MID : Ils attendent toujours sa plus-value…

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MID : Ils attendent toujours sa plus-value…
MID : Ils attendent toujours sa plus-value…

Africa-Press – Burundi. Officiellement opérationnel depuis le 4 mai, hommes d’affaires, sociétés spécialisées dans l’importation assurent n’avoir pas encore remarqué l’effet positif induit par ce Marché Interbancaire des Devises (MID). Au contraire, selon plusieurs d’entre eux, il mettrait à mal leurs activités économiques.

L’espoir suscité par la mise en place et opérationnalisation du MID n’aura duré le temps de la rosée. A l’instar d’une loterie où c’est une course contre la montre pour tirer le gros lot. Après que la banque centrale ait annoncé son opérationnalisation, commerçants, hommes d’affaires, sociétés spécialisées dans l’import-export se sont précipitées pour déposer au sein de leurs banques respectives leurs licences d’importation. Sans doute, se disaient-ils dans leur for intérieur, une occasion à ne pas rater, surtout que parmi les objectifs principaux de ce MID figurent la résorption de la crise liée à la pénurie des devises. Néanmoins, des espoirs vite douchés. En effet, selon les témoignages de certains agents des banques commerciales, les premiers bénéficiaires à peine servis. Quelques jours après l’entrée vigueur de la circulaire l’instituant, la situation s’est de nouveau corsée.

Au moment où nous mettons sous presse, une source au sein de la BRB, soutient qu’aucune banque commerciale serait à mesure de servir 50.000 USD à cinq clients. « Certes, grâce des tours de passe-passe, arrangements, un ou deux clients parce qu’ils sont bien placés, peuvent avoir jusqu’à 15 mille USD. Mais ceux qui viennent après lui, ne reçoivent rien », confie -t-il. On ne donne que ce que l’on a, dit l’adage. En lançant ce MID, l’objectif de la BRB était de mettre fin à ses interventions directes dans l’allocation de devises et aux lettres de confort, exception faite provisoirement pour les produits pétroliers. Et ainsi, permettre à tout agent économique d’avoir accès aux devises de façon transparente, tout en veillant à la stabilité du marché de change. Depuis son opérationnalisation, la situation est telle que, nombreux hommes d’affaires qui n’ont plus foi en lui.

Motif : ces derniers seraient agacés parce que dorénavant contraints « de courber l’échine » en attendant qu’une bienveillante banque vient à leur rescousse.

« Pourquoi faire la manche alors que nous sommes dans nos droits. C’est notre argent. Si elles ne sont pas à mesure de nous servir que la BRB arrête de nous mettre les bâtons dans les roues et nous laisse nous débrouiller comme nous en avions l’habitude », peste un commerçant. Allusion faite au corollaire de cette mesure les empêchant de s’approvisionner en devises sur le marché parallèle.

Ils ne savent pas à quel saint se vouer

Importateur des ustensiles de cuisine en Egypte, cet homme d’affaires, n’en démord pas :« En plus du retard de livraison, du manque à gagner, il nous est désormais impossible de faire des prévisions budgétaires sur le long terme. Et si par malheur ton comptable est de mauvaise foi. C’est une banqueroute assurée ».

Il fait savoir qu’en janvier 202, avec 300 millions de BIF, il pouvait rassembler facilement 100.000 USD sur le marché noir en moins d’une semaine. Depuis les récentes mesures de la BRB, voilà qu’il vient de passer plus d’un mois à chercher juste 70.000 USD pour passer une commande, en vain. De quoi s’interroger sur l’utilité de ce MID si leurs banques ne sont pas à mesure de leur octroyer 10.000 USD.

Au risque de voir ses marchandises périr dans les stocks, se voir infligé des amendes de pénalités, en plus du manque dû au retard de livraison, il confie qu’ils sont dans l’obligation de contourner ce MID. « Le seul recours, c’est de se rabattre sur le marché parallèle. Mais quel bureau de change ou cambiste acceptera de t’octroyer les devises sachant qu’il peut être emprisonné ? » Aussitôt de poursuivre : « S’il le fait, sache qu’il fait à ses grands risques et périls. Ce, au prix fort ! Pour nous, commerçants, nous n’avons qu’à se soumettre à leurs exigences ».

Dans pareils cas, laisse-t-il entendre lorsque vous n’êtes pas certain de rassembler la quantité des devises nécessaire en temps voulu, vous comprenez que c’est toute la chaîne de vente qui est mise à mal. Il explique que si au cours d’un trimestre, il pouvait s’approvisionner deux fois, dorénavant, il se bat juste pour le faire une fois. Avant d’ajouter : « Et si l’on y incorpore les différentes taxes de l’OBR et impôts, etc. Difficile de ne pas travailler à perte. L’on se bat juste pour garder nos emplois ».

Avec l’entrée en vigueur des récentes mesures de la BRB, il confie avoir déjà perdu plus de 15 mille USD.

Personne n’est épargné

Même rengaine du côté des sociétés importatrices. « Un casse-tête,

Surtout que nos prévisions sont faites sur un taux de change moyen de la BRB », déplore G.F, un responsable d’une pharmacie de gros. Face à cette situation, il indique qu’ils sont également contraints de s’approvisionner sur le marché noir. Un manque à gagner énorme surtout lorsque nous sommes contraints de payer nos fournisseurs le double de la facture initiale suite à la rareté des devises.

Comme conséquence, ce sont les patients qui en font les frais pour compenser cet écart. « Nous sommes contraints de hausser le prix des médicaments pour ne pas mettre la clé sous le paillasson, ainsi garder certains emplois ». A la question de savoir si leurs banques acceptent de faire les transferts pour payer leurs fournisseurs. Ce, en dépit des récentes mesures de la BRB les obligeant de déclarer la provenance des devises, avec un brin d’humour, il répond : « Après tout, nous sommes des clients solvables. On essaie de trouver des arrangements ».

Les commerçants transfrontaliers ne sont pas en reste. En plus de l’absence de l’effet induit du MID, ils disent être confrontés à la volatilité du franc burundais par rapport aux monnaies de la sous-région. Presque équivalentes en mars dernier, Benoît Bigirimana, représentant l’Association des Commerçants du Burundi (ACOBU) dans la province Makamba, confie qu’actuellement pour avoir 100.000 shillings tanzaniens, ils doivent débourser 175000BIF. Une situation partie pour durer si rien n’est fait. Plus affligeant, glisse cet homme d’affaires, dans la mesure où c’est la population qui se voit obligée de payer les pots cassés pour éviter de vendre à perte.

M.Bigirimana demande au gouvernement de tenir parole. « Si réellement ce MID vient pour résorber la crise liée à la pénurie des devises, au gouvernement d’activer tous les leviers pour permettre que ce MID soit fonctionnel. A défaut qu’elle nous laisse se débrouiller comme nous en avions l’habitude ».

Contactée, la BRB a promis de s’exprimer ultérieurement.

« La BRB a intérêt à revoir au plus vite sa stratégie »

Pour que le MID ait son effet escompté, sous anonymat un expert-économiste, soutient que la BRB doit rectifier son tir. « Ce sont les contraintes fixées par la BRB qui accentuent la spéculation sur le marché noir des devises », analyse-t-il d’entrée de jeu. Rappelant qu’avant la mise en place du MID, le FMI venait d’octroyer une ligne de crédit au Burundi. L’économiste estime qu’avec cette ligne de crédit, la BRB devrait officiellement annoncer qu’elle a déjà entamée systématiquement le processus de dévaluation du BIF. « Je sais que je risque de m’attirer les foudres du gouvernement burundais, mais c’est le seul moyen pour résoudre le problème de devises au Burundi. C’est cela la redevabilité ». L’objectif de la BRB étant de libéraliser le marché des devises via ce fameux MID tout en simplifiant les conditions d’accès aux devises pour les banques commerciales et les bureaux de change. Malheureusement, selon lui, ce qui n’est pas présentement le cas, suite aux mesures fixées par la BRB. « La BRB doit juste réguler et superviser ce marché MID ». Pour cela, il estime qu’au lieu d’utiliser la ligne de crédit octroyée par le FMI pour vendre aux enchères les devises sur le marché MID, les autorités devraient être pragmatiques et l’investir à des fins capables de générer en retour des devises. « Quand bien même, ce serait pour le long terme », insiste-t-il. Il cite, notamment la construction d’une raffinerie de coltan et or. Ainsi, voir le Burundi être à mesure de vendre lui-même sur le marché international les matières premières. Comme conséquences, il ne doute pas que d’ici 5 ou 7ans, le Burundi aurait de sources de devises pouvant être à mesure de rééquilibrer le marché de change, car l’offre de devises sera suffisante.

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