
Africa-Press – Burkina Faso. A travers une conférence de presse organisée le vendredi 5 mars 2021, des musulmans ont exprimé leur mécontentement quant à l’attribution de ladite parcelle à l’archidiocèse de Bobo-Dioulasso. Si la communauté musulmane a souhaité que cette parcelle lui soit restituée pour la construction d’une mosquée, celle catholique prône surtout le dialogue pour préserver le vivre-ensemble et la cohésion sociale au Burkina Faso.
Un conflit foncier oppose la communauté musulmane à celle catholique au quartier Belleville, dans l’arrondissement 7 de la commune de Bobo-Dioulasso. Le problème est lié à une réserve administrative formant la parcelle 00 lot 08 section AK, d’une superficie de 21 110 m2 environ.
En effet, des musulmans du quartier Belleville (secteur 29) dans l’arrondissement 7 de la commune de Bobo-Dioulasso ne sont pas contents. Ils estiment qu’on leur a fait la force en retirant leur parcelle pour ensuite l’attribuer à la communauté catholique. Ils l’ont fait savoir le vendredi 5 mars 2021 au cours d’un point de presse.
Selon le porte-parole des conférenciers, Ousmane Zonou, cette réserve devrait être attribuée à la communauté musulmane pour la construction d’une mosquée depuis les années 2008. Et à leur grande surprise, ils constatent qu’elle est attribuée à la communauté catholique qui avait déjà commencé des travaux sur le site. « C’est depuis 2003 que nous avons occupé le site. A l’époque, nous avions approché les différents maires. De Karim Barro, puis Moussa Hema et Herman Sirima, nous avons souhaité qu’ils nous attribuent cette réserve pour la construction de notre mosquée car nous n’avions pas une place pour prier à l’époque. On n’a jamais eu de suite à notre demande », a-t-il expliqué.
A l’en croire, ils avaient même commencé la construction de leur mosquée sur la réserve depuis 2008 et ce, avec l’accord du maire Karim Barro. Mais les travaux n’iront pas loin sur le chantier car vite interrompus par ce même maire Karim Barro à l’époque. Ce dernier leur avait demandé de suspendre les travaux en attendant de réunir les papiers nécessaires pour l’attribution de la parcelle. « On est restés à attendre jusqu’à aujourd’hui. Lorsqu’on avait approché Moussa Hema, lui s’est déporté sur les lieux pour constater de visu les travaux qu’on avait déjà commencés. Ce dernier avait promis de nous faire un retour jusqu’à ce qu’il parte de la mairie. Lorsque Herman Sirima est arrivé à la tête de l’arrondissement, nous avons envoyé une délégation pour le voir. Ça a été toujours les mêmes promesses, « qu’ils vont voir » », a déploré le porte-parole des conférenciers.
Il a affirmé avoir été reçu par le secrétaire général de l’arrondissement qui avait voulu savoir pourquoi il y avait une mosquée inachevée sur le site. « Nous lui avons expliqué toute l’histoire, et les maires nous avait promis de déclasser la réserve et de nous l’attribuer. A cette rencontre ils ne nous ont pas dit que la réserve était déjà attribuée à quelqu’un. C’est après que les chrétiens nous ont approché pour nous dire que la réserve leur est attribuée et qu’il fallait quitter sur les lieux. Nous leur avons dit non, parce que quitter sur les lieux ce n’est pas facile. Nous sommes les premiers occupants de cette réserve administrative », a rappelé Ousmane Zonou.
C’est ainsi que la communauté catholique a saisi la mairie de l’arrondissement 7 pour lui faire part de la situation. Le mercredi 3 mars 2021, les protagonistes ont été convoqués par l’autorité administrative afin de trouver un terrain d’entente. A l’issue de la rencontre et après avoir écouté les deux camps, l’autorité leur avait suggéré le dialogue afin de trouver un terrain d’entente. Par ailleurs, elle avait promis de se concerter avec tous les conseillers de l’arrondissement pour voir ce qu’il a lieu de faire. Et c’est dans cette attente que le camp de la communauté musulmane a décidé de se faire entendre par l’opinion publique. Selon eux (les musulmans), ils ne souhaitent pas que cette histoire entrave la bonne cohabitation des deux communautés dans le quartier.
Cependant, ils ont souhaité rentrer en possession de « leur terrain ». Ainsi, pour le porte-parole, de 2003 à 2020, ce n’est pas deux jours. N’ayant pas de documents nécessaires qui prouvent que la parcelle est la leur, Ousmane Zonou a estimé que « la mosquée sur les lieux représente plus qu’un papier. La mosquée c’est pour Dieu alors que le papier c’est l’homme qui fait. Donc la mosquée est plus valable que la signature d’un papier », a-t-il dit.
L’autorité administrative s’explique
Après avoir écouté la version des faits de la communauté musulmane, a voulu en savoir davantage auprès des responsables de l’arrondissement 7 de Bobo-Dioulasso, qui n’ont pas hésité à livrer leur version. Ainsi, selon les explications de l’autorité administrative, notamment le premier adjoint au maire de l’arrondissement 7, Charles Sanou, la démarche de la communauté musulmane pour l’acquisition de la réserve a été faite de manière verbale. Il n’y a pas eu d’écrit pour demander la réserve alors que l’archidiocèse avait introduit une demande depuis Ouagadougou pour avoir une autorisation de déclassement de la réserve administrative, au niveau du ministère en charge de l’Economie et des Finances.
« La demande de changement de destination de la réserve n’a pas été introduite au sein de l’arrondissement. Généralement la demande est déposée au niveau du ministère des Finances et c’est ce qui a été fait. Ensuite, cette demande est renvoyée au niveau de la collectivité territorialement compétente pour donner juste un avis. Lorsque nous avons reçu la demande qui datait du 20 juillet 2018, le Conseil a été saisi et la délibération a été adoptée. Et il fallait qu’on vérifie au niveau domanial pour voir est-ce qu’il n’y a pas une autre demande sur la même réserve. La vérification a été faite et nous avons constaté à l’époque qu’il n’y avait pas une autre demande. C’est ce qui a permis d’introduire ce projet de délibération qui a été adopté à l’époque par 23 voix pour et une abstention », a expliqué le secrétaire général dudit l’arrondissement, Etienne Bako.
C’est à l’arrondissement 7 que nous avons appris que la communauté musulmane a demandé à l’archidiocèse de Bobo-Dioulasso de lui céder une partie de la réserve, pour poursuivre les travaux de construction de la mosquée. Chose qui ne relève pas de ses compétences. « Dans la recherche de solutions pour le bon-vivre des populations, comme c’est une affaire de religion, nous avons souhaité rencontrer les deux parties. Au cours de la rencontre, le problème a été posé et la communauté musulmane n’a pas voulu écouter ; parce qu’elle trouve qu’on lui a fait la force car elle a été la première à occuper les lieux. L’archidiocèse de Bobo-Dioulasso nous a fait savoir qu’avant de commercer les travaux, il a d’abord échangé avec les musulmans pour le bon-vivre. Ces derniers (les musulmans) avaient compris et ont voulu qu’on coupe une partie de la réserve pour eux. La communauté catholique leur avaient dit qu’elle n’était pas habilitée en la matière. Et que si cela devrait se faire, ils doivent repartir à la base », a relaté Charles Sanou, premier adjoint au maire de l’arrondissement 7.
L’autorité pour qui le papier prime, a néanmoins invité les protagonistes au dialogue, à plus de compréhension et à prôner surtout la cohésion sociale. « Nous leur avons dit que c’est entre eux qu’ils peuvent trouver la solution à ce problème. C’est vrai que nous avons pris une délibération, mais en entourant ça de précautions. On n’a pas fait la force à quelqu’un. Ce sont les textes qu’on a suivis. Aujourd’hui, la communauté musulmane n’a rien pour prouver que la réserve leur appartient alors que l’archidiocèse a un document en bonne et due forme », a-t-il laissé entendre.
Toutefois, il a insisté sur le fait que ce n’est pas l’arrondissement qui a été saisi directement pas la communauté catholique. « C’est depuis Ouaga que la demande a été formulée et le ministère nous a envoyé juste un arrêté pour que le Conseil puisse donner son avis. L’avis a été donné en considérant qu’il n’y avait pas une autre demande pendante devant le Conseil sur la même réserve », a insisté Charles Sanou.
Le dialogue comme moyen de promouvoir la cohésion sociale
A en croire l’autorité administrative, la demande de la réserve a été faite par la communauté catholique, en vue de construire des infrastructures d’œuvres sociales. A cet effet, nous avons cherché à rencontrer la communauté catholique qui n’a pas voulu parler par presse interposée. Selon le père Oscar Sondo que nous avons joint au téléphone, « c’est comme si nous parlons dans le dos de quelqu’un. Si nos frères musulmans étaient en face, on allait parler de manière claire », a-t-il dit.
Il a tenu à préciser que la réserve a été acquise selon la procédure légale. Il invite cependant la communauté musulmane à plus de dialogue car il estime que ce problème n’en est rien. « Je ne veux pas parler dans le dos de la communauté musulmane car je ne veux pas envenimer quelque chose qui n’en est rien en réalité.
Pourtant il y a eu des pourparlers avec la communauté musulmane. Cette sortie est un rebondissement de dernière minute que nous ne comprenons pas. Si nous devons parler à la presse également c’est comme si nous donnons du poids à ce problème qui n’en est rien. C’est comme s’il y avait un problème entre les deux communautés. On ne se sent pas en conflit avec nos frères musulmans », a expliqué le père Oscar Sondo.
Il a invité la communauté musulmane à reprendre le dialogue. « Nous sommes ouverts au dialogue. C’est lorsque le dialogue est rompu qu’on passe par presse interposée et cela n’est pas intéressant. Donc on n’est pas en opposition avec cette communauté. Si nous pouvons nous rencontrer pour parler, nous allons le faire », a-t-il conclu.
Romuald Dofini




