Anouar CHENNOUFI
Africa-Press – Burundi. La « Politique et les Intérêts » ont toujours été liés dans le cadre du maintien d’une influence quelconque, notamment quelque part sur le globe. Que ce soit à l’Ouest ou à l’Est, cela a toujours été la même chose.
C’est pourquoi nous avons jugé utile de revenir sur le cas de la France en Afrique, après l’élection d’Emmanuel Macron pour un second mandat présidentiel, lequel a été plus ou moins « secoué » par le pourcentage obtenu par sa concurrente directe « Marine Le Pen », au premier comme au second tour.
Mais ceci est aujourd’hui une page tournée, entre le président de la République et la présidente du Front National, et nous avons remarqué, lors du dernier débat entre les deux, le 20 avril dernier, que la question africaine avait nettement reculé dans ce débat, et avait régressé dans un nombre limité de dossiers dominés par la coopération militaire avec les pays du continent. Cela a renforcé les attentes de la poursuite de l’approche française traditionnelle de l’Afrique en tant que zone d’influence, plus que la prise en compte des intérêts des pays africains et des menaces réelles qui les entourent.
A noter que le président français s’est engagé à mettre en place une « Union francophone », sans fournir aucun détail expliquant la nature de cette union, ses objectifs et la dynamique de son travail, en plus d’une « réforme radicale des politiques françaises d’immigration ».
Lors de leur campagne électorale, les principaux candidats se sont mis d’accord que la présence militaire française devait se poursuivre en Afrique francophone, et que l’échec à y parvenir signifie un nouveau déclin de l’influence française dans le monde.
En dehors de l’aspect militaire et sécuritaire, Macron avait promis – s’il est réélu – de mettre en œuvre la feuille de route du dernier sommet Europe-Afrique qui s’est tenu après la mi-février, et après la clôture du Sommet annuel de l’Union africaine, dans une indication importante du timing et de la connexion Europe-Afrique.
Une idée sur les dossiers africains les plus importants auquel pense le président :
• Présence militaire et sécuritaire
L’armée française en Afrique
Malgré les changements dans le discours du président français Emmanuel Macron concernant les questions africaines ces derniers mois, du point de vue la nécessité de replacer les questions du terrorisme et de la violence armée dans leurs contextes sociétaux, la nécessité d’adopter des approches globales de ces questions, et de donner la priorité aux efforts de développement et à la bonne gouvernance dans la liste des outils de confrontation, il n’est pas prévu que Paris modifie son approche de la sécurité en premier lieu et ne recycle cette approche qu’en fonction des exigences de l’étape suivante.
Rappelons que la France et ses alliés européens avaient annoncé le 17 février dernier qu’ils allaient entamer le retrait de leurs forces du Mali, après près de neuf ans de confrontation avec des groupes terroristes armés.
Cette décision est intervenue après que Paris ait rompu ses relations avec la junte militaire au pouvoir au Mali et que le sentiment anti-français s’y est accumulé, en particulier après le coup d’État de mai 2021, et dans ce contexte, le voisin du Mali, à savoir le Niger, a salué le projet de la France de redéployer ses forces sur son territoire, mais d’autres pays comme le Burkina Faso et la Guinée seraient actuellement en train d’évaluer leurs relations avec la France.
Ainsi, on s’attend à ce que l’attention du président Macron se porte sur la poursuite de ses efforts pour se débarrasser des conséquences à long terme de la colonisation française du continent, de l’élargissement de l’Union francophone, de la résolution des crises humanitaires et économiques causées par le Covid-19, et la mise en œuvre de la feuille de route du Sommet Afrique-Europe 2022.
Il ne faut pas oublier que le rôle militaire français en Afrique est un outil important pour les politiques de l’Union européenne en général sur le continent africain. La plupart des pays européens ne sont pas intervenus militairement depuis de nombreuses années, et la dernière exception à cette règle a peut-être été l’intervention britannique en Sierra Leone en 2000.
Quant à la Grande-Bretagne, elle a conservé un rôle militaire important dans quelques pays africains par rapport à la France, et son rôle dans la guerre contre le terrorisme dans la région du Sahel s’est limité à soutenir les forces françaises avec trois hélicoptères Chinook depuis 2018.
• Restauration de la place de la France en Afrique
La France reste l’un des partenaires économiques les plus importants de l’Afrique et se classe au deuxième rang des partenaires européens de l’Afrique. Outre le commerce, les entreprises françaises contribuent à cette croissance par leurs investissements et la création de valeur ajoutée sur le continent.
Toutefois, tout le monde est conscient que la position africaine de la France a fortement décliné ces dernières années, aux niveaux populaire et officiel, et une opinion publique africaine s’est développée selon laquelle l’ordre mondial s’est longtemps opposé à l’Afrique et aux Africains, et que les pays occidentaux, avec la France en tête, les ont à nouveau ignorés dans leur réponses au Covid-19, alors que la Chine et la Russie ont fourni à certains dirigeants africains ce dont ils avaient besoins pour leur pays comme investissements et sécurité, et ce, sans conditionnalités préalables.
La France notamment fait face à de vives critiques en Afrique de l’Ouest, sur fond de campagnes pour affronter le terrorisme, et il y aurait de nombreuses accusations selon lesquelles la France s’orientait vers un « néo-colonialisme » plutôt que d’être une force de soutien pour les gouvernements africains dans leur guerre contre le terrorisme.
La position de la France en Afrique est menacée également par de réelles craintes que si la France ne parvenait pas à faire face à la crise sécuritaire en Afrique subsaharienne, l’explosion démographique dans cette région poussera certainement les immigrés jusqu’aux portes de la France.
Certains experts notent que la France a gagné toutes ses batailles dans la guerre contre le terrorisme dans la région du Sahel depuis l’opération Serval (2013), mais qu’elle a finalement perdu la guerre.
Son image et celle de son armée dans la région du Sahel et en Afrique ont été gravement endommagées, du fait que cette guerre a occasionné de lourdes pertes, avec le déplacement de plus de deux millions d’Africains, la mort de dizaines de milliers d’hommes et de civils armés, et la montée en puissance des groupes armés, contrairement aux objectifs des opérations militaires françaises successives.
Cette apparente défaite française incarnait l’adoption par les politiciens ouest-africains en général de leurs « références anti-françaises » pour courtiser les électeurs, mais – en somme – la défaite de l’armée française dans la région ne signifie pas une véritable défaite pour la fin de ses opérations militaires avec le redéploiement de toutes les forces retirées du Mali vers les pays voisins.
La détérioration des relations françaises avec les pays du Sahel qui ont connu des coups d’État récemment, notamment au Mali, où l’hostilité contre la France s’est intensifiée après le coup d’État d’août 2020 et s’est aggravée après le coup d’État de mai 2021, a incité la France à annoncer son intention de retirer ses forces du Mali. Cette réalité impose aujourd’hui de lourdes responsabilités devant le président français.
• La menace grandissante de l’influence russe en Afrique
Poutine lors du Congrès Russo-africain
La position de la France en Afrique est menacée par la montée de l’influence russe dans de nombreux domaines d’influence française traditionnelle ou non. Comme le Mali, la République centrafricaine, le Tchad, le Mozambique, le Cameroun et la Guinée, en plus de la situation complexe en Libye. Au Mali en particulier, le retrait par la France d’environ 2 500 soldats du pays a coïncidé avec une entrée significative des mercenaires du groupe privé russe Wagner pour soutenir les efforts du Conseil militaire malien face au terrorisme et à la violence armée.
La liste des dossiers africains les plus importants devant le président français reste la même jusqu’à ce que leurs priorités soient établies.
Une approche légèrement différente de la situation précédente est prévue en termes de progrès plus sérieux vers la compréhension des besoins et des préoccupations des partenaires africains, de manière réaliste, et en activant les plans français de soutien à un certain nombre de pays africains parmi les plus pauvres, et ce en complément des modifications apportées ces derniers mois aux mécanismes de l’aide française à l’Afrique, et adopter une politique plus réactive aux défis auxquels sont confrontés les pays africains, surtout dans le domaine du terrorisme et de la violence armée, et en activant un rôle plus important pour les services de renseignement français afin d’éviter ou de surveiller davantage de changements politiques sur le continent africain dans la période à venir.
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