionnement en céréales, ainsi que la spéculation sur les prix due au démarrage tardif de la saison des pluies. L’inflation du Burkina est restée supérieure au taux d’inflation régional moyen de l’UEMOA, qui est passé à 3,6 % en 2024, légèrement au-dessus de l’intervalle cible de 1 à 3 %, constate le rapport.
Malgré la hausse de l’inflation, la forte croissance de l’agriculture et des services a entraîné une baisse du taux d’extrême pauvreté prévu de 3 pp, le faisant passer à 23,2 %. « La réduction de la pauvreté a été généralisée, mais plus accentuée dans les zones rurales, avec une baisse de 3,5 pp contre une baisse de 1,6 pp dans les zones urbaines. La forte croissance des services a entraîné une augmentation des revenus dans les zones urbaines, mais la forte inflation des prix des denrées alimentaires (6,3 % en 2024) pose un défi particulier pour les ménages urbains pauvres. Toutefois, les ménages ruraux pauvres peuvent compter sur leur propre production alimentaire et sont moins vulnérables à ces chocs de marché (et peuvent, dans certains cas limités, bénéficier de la hausse des prix de leurs produits). La pauvreté reste nettement plus élevée en milieu rural (29,5 %) qu’en milieu urbain (5,5 %) », lit-on.
La Banque mondiale note également que le déficit budgétaire s’est amélioré, passant de 6,5 % du PIB en 2023 à 5,6 % en 2024, en raison de la baisse de la masse salariale, des subventions et de la forte mobilisation des recettes. Cette tendance est, en effet, principalement due à la baisse des dépenses salariales (-0,4 pp du PIB) en adéquation avec les réformes de contrôle de la masse salariale entreprises par le gouvernement et à la baisse des subventions énergétiques (-0,3 pp), induite par la stabilité des prix du pétrole au niveau international. Les dépenses ont, de ce fait, diminué de 0,9 pp du PIB (produit intérieur brut) et le gouvernement a également mis l’accent sur la mobilisation des recettes intérieures.
En termes de projections, on retient également du rapport que la croissance devrait progressivement augmenter, passant de 4,3 % en 2025 à 5% d’ici à 2027, sous l’hypothèse d’une amélioration continue de la sécurité, des conditions climatiques moyennes et d’un environnement politique stable. Le secteur tertiaire devrait, lui aussi, rester solide, tandis que le secteur agricole dépendra des conditions météorologiques. Le secteur secondaire devrait se redresser, sous l’impulsion des industries extractives et non extractives, en fonction de l’amélioration de l’accès à l’énergie.
La dette publique en pourcentage du PIB devrait diminuer progressivement, tout comme l’inflation qui devrait s’aligner sur l’intervalle cible de l’UEMOA, à partir de 2025. Les projections de croissance et la baisse attendue de l’inflation devraient contribuer à la réduction de la pauvreté d’environ 1 pp par an, avec une baisse limitée du nombre de personnes pauvres.
Dans le volet consacré à l’analyse approfondie du secteur au Burkina, le rapport souligne que l’énergie est cruciale pour la productivité agricole, la prestation de services fiables et l’efficacité des activités minières et à bien d’autres secteurs-clés pour la croissance économique. L’accès à une électricité abordable, fiable et durable sera une condition préalable essentielle pour une croissance inclusive et équitable, relève le rapport.
De ce fait, présente la Banque mondiale, des défis majeurs liés aux faibles taux d’accès, aux coûts élevés de l’approvisionnement en électricité, aux investissements insuffisants et aux contraintes de capacité doivent être surmontés pour garantir l’efficacité du sous-secteur de l’électricité dans son rôle de moteur de croissance et de création d’emplois.
“ Les perspectives de développement à moyen terme dépendent de l’accès à l’électricité en particulier et à l’énergie en général ”
« En 2023, seulement 26% des ménages au Burkina Faso avaient accès à l’électricité, soit la moitié de la moyenne de l’Afrique subsaharienne, qui est de 52%. L’accès à l’électricité en milieu rural reste extrêmement faible, estimé à seulement 7,0%, rendant l’accès universel à l’électricité improbable avant 2072 au rythme actuel d’expansion. Le secteur souffre d’une capacité de production et de transport insuffisante, de coûts de production élevés et de subventions inefficaces. Les coûts de production de l’électricité au Burkina Faso restent parmi les plus élevés de la région, 0,22 USD par kilowattheure (kWh), contre une moyenne de 0,18 USD par kWh en Afrique de l’Ouest, tandis que le coût total du service est de 0,26 USD par kWh. La dépendance aux combustibles importés et les infrastructures obsolètes aggravent les pressions financières. Le potentiel d’énergie solaire non exploité du pays dépasse 95 GW, soit environ 129 fois la capacité totale de production actuelle de 738,5 MW, mais les obstacles réglementaires et les défis sécuritaires freinent les investissements privés. Le solaire photovoltaïque (PV) avec stockage par batterie est la solution de production la moins coûteuse pour un portefeuille énergétique diversifié au Burkina. La capacité de production solaire photovoltaïque a atteint 226 MW-crête en 2024, mais une expansion supplémentaire est nécessaire pour répondre à la demande croissante. Renforcer les partenariats public-privé dans la production, le transport et la distribution, ainsi que l’expansion de l’accès hors réseau, sera crucial pour exploiter pleinement le potentiel énergétique du pays. Cela doit être complété par des investissements importants dans la capacité de transmission pour faciliter l’intégration des énergies renouvelables et réduire la dépendance à la production thermique coûteuse », livrent les services de la Banque mondiale, qui ajoutent que les subventions directement fournies au secteur de l’électricité exercent une pression sur les finances publiques sans pour autant rendre l’électricité abordable et quoique les prix de l’électricité restent élevés, affectant la compétitivité des entreprises.
« La dissémination de ce rapport intervient à un moment où la demande en électricité connaît une forte croissance, tant du côté des ménages que des entreprises, et ce en réponse aux louables initiatives présidentielles, au processus d’industrialisation et aux dynamiques de développement économique. Cette demande accrue contraste avec une offre encore limitée. Dans ce contexte, la note révèle que les perspectives de développement à moyen terme du Burkina Faso dépendent fortement du renforcement de l’accès à l’électricité en particulier et à l’énergie en général. (…). La note recommande de surmonter les contraintes structurelles du secteur de l’électricité caractérisé par des coûts de production élevés ainsi qu’une forte dépendance aux combustibles importés. Il met en lumière le fort potentiel de l’énergie solaire, et recommande de renforcer les partenariats publics-privés, d’investir dans les infrastructures de stockage et de transport de l’énergie. Une réforme ambitieuse du secteur, l’extension de l’accès hors réseau et le développement de projets solaires compétitifs seraient essentiels pour garantir une croissance inclusive et réduire les vulnérabilités », soutient le représentant-résident de la Banque mondiale au Burkina Faso, Hamoud Abdel Wedoud Kamil.
Pour le directeur général de l’économie et de la planification, Larba Issa Kobyagda, cette note produite par les services de la Banque mondiale est en réalité une situation de mise à jour des données. « Nous avons eu des discussions techniques avec la Banque mondiale, sur des aspects qui nous permettent de conforter que ses analyses sont pratiquement dans la même dynamique que celles produites par le Burkina Faso. A quelques exceptions près, d’autant plus que sur les questions d’hypothèses qui permettent de supposer la tendance pour les années à venir, nous avons des marges de différence suffisamment négligeables au regard d’informations dont nous, acteurs gouvernementaux, disposons, que souvent les partenaires n’ont pas (puisque les politiques qui permettent de pouvoir les intégrer sont en cours de finalisation). Donc, nous accueillons avec beaucoup de satisfaction le rapport qui a été produit et surtout le lien qui a été fait avec un secteur stratégique, qu’est l’énergie. Ce rapport a une particularité, qui est que le second chapitre met donc un focus sur un secteur qui est, du point de vue économique, transversal. Nous le qualifions dans le sens des politiques de développement comme la colonne vertébrale du développement multisectoriel et ce secteur-là avait besoin effectivement d’une analyse très approfondie. Nous allons donc travailler par la suite avec la Banque mondiale, pour voir dans quelle mesure d’autres études spécifiques concernant toujours ce secteur peuvent être faites dans le sens d’accélérer la croissance économique au Burkina et au profit du bien-être des Burkinabè », commente M. Kobyagda, pour qui, les services de la Banque mondiale ont présenté une situation réelle du secteur de l’énergie, surtout en matière d’avancées enregistrées par le Burkina en termes d’offre d’énergie et d’accès à l’énergie.
« La préoccupation qui demeure, et qui est partagée par le gouvernement, c’est bien évidemment à quel rythme nous devons avancer pour garantir que tous les Burkinabè soient à même de tirer profit de ce secteur pour accélérer à la fois leur bien-être, leur formation et créer davantage de richesse. Et sur ces éléments, nous sommes d’accord pour regarder avec la Banque mondiale, un partenaire stratégique du gouvernement, quelles peuvent être effectivement les implications en termes d’options (parce que la note ne fait pas de recommandations au gouvernement, mais laisse des options qu’il peut explorer avec la Banque mondiale et regarder la faisabilité aussi avec d’autres partenaires techniques et financiers dans le sens de répondre aux attentes des populations). Nous partageons globalement l’analyse faite du secteur et nous estimons que nous ne pouvons pas attendre jusqu’en 2072 pour atteindre l’accès universel à l’énergie pour l’ensemble des Burkinabè ; ce qui nous incite davantage à investir dans certains secteurs stratégiques, notamment le secteur de l’énergie (en termes de production, de transport, de distribution). Le rapport montre également que 74% des Burkinabè manquent d’énergie, mais la majorité d’entre eux est en milieu rural. Nous pensons de ce côté qu’il y a des options qui ont été proposées, et le gouvernement, à travers la stratégie nationale d’électrification rurale, avait déjà pensé à un schéma de maillage qui permet de mieux électrifier. Ce sont des points de vue techniques qu’on peut développer au sens large par la suite, parce que lorsque vous avez par exemple des villages de moins de 1 000 personnes, le raccordement est souvent, d’un point de vue économique, très coûteux. Mais on pensait donc à un système d’excroissance avec les villes et les bidonvilles et à aller vraiment vers les grandes agglomérations pour obtenir des taux intéressants d’ici à 2028. Ce qui a été affiché, c’est d’aller jusqu’à 50 % d’ici à 2028, et ce sont des engagements sur lesquels, le gouvernement travaille. Mais il faut travailler davantage sur l’offre, pour que lorsque nous allons étendre, tout le monde puisse avoir une énergie disponible et stable pendant la période », accueille le directeur général de l’économie et de la planification, Larba Issa Kobyagda.
Le gouvernement burkinabè a, à travers le représentant du ministre de l’économie et des finances, remercié la Banque mondiale pour son soutien aux efforts consentis pour le développement du Burkina. Le chargé de mission, François Xavier Bambara, a, ensuite, loué la résilience dont fait preuve l’économie burkinabè, malgré les répercussions des crises complexes aux plans national et international, grâce aux mesures déployées par l’État sur l’impulsion des plus hautes autorités du pays.
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