Africa-Press – Burkina Faso. DIX CHOSES À SAVOIR SUR – Qui aurait misé sur lui ? S’il était populaire pour ses interventions régulières dans les médias burkinabè, quasiment personne n’aurait imaginé Kyélem Apollinaire de Tambèla à un tel poste politique. Pourtant, c’est bien lui qu’Ibrahim Traoré a choisi pour conduire le gouvernement de transition, vingt jours après son putsch. Une mission particulièrement périlleuse alors que le Burkina Faso traverse une période délicate, entre coups d’État et violences jihadistes.
Décrit comme intransigeant, cet avocat catholique inspiré par l’idéologie de Thomas Sankara a néanmoins accepté de relever le défi.
1. Séminariste
En 1971, Kyélem Apollinaire de Tambèla entre au petit séminaire Saint Augustin de Baskouré, un établissement diocésain d’enseignement secondaire et de formation sacerdotale situé au centre-est du Burkina Faso et connu pour être un bastion du catholicisme dans le pays, par ailleurs majoritairement musulman. Il est le troisième ancien séminariste Premier ministre après Kadré Désiré Ouédraogo (1996-2000) et Luc Adolphe Tiao (2011-2014).
2. Nom amélioré
Le nom complet du Premier ministre est Kyélem de Tambèla Apollinaire Joachimson. En hommage à son père, qui était enseignant et le secrétaire général de la section locale de l’Organisation catholique pour le développement et la solidarité (Ocades), il a en effet décidé d’accoler le mot « Joachimson » [fils de Joachim] au nom qui lui a été donné à sa naissance. Il a aussi ajouté le nom de son village, Tambèla, situé à la sortie de la ville de Koupéla, en signe d’attachement à ses racines.
3. « Aristo »
Au sein du barreau, maître Kyélem était surnommé « l’aristo ». Il revendique en effet avoir du sang princier et en tire une discipline de vie, excluant tout écart ou toute compromission. Il a ainsi ajouté une particule à son patronyme. Selon des témoignages recueillis par Jeune Afrique auprès de proches collaborateurs, cet avocat défendait l’idée selon laquelle les changements politiques profonds sont opérés par les plus aisés car ils sont à l’abri du besoin.
4. « Sankaréen »
Plutôt que « sankariste », un qualificatif qu’il dit réserver à des « opportunistes », le nouveau Premier ministre se définit comme « sankaréen ». Se réclamant de l’idéologie prônée par Thomas Sankara, il est connu pour circuler à Ouagadougou avec une vieille Opel à deux portes, alors que ses confrères avocats préfèrent souvent de rutilantes voitures. Au bureau de son cabinet, à Ouaga 2000, il n’utilise pas la climatisation mais des ventilateurs.
Il a aussi milité pour que les unités de sciences économiques, de gestion et de sciences juridiques et politiques de l’université de Ouagadougou soit renommées université Thomas Sankara.
5. Professeur
L’actuel Premier ministre est notamment enseignant-chercheur en droit. Il a eu comme étudiant un certain Paul-Henri Sandaogo Damiba, qui vient d’être renversé par celui qui l’a nommé, le président de la transition Ibrahim Traoré. Moins de neuf mois plus tôt, Damiba avait lui-même fait un putsch, contre Roch Marc Christian Kaboré.
Kyélem Apollinaire de Tambèla a enseigné dans plusieurs universités publiques et privées ainsi que dans des établissements d’enseignement supérieur du Burkina : l’école nationale de l’administration et de magistrature (Enam), l’université de Ouagadougou, l’université Saint Thomas d’Aquin, l’université Aube Nouvelle. À l’étranger, il a aussi été professeur à l’université de Toronto au Canada, à celle de Nice en France, à l’institut Nord XXI en Suisse et à Kent State University aux États-Unis.
6. N° 104
104, c’est le numéro sous lequel il a été enregistré, le 20 novembre 1999, au registre du Barreau burkinabè. Avec son associé Me Gilbert Noël Ouédraogo, par ailleurs président de l’ADF-RDA, il a créé le cabinet Justice et liberté, le 6 mars 2000. Ils ont ensuite été rejoints par Hamidou Savadogo. Depuis sa nomination au gouvernement, il a confié l’entière gestion de ses affaires à ses associés.
Par ailleurs, il a été membre d’Amnesty International Toronto au Canada.
7. Polémiste
Le Premier ministre aime débattre et passer derrière un micro. Il a collaboré à de nombreux médias, tant radiotélévisés qu’écrits. Avant sa nomination à la tête du gouvernement, il était d’ailleurs populaire pour ses interventions publiques régulières.
8. Pas technophile
Selon certains de ses proches, jusqu’à une période récente, Me Kyélem de Tambèla refusait d’avoir un téléphone portable et se contentait d’un téléphone fixe. Il n’échangeait donc via aucune application cryptée, comme WhatsApp. Il estimait que les nouvelles technologies limitaient sa liberté.
9. Solitaire
« C’est un homme qui aime rester dans son coin », confie un proche. Il reste très discret et parle très peu de lui-même. D’ailleurs, dans son CV, il a pris le soin d’apporter une précision : « célibataire ».
10. Idéaliste
Interrogé sur la personnalité de Me Kyélem, un de ses proches lâche : « trop idéaliste ». Homme de principes et d’idées, il pourrait, à l’épreuve du pouvoir, être contraint de faire des concessions. Du moins s’il souhaite se maintenir longtemps à son poste.
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