Visas en Afrique : une situation (encore) contrastée

Visas en Afrique : une situation (encore) contrastée
Visas en Afrique : une situation (encore) contrastée

Africa-Press – Burkina Faso. Poussés par le projet de marché unique, les États réforment pour faciliter la mobilité intra-africaine, mais toutes les régions ne sont pas logées à la même enseigne.

« Les voyages en Afrique sont devenus plus ouverts aux citoyens africains en 2022, avec moins de restrictions dans l’ensemble. » Tel est le constat du dernier Rapport sur l’indice d’ouverture sur les visas en Afrique, rédigé conjointement par la Banque africaine de développement et la Commission de l’Union africaine. Les auteurs soulignent, en particulier, le fait que malgré les blocages dus à la pandémie de Covid-19 et les perturbations des voyages, « 93 % des pays africains ont maintenu ou amélioré leur score par rapport à 2021 ». Ainsi, les deux tiers des pays africains ont adopté des politiques de visas plus libérales qu’il y a six ans. Ces premières données vont dans le bon sens, mais dans l’ensemble, d’importants progrès restent à faire car dans les faits seulement 27 % des pays du continent africain ne demandent pas de visas aux Africains. C’est dire qu’il est toujours plus facile pour un Américain ou un Français que pour un Africain de circuler librement d’un État africain à un autre. Pour bien comprendre la portée de cette étude, il faut savoir que l’indice d’ouverture des visas fait référence à la facilité avec laquelle les voyageurs sont autorisés à entrer dans le pays de destination. Il est également perçu comme une mesure de la liberté de mouvement depuis 2016.

Concrètement, aujourd’hui, trois pays – le Bénin, la Gambie et les Seychelles – offrent une entrée sans visa aux Africains de tous les autres pays. En 2016 et 2017, un seul pays l’avait fait.

L’édition 2022 du rapport met également en lumière les efforts de trois pays, qui ont le plus progressé dans leur ouverture des visas, à savoir le Burundi, Djibouti et l’Éthiopie. Addis-Adeba, en particulier, a gagné plusieurs places pour retrouver sa place dans les 20 pays les plus performants du continent après avoir supprimé les mesures temporaires instituées en 2021. Il faut noter qu’avant la pandémie, le géant d’Afrique de l’Est a adopté une politique de visa à l’arrivée beaucoup plus libérale pour les visiteurs continentaux ainsi que des visas électroniques. Quant au Burundi, il permet désormais aux visiteurs de la plupart des citoyens africains d’obtenir un visa à leur arrivée et non plus obligatoirement avant de quitter leur pays. Bujumbura maintient également un haut niveau d’ouverture envers ses voisins, sur une base de réciprocité.

Peut-on pour autant se déplacer facilement sur l’ensemble du continent ? Une analyse présentée dans le rapport met en exergue le rôle moteur joué par les communautés régionales d’Afrique, parmi lesquelles la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) et la Communauté de l’Afrique de l’Est, qui se sont particulièrement illustrées en offrant un vaste espace de libre-circulation et la réciprocité entre voisins. D’après Jean-Guy Afrika, directeur par intérim en charge du Bureau de coordination de l’intégration régionale au sein de la BAD, « dans l’ensemble, le continent est revenu à un niveau d’ouverture des visas vu pour la dernière fois juste avant le début de la pandémie ».

Chiffres à l’appui, le rapport indique que pour 27 % des voyages intra-africains, les citoyens africains n’ont pas besoin de visa, contre 25 % en 2021. Pour 27 % des voyages intra-africains, ils peuvent obtenir un visa à l’arrivée, contre 24 % en 2021. En revanche, pour 47 % des voyages entre États africains, les citoyens du continent sont toujours tenus d’obtenir un visa avant de voyager. Une statistique en nette amélioration + 51 % en 2021. Cependant, des progrès ont été signalés concernant l’offre de visa électronique, le nombre de pays le proposant est passé de 6 en 2016 à 24 en 2022. Par exemple, l’Afrique du Sud a introduit un visa électronique en février 2022 et l’a mis à la disposition des demandeurs de 14 pays, dont la moitié se trouvent en Afrique.

Cependant, la demande de visa est toujours coûteuse et chronophage pour quiconque souhaite commercer ou étudier dans un autre pays africain. « Nous devons faire tomber toutes les barrières qui entravent la libre circulation des personnes à travers le continent, en particulier celle des travailleurs. C’est vital pour promouvoir l’investissement », a déclaré le directeur de la Banque africaine de développement, Akinwumi Adesina, lors du lancement du rapport, lors de la Conférence économique africaine, organisée à Balaclava (île Maurice).

Promouvoir la libre circulation fait désormais partie intégrante de la stratégie de promotion de la Zone de libre-échange africaine (Zlecaf). Les premiers échanges ont débuté parmi un groupe restreint de pays et les négociations sur les règles d’origine ont connu des avancées ces dernières années. Cependant, pour que la Zlecaf tienne toutes ses promesses, la libéralisation de la circulation des marchandises doit s’accompagner d’une libéralisation des services et de la mobilité des personnes. Pour la vice-présidente de la Commission de l’Union africaine, Monique Nsanzabaganwa, « cette édition relie la libre circulation au développement des chaînes de valeur régionales, aux investissements, au commerce des services et à la Zlecaf. Il est de plus en plus reconnu que la mobilité humaine est essentielle aux efforts d’intégration de l’Afrique ».

Les deux institutions à l’origine du rapport préconisent plusieurs mesures pour faire évoluer les politiques de visas qui doivent propulser le continent africain, notamment l’adoption de la technologie pour lever les obstacles, ou encore la réduction des coûts administratifs. Les auteurs misent également sur le rôle des blocs régionaux qui peuvent être moteurs dans les échanges de leurs membres d’un territoire à l’autre. D’autres pistes déjà lancées, ces dernières années, comme le passeport de l’Union africaine pour tous les citoyens africains.

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