Anouar CHENNOUFI
Africa-Press – Burundi. Les anciens facteurs de pauvreté et de marginalisation, sont un mélange combustible à tout moment, et prédit le retour du terrorisme à la lumière de l’assouplissement des restrictions imposées en raison de l’épidémie de Corona.
Dans ce contexte, le magazine américain Foreign Policy a mis en garde contre la résurgence du terrorisme mondial, affirmant qu’après des années d’interruption il semble avoir refait surface, notant que si le nombre de morts tombés dans leurs opérations diminue, leurs attaques augmentent et la politique dépasse la religion comme motif, du moins en Occident.
Épicentre du terrorisme
Dans son rapport, l’institut australien pour l’économie et la paix (GTI) considère que l’Afrique subsaharienne est devenue un foyer du terrorisme mondial, après l’expansion de Daech dans la région, et la présence continue du groupe Boko Haram, alors même que l’Afghanistan continue d’être le pays le plus exposé à ce phénomène dans le monde.
Cela ne signifie pas que les points chauds traditionnels – tels que le Moyen-Orient ou l’Afrique de l’Est – sont hors de portée de leurs attaques meurtrières, car les récentes attaques en Israël et en Somalie ont confirmé la persistance des menaces dans ces zones, et, comme toujours, la propagation reste liée aux conditions sociales et économiques, car les organisations terroristes exploitent la pauvreté et la marginalisation pour recruter de nouveaux membres, comme l’organisation Daech, par exemple, qui promet aux jeunes européens mécontents de nouvelles vies et de nouvelles opportunités, tandis que Boko Haram offre des salaires énormes dans la région du Sahel africain.
Brutalité extrême
Ces groupes usent d’une extrême brutalité, comme en témoigne le comportement de l’organisation Daech en Irak, pour retenir leurs combattants, qui craignent les conséquences d’une tentative de départ, et pour attirer les violents. Ces groupes procurent également un fort sentiment d’appartenance aux personnes défavorisées, car rejoindre un groupe les aide à survivre et les protège de toute menace potentielle.
C’est d’ailleurs pour cette raison, que la levée des restrictions liées à l’épidémie, après trois ans de troubles sociaux et économiques, pourrait entraîner une augmentation de l’activité de ces groupes armés, car l’assouplissement des fermetures et des restrictions imposées à la circulation et aux déplacements, peut conduire à une escalade du nombre d’attaques, dans le cas où les problèmes fondamentaux ne sont pas résolus, ce qui conduit à l’extrémisme, car des années d’inégalités et de griefs économiques et sociaux ont contribué à accroître le chômage des jeunes et le potentiel de propagation des groupes armés.
L’indice de l’Institut australien a classé Daech comme étant l’organisation terroriste la plus meurtrière, indiquant l’expansion de sa portée à travers ses groupes affiliés dans la région du Sahel africain, qui a fait de cette région un centre de la résurgence de ce fléau dévastateur.
Source de stress
Selon la même source, la région du Sahel, qui comprend le Burkina Faso, le Cameroun, le Tchad, la Gambie, la Guinée, la Mauritanie, le Mali, le Niger, le Nigéria et le Sénégal, est « très préoccupante », car le nombre de décès dus aux attaques des groupes armés y a augmenté de plus de 1 000 % depuis 2007, et la moitié des décès causés par les attaques commises dans le monde – l’année dernière – se sont produits en Afrique subsaharienne, en particulier au Sahel.
Pour sa part, le magazine américain Foreign Policy a ajouté que l’expansion des groupes armés affiliés aux organisations de Daech et d’al-Qaïda a provoqué l’escalade du terrorisme dans de nombreux pays africains du Sahel, transformant l’Afrique en un refuge pour leurs divers groupes.
«Foreign Policy» a vu que le retrait des forces de sécurité et des forces de maintien de la paix américaines et de l’Union africaine – l’année dernière – a conduit également au renforcement du groupe « Al-Shabab », la filiale d’Al-Qaïda qui est à l’origine de la plupart des 308 attentats perpétrés en Somalie en 2021 , et l’instabilité politique qui a suivi la décision du parlement somalien de prolonger indéfiniment le mandat du gouvernement l’a également aidé, car le mouvement comble le vide laissé par le retrait des forces anti-terrorisme.
La menace des groupes armés grandit au centre, au nord et au sud du continent
Selon des rapports de sécurité, 15 pays africains ont été témoins de plus de 70 attentats au cours de l’année écoulée, qui ont fait des milliers de morts.
Dans ce contexte, Ahmed Kamel Beheiry, chercheur spécialisé dans les groupes terroristes au Centre d’études stratégiques d’Al-Ahram, a déclaré que les attaques perpétrées en Afrique avaient augmenté après l’assassinat d’al-Baghdadi, en octobre 2019.
Il a souligné que les années 2020 et 2021 sont les plus influentes en Afrique du fait du repositionnement de nombreux éléments de Daech au sein de l’arène africaine après le succès des frappes de la coalition internationale en Irak et en Syrie.
Dans son entretien avec la chaîne Al-Ghad, Beheiri a ajouté qu’il y a une véritable restructuration de ces organisations en 2021 sur le continent africain, expliquant qu’avant 2020, on parlait des États du Sahel, de l’Afrique de l’Ouest et du Centre, en plus de la Somalie, confirmant à ce propos qu’il y a eu une fusion entre Daech au Sahel avec l’Afrique de l’Ouest, y compris du lac Tchad au sud de la Libye, du Mali et du Burkina Faso jusqu’à atteindre le Sahel africain.
Le chercheur a souligné que la même chose s’est produite en Centrafrique, au Mozambique, en Tanzanie et en Ouganda, tout en soulignant le retour de l’activité de l’organisation Daech en Somalie après un déclin constaté en 2019 et au début du premier semestre 2020. Il a ajouté : « L’organisation est revenue en Somalie en 2021 à un rythme soutenu ».
Il a déclaré entre-autres que l’Afrique, avec ces trois régions, la Somalie, l’Afrique de l’Ouest et l’Afrique centrale, est devenue la première des 14 branches de Daech dans le monde.
L’expansion de l’organisation Daech
Derrière la montée de la violence en Afrique se cachent des facteurs et des contextes qui ont exacerbé la force des groupes armés sur le continent, dont le plus dangereux est l’organisation Daech et ses branches les plus pertinentes, celles venant du sud de la Libye, car elle a pu en très peu de temps s’étendre vers le Tchad, le Niger, le Burkina Faso, le nord du Mali et le Nigeria.
De son côté, Boko Haram, au Nigeria et dans ses environs, a également gagné en férocité après que des éléments de l’organisation aient prêté allégeance à Daech, au milieu de l’intensification du conflit avec des groupes affiliés à Al-Qaïda.
A l’ouest également, les pays du Sahel font toujours face à des attentats sanglants, malgré la présence de la force Barkhane et d’environ 13 000 soldats des Nations unies, alors que l’est du continent est devenu le plus grand foyer du terrorisme en Afrique, notamment en Somalie, après l’intensification de l’activité armée d’Al-Shabab.
L’expansion du mouvement Al-Shabab
Pour sa part, le Dr Hassan Sheikh Ali, professeur de relations internationales à l’Université nationale de Somalie, a déclaré qu’Al-Shabab en tant qu’entité armée cherche à prendre le pouvoir, notant qu’il a tenté il y a 8 ans d’avancer vers la capitale, alors qu’ils étaient à proximité du siège de la présidence.
Il a souligné qu’il s’est retiré après que le gouvernement somalien ait eu recours aux forces africaines.
Il a déclaré que l’expansion de ces mouvements en Afrique est due à la faiblesse des pays du continent et à l’absence de progrès politique, économique ou de service dans divers pays africains.
Un facteur important de l’expansion du phénomène sur le continent est représenté par certains jeunes de ces pays qui avaient recours à la violence pour satisfaire leurs désirs religieux, idéologiques et matériels, ainsi qu’aux coups d’État qui ont frappé 4 pays en 2021, en Centrafrique, au Niger, au Mali et en Guinée.
Les points de contacts de Daech
Daech a établi quatre États dans la région du lac Tchad sous un commandement central dans l’État de Borno au Nigeria. Il s’appuie sur un réseau complexe de communications et de routes s’étendant de la Libye au Nigeria pour faciliter les déplacements de ses membres.
Les mouvements de l’organisation Daech et d’autres groupes ont été motivés par la concurrence de la France, de l’Italie et de la Turquie pour les zones d’influence en Afrique du Nord et dans la région du Sahel.
Il faut se mettre à l’évidence que le terrorisme en Afrique est façonné aujourd’hui par les activités du mouvement Al-Shabab, de Boko Haram, d’Al-Qaïda et de Daech.
Si l’on ne donne pas aux gouvernements africains les moyens de mener une politique antiterroriste efficace et durable en privant les groupes armés de leurs « éléments », il est fort à craindre de voir se consolider non seulement un arc meurtrier allant de la Mauritanie au Nigéria et se prolongeant jusqu’à la Corne de l’Afrique, mais aussi de voir se développer une zone de non-droit pour les trafiquants du monde entier, a averti Faure Gnassingbé, président du Togo.
Ce fléau dépasse largement la grandeur du continent africain. Les ports d’Afrique occidentale et le Sahel sont devenus des plaques tournantes pour les réseaux de trafic de stupéfiants, sachant que le trafic d’immigrants varie entre 65 000 et 120 000 personnes par an, alors que le trafic des armes légères est évalué à 8 millions de pièces, dont 100 000 kalachnikovs.
D’autant plus que les riches ressources naturelles en minerais, en énergie, en forêts, en agriculture et en eau de l’Afrique fournissent des moyens de subsistance et de la richesse aux citoyens africains et jouent un rôle de plus en plus important dans l’économie mondiale. Les secteurs des ressources naturelles en Afrique contribuent à environ un tiers de la croissance du produit intérieur brut et constituent la base de l’emploi, de la sécurité alimentaire et du développement sur l’ensemble du continent.
Les différends sur la propriété, le contrôle, l’accès aux avantages provenant des ressources naturelles, sont fréquents et posent des risques inhérents pour la paix et la sécurité. La plupart de ces différends sont résolus sans intervention extérieure ou internationale. Cependant, il arrive parfois que des conflits liés aux ressources naturelles dégénèrent en violence. Une telle escalade est plus susceptible de se produire lorsqu’il n’y a pas de processus de résolution des conflits convenu d’un commun accord. Les conflits liés aux ressources naturelles sont également plus susceptibles de conduire à la violence s’ils viennent s’ajouter aux différences ethniques, politiques ou religieuses existantes, ou dans le contexte de corruption généralisée et du crime organisé.
Dans plusieurs contextes africains, des groupes armés exploitent et négocient illégalement des ressources naturelles pour financer et soutenir leurs activités. Les intérêts commerciaux extérieurs peuvent également attiser les conflits liés aux ressources naturelles, contribuant ainsi à une instabilité prolongée et à la détérioration des relations entre l’État et la société.
La guerre internationale contre le terrorisme
Aujourd’hui, il faut se pencher sur les résultats de cette guerre qui ont le droit d’être évalués, que ce soit au niveau national ou international. Voici quelques constatations faites :
• Le danger croissant des organisations
Ces organisations ne s’appuient plus sur des moyens traditionnels pour attaquer des cibles (engins explosifs improvisés), mais possèdent plutôt des armes de pointe que les armées des pays visés ne possèdent même pas (armes lourdes, drones, missiles…), notamment en Afrique.
Après que la menace des groupes armés contre les pays ait été limitée au début du troisième millénaire, elle est aujourd’hui devenue plus dangereuse, dans la mesure où elle a détruit des pays et déplacé des millions d’individus, alors que ses victimes se comptent par centaines de milliers.
• La prolifération de ces organisations
Al-Qaïda n’est plus seulement active sur la scène internationale et mène ses opérations tranquillement, mais d’autres organisations plus dangereuses et sanglantes se sont constituées (Daech, Boko Haram, Somali Youth Movement, Jama’at nusrat al Islam wal Muslimine…), et qu’il faut prendre en considération.
Ainsi, le monde n’est plus confronté à une seule organisation terroriste, mais plutôt à la menace d’autres organisations barbares plus sanglantes et plus féroces, car le nombre de ces organisations a atteint 27.
• Elargissement des activités des groupes armés
Après s’être cantonné à l’Afghanistan lors du premier contrôle des talibans, la stratégie de la coalition internationale a conduit à la globalisation de ce phénomène à travers la globalisation de la guerre contre celui-ci. C’est ainsi que l’on a constaté son développement en Asie et en Afrique tout en continuant de se développer sous l’œil attentif des pays de la coalition et leur réticence à tarir ses sources.
En fait, les pays de la coalition ont facilité le contrôle des organisations sur de grandes parties de l’Irak et de la Syrie, et les régions de la Syrie sont toujours sous le contrôle de ces groupes armés avec un soutien de l’étranger.
A noter que dans un rapport daté de novembre 2019, le secrétaire général des Nations unies Antonio Guterres avait averti que « ces groupes ont consolidé leur implantation dans toute la région du Sahel, sapant la stabilité dans de vastes zones de celle-ci et alimentant la violence ethnique, en particulier au Burkina Faso et au Mali ».
• L’augmentation de la fréquence des attentats
L’expansion et la possession d’armes et d’argent ont permis au groupes armés d’attirer des milliers d’extrémistes, de différents continents et pays, et de les recruter pour attaquer des pays qui souffrent de fragilité et d’un armement faible, en particulier en Afrique. Cela a poussé les organisations à intensifier leurs attaques sanglantes visant à la fois les civils et les militaires.
Selon les chiffres révélés par l’Office américain de lutte contre le terrorisme, le nombre d’attentats dans la région du Sahel a augmenté de 43% entre 2018 et 2021. Compte tenu de la fragilité des pays sahélo-sahariens, les victimes dans cette région représentent 48% des décès mondiaux liés aux attaques des groupes armés.
Par ailleurs, selon le rapport du « Terrorism Lens » publié au Caire dans la deuxième semaine de mai 2022, le continent africain a connu au cours du mois d’avril dernier 726 morts dus à des attaques sanglantes, en plus de centaines de blessés. Le rapport indique que « les groupes armés sont devenus plus influents et actifs sur le continent africain ».
Ceci a été également confirmé par le rapport de la « Fondation Maat pour la paix, le développement et les droits de l’homme » au Caire, selon lequel « des groupes armés ont mené et leur ont été attribués environ 904 opérations en 2021, tuant 1 799 personnes et en blessant 1 912 autres ».
C’est pourquoi Victoria Nuland, la sous-secrétaire d’État américaine chargée des affaires politiques, a prévenu lors de sa participation à la conférence de Marrakech organisée par la coalition internationale contre Daech, que « les actes de ces groupes menacent le continent africain depuis quelques années en raison de la menace croissante de l’organisation Daech dans la région ».
• L’alliance de la sécession avec le terrorisme
En effet, les organisations financent les mouvements séparatistes avec de l’argent et des armes en échange de la réalisation d’enlèvements de citoyens et d’étrangers ou d’attaques ciblant les forces militaires, ainsi que d’une coordination entre les organisations (séparatistes, terroristes et du crime organisé) qui garantit d’éviter les conflits armés entre elles. Cette alliance et ce lien entre les organisations s’incarnent dans plusieurs modèles.
Le continent brun dans le collimateur du terrorisme
Il importe de noter que malgré l’absence d’un recensement précis du nombre d’opérations commises sur le continent, qui ont atteint de nouvelles zones telles que les Grands Lacs et l’Afrique du Sud, et du nombre de victimes, avec des estimations différentes émanant des observatoires et des centres de recherche pertinents, le point commun facteur dans les rapports et les études sur le terrorisme et son développement en Afrique reflète la tendance des organisations terroristes qui s’accélère sur le continent brun, en tant que leur centre principal, et qui compense les pertes de Daech en Syrie et en Irak, ce qui jette plus de défis sur les épaules des pays africains, dont certains souffrent déjà de crises suffocantes.
En plus des efforts nationaux, d’autres efforts internationaux voient le jour en appui à la lutte contre les groupes armés en Afrique, dont la présence française par exemple, en Afrique de l’Ouest, ou encore le rôle américain dans l’Est du continent, mais ces efforts restent limités à des facteurs d’affrontement sécuritaires (l’usage de la force) sans un traitement des causes réelles qui poussent la croissance du phénomène sur le continent, ce qui rend ce traitement inefficace pour mettre fin complètement à l’existence des organisations.
Ainsi, les faits nouveaux survenus sur les lieux et le développement des méthodes des divers groupes armés nécessitent, selon les observateurs, le développement de stratégies de confrontation, pour s’attaquer aux causes profondes de la croissance de ce phénomène sur le continent, et pour combler le financement et même les écarts culturels et intellectuels, dans ce qu’on appelle le renforcement des cadres et des contextes de confrontation globale.
Il importe également de revenir sur le fait que la guerre interne entre les groupes armés affiliés à Al-Qaïda et à Daech en Afrique n’a pas empêché leur expansion géographique, mais la fragilité politique et sociale du continent africain et la propagation de l’épidémie de Covid-19 ont favorisé cette expansion, après la constatation de l’échec de l’Etat national en Afrique, qui reste un facteur décisif de cette expansion.
Selon les experts, l’année 2020 a vu un conflit entre les organisations d’Al-Qaïda et de Daech en Afrique, et cela n’a pas empêché les deux organisations de s’étendre horizontalement, mais c’est un conflit qui n’a pas affecté leur expansion, d’autant que nombre de ceux qui s’intéressent aux questions africaines estiment qu’Al-Qaïda et Daech, après le déclin de leur influence en Syrie et en Irak, avaient orienté déplacé leur centre de gravité en Afrique de l’Ouest et de l’Est, ainsi qu’en Afghanistan, bien qu’à un rythme plus faible.
C’est d’ailleurs ce que dit le « Global Terrorism Index » dans sa huitième édition, publiée en novembre 2020 par l’Institute for Economics and Peace en Australie, que la région du Sahel africain a connu une augmentation des homicides de 67% par rapport à 2019.
Ainsi, la ceinture s’étendant de la région du Sahel à la Corne de l’Afrique est devenue le centre névralgique de l’activité des mouvements des groupes armés. Une ceinture parallèle a émergé au sud du continent, s’étendant de l’Angola à Madagascar, en passant par la République démocratique du Congo et le Mozambique. Les pays situés dans ces deux zones font face à une augmentation constante de ces opérations meurtrières.
La lutte des deux principales organisations
Al-Qaïda et Daech ont transféré donc leur différend sanglant aux factions qui leur sont affiliées en Afrique, ce qui signifie que ce continent est susceptible d’être l’arène d’une concurrence féroce entre les divers groupes armés venus du Moyen-Orient, notamment à l’échelle mondiale.
Toutes les indications indiquent que les années à venir verront plus de conflits intenses entre ces deux principales organisations, mais connaîtront également une expansion de ces organisations et une augmentation de leur influence, c’est-à-dire une expansion dans le contexte de conflit ou de guerre à la lumière de l’expansion, en l’absence de stabilité politique et de paix sociale en Afrique et en l’absence de responsabilité due à a corruption, et à la lumière de la sensibilité au colonialisme et à la présence de puissances étrangères ainsi que la lenteur de régimes et politiques de sécurité chancelants, ce qui va nécessairement s’amplifier et s’étendre à davantage d’espaces géographiques.
Il ne fait aucun doute que la nature de ces régions africaines a aidé Al-Qaïda et Daech à se développer. En effet, ces régions sont les pays les plus pauvres du monde, où le chômage, la pauvreté, la corruption et le manque de bonne gouvernance sont répandus, ce qui en a fait un environnement favorable dans lequel les groupes armés ont trouvé un espace d’expansion. En fait, certains de ces pays africains ont de vastes zones qui échappent même au contrôle du gouvernement. Ces groupes ont puisé leur force dans le contexte politique et de développement fragile et sont devenus une alternative aux gouvernements locaux.
Néanmoins, à un rythme accéléré, surtout depuis le début de la deuxième décennie du XXIe siècle, de vastes zones du continent africain, dont la plupart jusqu’à la fin des années cinquante du XXe siècle étaient des colonies européennes, se transforment en arènes de guerre, tensions et affrontements de formes diverses.
La plupart de ces conflits ont pour toile de fond des conflits externes entre puissances, dont certains sont classés comme majeurs et d’autres comme régionaux. Les interventions extérieures profitent de la situation du continent, qui compte une cinquantaine de pays, 2000 ethnies et 3000 langues, pour attiser la discorde sous toutes ses formes au service de leurs desseins.
Les pays européens en Afrique pendant la période coloniale ont suivi une politique basée sur le principe de diviser pour régner, coupant le corps africain en morceaux, puis coupant la section et divisant le fragment afin de briser davantage l’épine et de gagner le pari. Ils sont bien conscients que les Africains ont une sagesse qui dit : « Si le troupeau s’unit, le lion dort affamé », ils doivent donc garder les Africains dispersés.
Objectifs : Une main mise sur les ressources des pays africains
L’Afrique…vache laitière des pays occidentaux
Les caractéristiques de la lutte d’influence internationale actuelle en Afrique, selon les observateurs, se concentrent sur le contrôle des ports et voies navigables stratégiques, et des ressources naturelles stratégiques telles que le pétrole, le gaz naturel, l’or, les diamants, l’uranium et d’autres ressources naturelles.
Ali Hindi, chef de l’unité des études africaines au « Centre pour le progrès arabe des politiques », estime que les transformations et les changements récents en termes de concurrence internationale pour l’influence sur l’Afrique viennent principalement dans le but de la concurrence et de la réalisation de ses intérêts au sein du continent, mais aussi à cause de l’incapacité à résoudre les crises entre les pays au sein de la maison africaine, qu’elles soient régionales ou continentales, ce qui a contribué à ouvrir plus d’espace pour que ces forces interviennent sur le continent.
Il a ajouté que la lutte d’influence sur l’Afrique de l’Est et de l’Ouest s’est accrue après l’entrée de nouveaux acteurs tels que la Chine à travers ses vastes projets de développement mis en œuvre dans divers pays du continent, et l’émergence de la Turquie, de l’Inde et d’autres en tant qu’acteurs économiques, ainsi que comme la réémergence de l’acteur russe au pouvoir politique, alors que ces forces se font concurrence et se disputent les vastes richesses et ressources naturelles de l’Afrique.
A noter que les pays africains qui ont obtenu leur indépendance au cours des années soixante du XXe siècle se sont retrouvés contraints de faire face à un lourd héritage laissé par le colonialisme, qui a empêché leur développement et leur indépendance culturellement, politiquement et économiquement.
Les pays du continent sont tombés également dans le «piège» de la dette des organismes internationaux après la vague d’ouverture économique des années 80, car ces pays ont emprunté plus qu’ils n’ont pu rembourser au Fonds monétaire international, à la Banque mondiale, et certaines banques commerciales occidentales.
Ils se sont retrouvés également incapables de fournir des services à leurs populations tels que l’éducation, la sécurité, les soins de santé et les infrastructures, de sorte qu’ils puissent faire face aux services de la dette (montants qui sont payés pour obtenir le prêt, tels que les intérêts, les commissions, etc.).
Groupes armés : quels financements et d’où ?
Les groupes terroristes et les groupes criminels organisés emploient des méthodes similaires dans le financement de leurs activités.
L’extraction de fonds à partir du commerce de stupéfiants, de trafic d’armes, de blanchiment de capitaux et détournement de crédits sont devenus monnaie courante chez plusieurs organisations. Comme l’a montré Chester Oehme, analyste principal au ministère américain de la Défense, l’intersection entre organisations criminelles, insurgés et terroristes apparaît comme plus forte et plus prononcée dans le kidnapping, le blanchiment de capitaux et les escroqueries de carburant et huile.
Les réalités politiques et économiques au sein des États jouent un rôle dans la coopération étroite entre ces éléments criminels et ces organisations. Les écrits s’accordent pour dire que les deux prospèrent dans:
*les États post-conflits, faible avec des lois et institutions inefficaces,
*les États aux frontières poreuses et peu gardées,
*les États faisant face à une corruption endémique et systémique,
*les États offrant des opportunités criminelles lucratives.
La course pour le contrôle de l’énergie et des ressources naturelles en Afrique
-/-Pétrole et gaz
Selon des rapports distincts, le continent possède environ 75 milliards de barils de réserves de pétrole, soit 9 % des réserves mondiales de cette ressource vitale, et en produit environ 300 millions de barils pour la production d’électricité.
Quant aux chiffres du Fonds monétaire international, ils indiquent que les zones semi-désertiques du continent brun ont enregistré ces dernières années des découvertes de pétrole qui feront monter à court terme leurs taux de production pétrolière.
A noter que l’Afrique produit 22 millions de pieds cubes de gaz naturel par jour, qui peuvent être augmentés voire doublés avec les explorations gazières dans les pays du nord du continent, représentant 7,5% de la production mondiale totale de cette ressource économique.
Les réserves de gaz naturel en Afrique sont d’environ 477 billions de pieds cubes, ce qui représente 6,9% des réserves mondiales. En ce qui concerne l’énergie solaire, le continent possède le plus grand stock de ce type d’énergie, car il comprend les déserts les plus vastes et les plus étendus du monde, qui sont la principale source de production d’énergie solaire.
-/-Or et diamants
Le continent africain possède également 95 % des réserves mondiales de diamants et produit la moitié de la production mondiale de ce métal précieux.
Il produit également 70% de la production mondiale d’or, 33% de cuivre et 76% de cobalt, alors qu’il possède 90% des réserves mondiales de platine et produit environ 7,75% de ce métal.
L’Afrique produit également 9% de la production mondiale de fer, et ses réserves de minerai, en plus du manganèse, du phosphate et de l’uranium, varient de 15 à 30% des réserves mondiales totales de ces minéraux et ressources naturelles.
Selon les attentes des institutions internationales, ces taux et tarifs sont susceptibles d’augmenter, étant donné que de nombreuses parties du continent n’étaient pas couvertes par des études géologiques.
Des études et des recherches scientifiques spécialisées ont révélé que ces parties contiennent une composition géologique d’anciennes roches cristallines et métamorphiques, qui sont les plus roches qui contiennent dans leur composition des pourcentages élevés de divers minéraux.
Par conséquent, on peut dire que l’Afrique sera la principale ressource pour l’industrie dans le monde à l’avenir, et selon les attentes des institutions internationales, le continent a besoin d’environ 100 milliards de dollars par an pour répondre à ses plans d’investissement dans les infrastructures, en plus des facteur de croissance démographique, qui a dépassé 1,3 milliard.
-/-Les grandes ambitions turques
L’immense richesse de l’Afrique en fait l’avenir de l’énergie mondiale, le centre de la lutte internationale pour le pouvoir et le centre des ambitions notamment de la Turquie, qui cherche un terrain fertile pour son obsession de l’expansion et du contrôle de la richesse mondiale.
Un continent riche qui a été pillé par ses colonisateurs à travers les âges, avant qu’Ankara ne braque sa boussole dans sa direction et n’en fasse le cœur de ses nouveaux plans coloniaux, par avidité aux énormes ressources minérales et naturelles gisant tant à la surface qu’au fond de ses territoires.
Remarque : la déflation est devenue une alliée de l’économie turque en mai dernier, pour le deuxième mois consécutif, portée par deux coups qu’elle a subis, le premier lié aux conséquences économiques négatives de l’épidémie du virus Corona, et le second lié au fort déclin de la monnaie et son impact sur la production.
Les dernières données de l’Autorité turque des statistiques, publiées au cours du mois de juillet 2022, indiquent que la production industrielle turque en mai dernier a diminué de 19,9 % sur une base annuelle, par rapport à la période correspondante de l’année dernière 2019.
-/-Erdogan et le plan d’intrusion et d’attrition
Quand la Turquie se met en tête l’Afrique et ses richesses
Il est évident que les statistiques officielles sur la richesse de l’Afrique fassent saliver le président turc Recep Tayyip Erdogan à tel point qu’il soit incité à planifier de s’accaparer des trésors enfouis et apparents du continent.
Ce n’est donc pas un simple hasard que la Turquie ait déclaré 2005 « l’Année de l’Afrique ». En revanche, l’Union africaine, en 2008, a déclaré la Turquie partenaire stratégique. La même année, le premier sommet de coopération entre la Turquie et l’Afrique s’est tenu à Istanbul avec la participation de 49 pays africains.
Le sommet visait à faire le point sur l’état d’avancement des relations entre Ankara et les pays du continent brun, et à proposer des pistes pour les renforcer, afin que le continent tombe dans le grand piège de drainer ses richesses sous une couverture officielle.
C’est dans ce contexte que la Turquie est devenue membre de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest « CEDEAO », ainsi que de la Communauté de l’Afrique de l’Est, et en 2008, la demande d’adhésion d’Ankara à la Banque africaine et au Fonds africain de développement a été approuvée.
Aujourd’hui comme hier, l’Afrique est traversée par des dynamiques socioculturelles, économiques et politiques qui contribuent à façonner durablement son historicité et son inscription dans les phénomènes dits globalisés. Il en est ainsi du terrorisme à grande échelle, qui sévit plus que jamais et avec la plus grande acuité en Afrique.
L’enjeu s’incarne dans le cas de la concurrence et du conflit entre les grandes puissances internationales de la région du Sahel et du Sahara, notamment entre les Etats-Unis d’Amérique et l’Europe d’une part, et la Russie et la Chine d’autre part, sur les ressources des pays et l’influence.
Le défi se reflète dans les transformations du terrorisme mondial et sa capacité à s’adapter et à évoluer constamment, ce qui apparaît dans sa focalisation croissante sur les activités cyber, l’utilisation des médias sociaux et des plateformes numériques pour la mobilisation et le recrutement, ainsi que l’utilisation des monnaies numériques pour obtenir des financements, car il utilise des moyens techniques de pointe en préparation. Et la mise en œuvre de ses plans, tels que les drones pour la reconnaissance et la surveillance, des transformations qui ont fait dire à certains : Daech a établi un « califat virtuel » après avoir perdu son réel califat en Irak et en Syrie.
Ce que beaucoup ne savent peut-être pas, c’est que les pays africains possèdent une part importante des réserves mondiales de ressources naturelles, ce qui représente en soi une source d’espoir pour l’avenir du continent.
Plusieurs de ces pays comptent actuellement parmi les économies les plus dynamiques au monde, avec une croissance alimentée, dans plusieurs cas, par les nouvelles et importantes découvertes de réserves de pétrole, de gaz naturel et de nombreux minerais stratégiques.
Néanmoins, sur le continent africain, l’extrême pauvreté est en recul et la progression vers les objectifs du Millénaire pour le développement s’est accélérée. Plusieurs d’entre eux ont dernièrement considérablement réduit les inégalités de revenus.
Pourtant, des millions d’Africaines et d’Africains ne bénéficient pas encore de la croissance impressionnante que connaît le continent.
A noter qu’un tiers des personnes les plus pauvres de la planète vivent en Afrique subsaharienne, laquelle compte six des dix pays les plus inégalitaires au monde. Là où les inégalités de revenus sont importantes, les bienfaits de la croissance économique demeurent inaccessibles aux couches pauvres de la population. La pauvreté et l’exclusion nuisent à la stabilité sociale, entravant la productivité des investissements et jusqu’à la croissance même.
Le potentiel du continent est en outre affaibli par l’hémorragie de capitaux – souvent due à l’évasion fiscale et la manipulation des prix de transfert par les sociétés pétrolières, gazières et minières, et ce avec la complicité de fonctionnaires corrompus. Il est grand temps de changer la donne pour les populations pauvres d’Afrique, de leur accorder plus d’équité pour que les ressources de l’Afrique bénéficient à tous ses habitants, sans être spoliés par certaines grandes puissances.
L’urgence et la prise de conscience des décideurs des pays touchés par le terrorisme en Afrique centrale et de l’Ouest ont conduit ces derniers à prendre des mesures fortes pour combattre et enrayer ce qui apparaît désormais non plus seulement comme une menace sécuritaire, mais bien plus comme une tentative de bouleversement de tout un système politique.
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