Africa-Press – Burkina Faso. L’ancien parti majoritaire, au pouvoir jusqu’au putsch de janvier 2022, tente de se relancer avec l’aide de l’ex-chef de l’État et de son ancien président.
Un temps restée discrète, leur implication n’est désormais plus vraiment un mystère. Depuis plusieurs semaines, Roch Marc Christian Kaboré et Simon Compaoré sont à la manœuvre pour tenter de redonner son lustre d’antan au Mouvement du peuple pour le progrès (MPP), qu’ils ont cofondé – avec feu Salif Diallo – en 2014. « Les camarades Roch et Simon apportent leur contribution à la survie du parti », reconnaît Lassané Sawadogo, le secrétaire exécutif national de l’ancien parti majoritaire.
Après le coup d’État du 24 janvier 2022 du lieutenant-colonel Paul Henri Sandaogo Damiba fatal à Kaboré, le MPP, profondément affaibli, a subi de nombreuses vagues de démissions. Abdoulaye Mossé, Smaïla Ouédraogo, Bachir Ismaël Ouédraogo, Alpha Barry… Plusieurs de ses barons et d’anciens ministres de Kaboré ont quitté le navire, parfois pour fonder leur propre formation.
Au sein du parti, certains redoutent que l’hémorragie se poursuive. « Si le pouvoir de transition actuel se dote d’un projet politique, il est clair que nous perdrons encore des camarades », estime une figure du MPP, au sein duquel le capitaine Ibrahim Traoré, à son tour tombeur de Damiba et nouvel homme fort de Ouagadougou, ne manque pas de soutiens.
Intenses tractations
Pour tenter d’enrayer cette spirale préoccupante et de relancer le parti, plusieurs cadres ont donc décidé de solliciter les figures tutélaires qu’incarnent Roch Marc Christian Kaboré et Simon Compaoré. D’intenses tractations ont été nécessaires pour convaincre l’ex-chef de l’État et l’ancien président du parti de participer à sa reconstruction.
« Au départ, Roch ne voulait pas s’impliquer », explique une source au sein du MPP. Par rancune ? Après sa chute, certains en interne avaient vite pointé du doigt sa gouvernance du pays et du parti, l’accusant notamment d’avoir « personnalisé le pouvoir » et « gouverné avec ses amis ». D’autres lui reprochaient aussi d’avoir « imposé » l’un de ses proches, Alassane Bala Sakandé, ancien président de l’Assemblée nationale, à la tête du parti lors du congrès de septembre 2021. « À partir de ce moment, les militaires ont compris qu’il y avait des divisons internes et qu’un boulevard était ouvert pour un coup d’État », révèle un membre du bureau exécutif du parti.
Malgré ces critiques, Roch Marc Christian Kaboré conserve une influence certaine sur le MPP. Aura, réseaux, notoriété, moyens financiers… Personne, au sein du parti, ne dispose d’autant d’atouts que lui. Jusqu’à présent, l’ancien président, qui n’a pas annoncé sa retraite politique et demeure silencieux sur ses ambitions politiques, refuse toutefois de rencontrer le bureau politique national (BPN) du MPP.
Un avenir en suspens
De son côté, Simon Compaoré a, d’après l’un de ses intimes, répondu aux sollicitations du parti « à son corps défendant ». Contraint de quitter la présidence du MPP en septembre 2021 pour laisser place nette à Alassane Bala Sakandé, il avait annoncé sa retraite politique dans la foulée. Il demeurait, depuis, président d’honneur du MPP. « Aujourd’hui, Simon est gêné de devoir intervenir encore au niveau du parti, explique un de ses proches. Mais nous avons besoin de lui comme du président Kaboré. »
« Roch Kaboré et Simon Compaoré ne mènent pas le processus de refondation du parti. Disons qu’ils sont plutôt des personnes-ressources », précise le Dr Émile Pargui Paré, membre du MPP. Aujourd’hui, Kaboré et Compaoré sont officiellement « conseillers » d’un directoire composé de dix « sages » à la tête du parti, mais il ne fait guère de doutes que le « nouveau » MPP sera façonné sous leurs empreintes.
Des commissions internes, mises en place pour réfléchir à l’avenir du parti et à son prochain congrès, sont censées rendre leurs conclusions d’ici à la mi-avril. Reste à savoir si ledit congrès pourra un jour se tenir, les activités des partis politiques étant toujours officiellement suspendues par la junte du capitaine Ibrahim Traoré.
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