Le coup d’Etat au Burkina Faso : Est-ce la contagion au sein des pays du G5 Sahel ?

Le coup d’Etat au Burkina Faso : Est-ce la contagion au sein des pays du G5 Sahel ?
Le coup d’Etat au Burkina Faso : Est-ce la contagion au sein des pays du G5 Sahel ?

Africa-Press – Burkina Faso. a tenu à revenir sur ce lundi 24 Janvier 2022, où des soldats burkinabés ont annoncé qu’ils ont renversé le président Roch Marc Kaboré et qu’ils se sont emparés du pouvoir dans ce pays d’Afrique de l’Ouest, le Burkina Faso.

Comme on le sait, il s’agit d’un putsch qui a été mené par le lieutenant-colonel Paul-Henri Sandaugo Damiba, au nom d’un mouvement dont il était devenu le ‘président’ et qui s’appelle : « Le Mouvement patriotique pour la sauvegarde et la restauration “.

Un autre coup douloureux que la France a reçu dans la région, après le coup d’État au Mali en mai dernier, en plus du rejet populaire de celui-ci dans ces pays.

Il va sans rappeler que les manifestants en colère au Burkina Faso, excédés par la violence jihadiste s’étaient multipliées ces derniers mois, accusaient le président Kaboré d’être incapable d’y faire face.

Réaction de la Communauté internationale

Immédiatement après la prise du pouvoir par une junte militaire de l’armée burkinabé, la condamnation internationale du coup d’État militaire s’est poursuivie, dont la plus importante venait de Washington, où le Département d’Etat avait exhorté toutes les parties dans cette situation turbulente à maintenir le calme et à implorer le dialogue comme moyen de répondre à leurs demandes.

Pour sa part, le Secrétaire général des Nations Unies, Antonio Guterres, avait publié une déclaration disant : « Nous condamnons fermement toute tentative de prise de pouvoir par la force des armes », tout en exprimant son inquiétude pour la sécurité du président renversé Roch Marc Kaboré, qui est sous l’emprise des forces putschistes.

Le SG des Nations Unies Antonio Guterres

Mais, le plus touché par ce putsch survenu à Bourkina Faso, notamment le président français Emmanuel Macron, n’a pas hésité à extérioriser sa colère en formulant une condamnation entachée d’une protestation qui expose l’impasse dans laquelle l’influence historique française s’est trouvée dans la région du Sahel et du Sahara.

Macron a déclaré : “De toute évidence, comme d’habitude, nous sommes d’accord avec la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest ‘CEDEAO’ pour condamner ce coup d’État militaire”.

Il a considéré ce développement comme étant le « plus récent d’une série de coups d’État militaires extrêmement préoccupants à un moment où la priorité dans la région devrait être la lutte contre le terrorisme ».

Le Président français a souligné également que « Paris suit de près l’évolution de la situation sur le terrain, dans le pays, qui représente un point sensible de la stratégie de la France pour sa guerre au Sahel ».

Qu’a perdu la politique française expansionniste suite à ce putsch?

Emmanuel Macron avec Roch Marc Kaboré en 2017 lors de sa visite à Ouagadougou

Sur le plan politique, le putsch burkinabè représente un grave problème pour Paris, qui se retrouve face à trois régimes putschistes, du Groupe des Cinq du G5 Sahel (Tchad, Mali et maintenant Burkina Faso), alliés à elle dans leur guerre contre le terrorisme, dirigés par des militaires qui ne sont pas d’accord avec les politiques françaises dans la région.

Cela pourrait considérablement affaiblir la couverture politique de l’opération Barkhane et les opérations similaires menées là-bas par l’armée française.

D’autre part, la perte de ‘Ouagadougou’ de l’alliance française pourrait annoncer la fin de sa présence historique de celle-ci au Sahel et au Sahara, car le pays représente une base stratégique pour le contrôle des forces de Barkhane et toutes les opérations similaires dans la région des « trois frontières » entre le Burkina Faso, le Niger et le Mali, qui représente un foyer pour les groupes armés.

Par ailleurs, le Burkina Faso abrite la Route Sacrée, principale voie d’approvisionnement des soldats français de la région, depuis leurs bases-arrières en territoire ivoirien.

Il abrite également la salle des opérations des Forces de la longue épée, qui sont des forces spéciales qui effectuent des frappes qualitatives pour calculer les objectifs stratégiques des opérations de lutte contre les groupes armés dans la région.

On relève également que la France se trouve dans une situation difficile, celle d’obtenir le retrait de ses forces, la plupart des pays de la région étant opposés à leur accueil.

Le Niger rejette la présence des forces françaises de Tabuka sur son sol, et les forces maliennes ont décidé à leur tour d’expulser l’unité militaire danoise qui y participe, portant un coup sévère au soutien européen que la France tente de mobiliser pour assurer sa survie dans la région.

Les troubles de la France se poursuivent au Burkina Faso

Avant le coup d’État, la France a connu de nombreux troubles au Burkina Faso.

Où il a fallu faire face à de nombreuses critiques publiques et à un rejet incarné par les protestations contre son existence depuis novembre dernier.

Des milliers de personnes débarquent alors au Burkina Faso pour empêcher un important convoi militaire français venant de Côte d’Ivoire, d’atteindre le Niger, en passant par la ville de Kaya au nord du pays.

Ils ont scandé des slogans tels que « Nous voulons que la France s’en aille » et « Kaya dit à l’armée française : Retournez dans votre pays ».

À la suite de ces confrontations, des dizaines de civils ont été tués.

Ces protestations ont également réussi à pousser les camions transportant du carburant et de la nourriture pour l’armée française à faire marche-arrière, et au ministre français des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, de s’en insurger, affirmant que « des agitateurs attisent les sentiments anti-français, et nous avons fait comprendre au président Roch Marc Kaboré que nous souhaitions qu’il trouve une solution à la situation à Kaya et je pense qu’il trouvera une solution ».

Le Chef de la diplomatie française reçu à Ouagadougou en 2021 par le président déchu

On ne peut ne pas évoquer les quatre militaires français qui ont été blessés, une semaine auparavant, soit le mardi 18 janvier, avec un engin explosif ayant visé leur véhicule, et le communiqué rendu à l’occasion par l’armée française dans lequel elle annonçait « Un engin explosif a explosé au passage de leur véhicule après son départ de l’aéroport de Ouahigouya », dans le nord de Burkina Faso, ajoutant que l’unité faisait partie de la force Barkhane.

Où réside l’implication russe dans le coup d’État

Le président déchu recevant Sergueï Lavrov à Ouagadougou l’invitant au forum Russie-Afrique

Peu de temps après le coup d’État, des milliers de Burkinabés sont sortis pour célébrer son succès, lors de rassemblements au cours desquels ils ont renouvelé leur condamnation de la présence française là-bas, portant des photos de Dambia (le nouvel homme fort du pays), accompagnées de photos du président malien Assimi Goïta, ainsi que des drapeaux russes.

Selon les déclarations du secrétaire général des Nations unies, Antonio Guterres : « Ces manifestations ne signifient pas le consensus populaire sur ce qui s’est passé, il est facile de les organiser artificiellement dans des pays comme le Burkina Faso ».

En revanche, il porte un signe important, qui est le prélude à un scénario similaire au scénario malien, c’est-à-dire que les Russes étendent leurs bras pour s’emparer du cœur du pays.

Il importe de noter qu’Alexander Ivanov, le planificateur de la présence russe en Afrique centrale, a salué le coup d’État, notant que la France « n’a pas réussi à combattre le terrorisme dans la région ».

Alexander Ivanov, le planificateur de la présence russe en Afrique

De son côté, le ministère russe des Affaires étrangères s’est contenté de souligner qu’il suivait de près la situation dans cette république africaine.

Le moins que l’on puisse dire, c’est que ces coups d’État en Afrique sont devenus un investissement russe par excellence, car l’influence de Moscou s’y étend aux dépens de la France et des puissances internationales.

Anouar CHENNOUFI

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