Africa-Press – Burundi. D’aucuns disent que l’enseignement supérieur au Burundi a été pendant longtemps le privilège de quelques-uns. En pleine guerre civile, quand le pays était obnubilé par une crise socio-politique, une alternative à la culture de violence et de conflit est née, et avec elle, la naissance de l’Université de Ngozi. Cet ancien étudiant de cette Université décrypte les innovations apportées par cette institution à la veille de l’ouverture du jubilé d’argent de cette institution.
Il y a seulement 25 ans, l’enseignement supérieur était assuré par l’unique université publique du Burundi. Personne n’aurait jamais imaginé qu’il pourrait y avoir une autre voie de faire autrement l’université. C’était en 1999 en pleine guerre civile que s’est concrétisé un projet communautaire dans lequel est issu la première université privée, dont le but était de développer les communautés locales et l’enseignement supérieur au Burundi.
Il fallait du courage exceptionnel pour prouver qu’il était possible de faire l’enseignement supérieur autrement. D’abord, une université où on paie un minerval alors qu’on était habitué à une bourse et ensuite, une université ouverte à tous, peu importe la nationalité, l’ethnie, la province et la culture.
En fait, l’Université de Ngozi, dès ses premières années académiques, est devenue une mosaïque de cultures et de nationalités et, avec grande surprise, me disait le Président Fondateur de cette institution académique, les premières inscriptions voyaient sur les listes des étudiants issus de toutes les provinces du Burundi. C’était la confirmation que la jeunesse burundaise a vu ses rêves réalisés.
« L’école, … une question de vie ou de mort »Comme me disait Mgr Kaburungu, Evêque Emérite du Diocèse de Ngozi et mobilisateur/encadreur des fondateurs de l’Université de Ngozi, s’il n’y avait eu de rigueur intellectuelle de la part des Pères Blancs (Missionnaires d’Afrique), qui étaient leurs formateurs dès leur jeune âge, pas mal des jeunes burundais seraient restés derrière les chèvres et les moutons de leurs familles.
Dans la revue Entre nous, fondée par Mgr Grauls, apparaît une note envoyée à tous les missionnaires au Burundi le 15 mai 1942 qui montre l’atmosphère intellectuelle dans laquelle ont grandi les jeunes de l’époque des missionnaires. Cette note stipule : « l’Ecole est pour toutes les causes qui veulent durer, une question de vie ou de mort. » Pourquoi ne pas partager aux jeunes générations le lait (l’école) qui nous a fait grandir ?
L’idée de la fondation de l’Université de Ngozi pris forme exactement le 12 septembre 1998, à la célébration du jubilé de 75 ans de la Paroisse Busiga. Les intellectuels présents à cette célébration ont dit ne pas être satisfaits des bienfaits déjà reçus à travers la paroisse de Busiga (première du Diocèse de Ngozi), tant que le Diocèse n’avait pas encore franchi ce pas de création d’une université. Ce fut le commencement des réunions de ces intellectuels, autour de la personne de Mgr Stanislas Kaburungu, alors Evêque de Ngozi. L’aboutissement de ces soirées de réflexions et d’échanges fut l’ouverture des portes de cette institution d’enseignement supérieur, le 11 octobre 1999.
Une révolution culturelle surprenanteLa guerre civile fratricide que traversait le Burundi n’avait pas épargné la seule université publique d’alors, ce qui a perturbé la formation des étudiants. Cela a fait d’ailleurs que les premières promotions de l’Université de Ngozi voyaient dans leurs rangs des étudiants qui avaient abandonné leurs études à l’Université du Burundi, suite à la violence meurtrière et au climat de peur de ces périodes sombres de la crise. Ainsi, l’Université de Ngozi est venue comme une alternative durable et intéressante non seulement par rapport à la violence qui sévissait au Burundi, mais aussi à la situation socio-politique désastreuse.
Etoile qui scintille au-dessus de la sous-régionAvec sa devise : « Paix, Science et Développement », l’Université de Ngozi brille par ses lauréats qui marquent une très grande visibilité dans le pays et dans la sous-région sur le marché du travail, mais aussi par l’éducation à la paix reçue. Avec ses laboratoires modernes et ses espaces de développement personnels tels que l’American Corner Ngozi et l’Ideas Box (Bibliothèques sans frontières promouvant la mobilité et l’employabilité des jeunes), l’université stimule les jeunes à la créativité et leur offre la capacité de développer la compréhension des défis de nos sociétés. Comme disait Louis Jouvet, « la création artistique est une de ces ruches où l’on transforme le miel visible pour en faire de l’invisible ». L’université de Ngozi permet aux étudiants de différentes nationalités, à travers la formation culturelle et artistique d’entrer dans le regard de l’autre et à prendre du recul sur les questions identitaires qui divisent nos sociétés.
Ce pas, qui venait d’être franchi par l’université de Ngozi, a permis que d’autres universités ouvrent leurs portes : l’Université de Bururi en 2000 à Kiremba Sud, l’Université Lumière de Bujumbura, l’université de Mwaro, l’université du Lac Tanganyika, etc.
Ayant ouvert ses portes avec un peu plus de 400 étudiants, cette université compte aujourd’hui plus de 2000 étudiants, avec plus de 4000 lauréats.
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