Africa-Press – Burundi. Au Sénégal, pays qui importe la moitié de son blé de Russie, une question occupe actuellement les consommateurs : quel sera le prix du pain ? Depuis plusieurs années, le gouvernement a plafonné le prix de la baguette, qui est actuellement de 175 francs CFA (0,27 euro), mais, d’après le président de la Fédération des boulangers du Sénégal, Amadou Gaye, il pourrait atteindre 500 francs CFA (0,84 dollar) si la guerre en Ukraine venait à perdurer.
Des répercussions déjà visibles sur les marchés
La question ne se pose plus au Cameroun, la hausse du prix de la baguette de pain de 200 grammes – la plus consommée – étant déjà une réalité. En quelques jours, son prix est passé de 125 à 150 francs CFA (environ 0,23 euro). Le prix du sac de farine de 50 kg sur le marché local est déjà en hausse de 5 000 francs CFA (environ 7,62 euros). Ces hausses ont fait l’objet d’un consensus entre les parties prenantes aux négociations et le président Paul Biya a également donné son accord. Le pays d’Afrique centrale importe 35 % de son blé de la Russie.
À l’heure où le conflit entre la Russie et l’Ukraine s’intensifie, les prix des denrées alimentaires montent en flèche sur le marché international. Si le conflit Russie-Ukraine ne cesse pas, une crise en matière d’approvisionnement alimentaire dans plusieurs régions du monde sera dévastatrice, avertissent de nombreux analystes qui soulignent que les pays africains seront parmi les plus gravement affectés. Signes avant-coureurs de ces menaces sur l’économie mondiale : début mars, les prix du blé ont augmenté de plus de 40 %, ceux du maïs d’environ 30 % et ceux du soja de plus de 25 %.
Cette flambée des prix provient notamment de la décision prise le 9 mars par le gouvernement ukrainien d’interdire les exportations de blé, d’avoine et d’autres cultures de base en vue de protéger le marché national. Dans le même temps, l’escalade des sanctions imposées à la Russie par les pays occidentaux fait peur à de nombreux acheteurs de produits russes, là où les banques hésitent à financer le commerce des produits russes.
Les deux pays produisent à eux deux plus d’un quart des exportations mondiales de blé et les Nations unies ont prévenu que le coût déjà élevé des denrées alimentaires pourrait encore augmenter de 22 % si les combats paralysent le commerce et réduisent la prochaine production.
Les risques sont particulièrement élevés en Afrique qui a importé à elle seule 6,9 milliards de dollars de produits agricoles des deux pays en 2020 et où, selon le président de la Banque africaine de développement, Akinwumi Adesina, quelque 283 millions de personnes souffraient déjà de la faim avant le début de la guerre.
Comment se passer du blé russe ?
Pour l’institution de financement panafricaine, qui vient de clôturer un forum d’investissement pour lever des fonds, le salut de l’Afrique viendra de sa capacité à assurer sa souveraineté alimentaire. Mobilisée depuis deux ans déjà pour contrecarrer les effets de la pandémie de Covid-19, la BAD a décidé de mettre en place un plan accéléré d’un milliard de dollars pour stimuler la production de blé en Afrique afin de limiter les pénuries alimentaires.
Dans les grandes lignes, il s’agit d’augmenter la production de blé, de riz, de soja et d’autres cultures pour nourrir environ 200 millions d’Africains. Comment cela va-t-il se faire ? Concrètement, la BAD est en train de lever des fonds pour aider 40 millions d’agriculteurs à « utiliser des technologies résistantes au climat et augmenter leur production de variétés de blé tolérantes à la chaleur ».
Revitaliser les secteurs alimentaires grâce à l’AgriTech
Pour réussir son pari, la banque panafricaine prend exemple sur l’Éthiopie où de nouvelles méthodes ont déjà permis au pays d’augmenter sa production de blé. Le pays espère désormais être autosuffisant en matière d’approvisionnement en céréales d’ici trois ans, selon le président Adesina. L’excédent de production pourrait alors être exporté vers des pays comme l’Égypte, premier importateur mondial de blé, a-t-il ajouté.
Une réunion des ministres des Finances et de l’Agriculture du continent devrait se tenir pour discuter de la meilleure façon de financer ce plan. « Nous allons redoubler d’efforts pour mobiliser cet argent », a affirmé Akinwumi Adesina. « S’il y a un moment où nous devons vraiment augmenter de façon drastique la production alimentaire en Afrique, pour la sécurité alimentaire de l’Afrique et pour atténuer l’impact de cette crise alimentaire découlant de cette guerre, c’est maintenant. »
L’agriculture est un pilier de l’économie africaine, contribuant à 23 % du PIB et à 49 % des emplois. Mais la pandémie de Covid-19 a mis à rude épreuve les systèmes alimentaires et les économies africaines en général. Un rapport de l’ONG américaine Heifer International publié en août 2021 souligne la nécessité d’investissements plus importants pour stimuler l’accès aux innovations afin d’encourager les Africains, et plus particulièrement les jeunes à adopter l’agriculture.
L’enquête de Heifer International a révélé que de nombreux entrepreneurs développent déjà des outils et des services agrotechnologiques utiles pour les petits et moyens exploitants du continent. Ils utilisent l’intelligence artificielle, la télédétection, les logiciels d’information géographique, la réalité virtuelle, les drones, les interfaces de programmation d’applications et d’autres technologies pour stimuler la productivité et les bénéfices agricoles. Les start-up de l’AgriTech ont levé 60 millions de dollars en 2020, ce qui représente 8,6 % du financement total obtenu par les start-up technologiques sur le continent l’année dernière, selon Disrupt Africa, un site Web qui fournit des données sur le financement des start-up.
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