Tombe de Toutânkhamon : le mystère Néfertiti

Tombe de Toutânkhamon : le mystère Néfertiti
Tombe de Toutânkhamon : le mystère Néfertiti

Africa-Press – Burkina Faso. Nicholas Reeves est un prestigieux égyptologue britannique ayant œuvré au sein du British Museum. Cela fait plus de huit ans qu’il accumule des preuves en faveur de la présence de la tombe de Néfertiti intacte derrière celle de Toutânkhamon.

Il vient encore de rajouter une pierre à son édifice sans vraiment convaincre Marc Gabolde, grand spécialiste de la XVIIIe dynastie et professeur d’égyptologie à l’université de Montpellier.

Reprenons cette polémique à son début. En 2015, l’égyptologue britannique affirme avoir détecté sur le mur nord de la chambre sépulcrale de Tut (soyons familiers) des minuscules reliefs pouvant correspondre à une ouverture rebouchée. Le plafond lui-même semblerait se prolonger au-delà du mur. Dès lors, Reeves est persuadé que la tombe se poursuit derrière le mur nord. C’est son intuition qui parle. Il rappelle également qu’étant mort jeune, Tut n’avait pas encore de tombeau prêt et que, du coup, peut-être a-t-on déposé sa momie dans une tombe déjà creusée.

Jusque-là, les autres égyptologues le suivent. Mais une tombe qui appartenait à qui ? Comme elle est très modeste, comparée aux autres tombes royales, les égyptologues l’attribuent majoritairement à un haut fonctionnaire. Pas Reeves. « Les preuves que j’ai relevées depuis huit ans et plus indiquent clairement que la tombe était beaucoup plus étendue que celle que nous voyons maintenant, une tombe conçue à l’origine pour Néfertiti lorsqu’elle était l’épouse d’Akhenaton, le père de Toutânkhamon, et qui accueillit sa momie après son règne sous le nom de Smenkhkare. »

Quand Toutânkhamon expira dix ans plus tard, on se serait donc contenté de rouvrir la tombe de Nefertiti-Smenkhkare pour lui attribuer les chambres les plus extérieures. En 2016, des sondages radar ne donnèrent rien de concret. Cela ne découragea point l’archéologue britannique, qui découvrit alors d’autres indices dans la peinture ornant le mur nord. Sur la droite, celle-ci représente le rituel de l’ouverture de la bouche. On y voit le nouveau pharaon Ay frôler les orifices de la tête du pharaon défunt Toutânkhamon avec une herminette pour qu’il puisse voir, manger et respirer au pays de morts.

En observant de près ces deux personnages, Reeves leur donne une autre identité. Il s’agirait de Toutânkhamon pratiquant le rituel de la bouche sur son prédécesseur, donc Néfertiti. Ceci signifierait que la tombe était primitivement celle de la reine égyptienne. Reeves croit encore reconnaître sous le nom d’Ay les hiéroglyphes désignant Toutânkhamon.

Aujourd’hui, en 2022, Reeves en rajoute encore une couche. Il nous déclare : « Je suis maintenant en mesure de démontrer que le cartouche contenant le prénom d’Ay recouvre celui de Toutânkhamon écrit dans une forme rare et ancienne employant les trois signes du scarabée. Il est donc manifeste que le personnage initialement représenté à l’extrême droite du mur nord était Toutânkhamon présidant aux obsèques de son prédécesseur Néfertiti. J’en conclus que la représentation du rituel de la bouche sur le mur nord signale la fermeture dissimulée du domaine funéraire de Néfertiti, comme d’autres maçonneries, aujourd’hui, démantelées, qui ont pu être trouvées dans d’autres tombes royales. »

L’égyptologue Marc Gabolde, à qui nous nous sommes adressés pour savoir ce qu’il pense de la théorie de son collègue, n’y va pas par quatre chemins. Il dézingue tous les arguments de celui-ci. « Il me fait penser à ces gens qui voient des lézards sur Mars. Personnellement, je ne vois absolument pas ces prétendues superpositions de cartouches. Reeves est pourtant un excellent égyptologue avec qui j’ai même publié, mais cette usurpation de la tombe de Néfertiti par Toutânkhamon, cela ne marche pas. »

Il faut dire qu’il dispose d’un argument de poids. Non seulement Néfertiti est, pour lui, morte avant son époux Toutânkhamon, ce qui l’empêche de fait de lui succéder, mais sa momie a été récemment identifiée. « Il s’agit de celle baptisée Young Lady lors de sa découverte il y a 126 ans dans une cache de la Vallée des Rois, assure Gabolde. Des tests ADN en font la mère de Toutânkhamon. »

Bref, le pharaon féminin, abusivement identifié à Smenkhkare ayant succédé Akhenaton, ne peut pas être Néfertiti. L’égyptologue français propose plutôt Mérytaton, la fille de Néfertiti et d’Akhenaton, et sœur aînée de Toutânkhamon. Quand aux cartouches portant le nom d’Ay, il a beau les scruter, il n’y voit aucune trace de hiéroglyphes appartenant au nom de Toutânkhamon.

Nicholas Reeves, à qui nous avons confié ces réticences, persiste et signe : « Mes conclusions ne sont pas basées sur des spéculations, mais sur une masse de preuves physiques, archéologiques et d’inscriptions accumulées au cours des huit dernières années et plus. De nombreux égyptologues sont intrigués par ma thèse et pensent qu’elle mérite une enquête géophysique plus approfondie. »

Pour trancher définitivement, il faudrait opérer un sondage en perçant une paroi. Les autorités égyptiennes y consentiront-elles ? Si jamais Reeves avait raison, pourrait-on rêver d’un tombeau aussi fastueux que celui de Toutânkhamon ? Nicholas Reeves ne l’exclut pas. De son côté, Gabolde n’y croit pas : « Le mobilier funéraire du prédécesseur de Toutânkhamon, qu’il soit Néfertiti ou Mérytaton, est déjà bien connu : il a été entièrement réutilisé pour inhumer Toutânkhamon lui-même ! » Comme disent les Égyptiens, Inchallah.

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