Quand la raison courbe l’échine devant la croyance

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Quand la raison courbe l’échine devant la croyance
Quand la raison courbe l’échine devant la croyance

Africa-Press – Burundi. Le chef de l’Etat a fait savoir que la Vision Burundi pays émergent en 2040 et pays développé en 2060 est un plan conçu par Dieu lui-même et que ce même Dieu s’est choisi le groupe des Bagumyabanga pour faire du Burundi un pays du lait et du miel », a posté la Radio-Télévision nationale du Burundi (RTNB) sur X, le premier jour d’une croisade de prière d’action de grâce du parti CNDD-FDD organisée du 25 janvier au 27 janvier 2024, en province de Gitega.

Le nom du « concepteur » est communiqué au public, neuf mois après la tenue de la 2e édition du Forum national sur le développement du Burundi sous le thème : « Vision Burundi pays émergent en 2040 et pays développé en 2060 ». Pour assurer la perennité de la vision, le pouvoir aurait dû mener avant des consultations avec son opposition et les forces vives de la Nation pour un débat national sur le développement, tendant ainsi la main aux compétences les plus éloignées géographiquement et politiquement. Ce qui aurait impliqué un processus de paix déjà bien entamé. Ainsi, du choc des idées aurait jailli non un énième plan de développement estampillé CNDD-FDD mais un véritable modèle de développement pour le Burundi.

Une annonce in tempore suspecto… Le nom du maître d’oeuvre chargé par le maître d’ouvrage de le réaliser tombe à onze mois avant d’entrer dans la dernière ligne droite de la période préelectorale. Que les adversaires politiques du parti de l’Aigle se le tiennent pour dit : nourrir des ambitions à hauteur d’opposants, lors de la prochaine course électorale. Que l’homme ne conteste pas celui que « Dieu a choisi » pour exécuter « sa » Vision Burundi pays émergent en 2040 et pays développé en 2060.

La divinité qui la concevrait pour sortir 75% de la population burundaise de l’extrême pauvreté et remettre le Burundi sur les rails de la relance économique ne serait pas l’Alpha et l’Oméga que rapporte Saint Jean dans L’Apocalypse. Ce serait un Dieu planificateur, pourvoyeur de solutions aux problèmes des mortels. C’est réduire le Dieu d’Abraham, Isaac et de Jacob à la taille humaine, le concepteur et les exécutants travaillant main dans la main. L’idée d’un tel Dieu est destructrice de l’idée d’un Dieu omniscient et omnipotent. Car il s’agit de le soumettre à l’évaluation humaine.

La grandeur de celui que Jésus de Nazareth appelait « Père » ne se manifesterait pas dans la pertinence de la Vision Burundi pays émergent en 2040 et pays développé en 2060, mais plutôt dans la raison, l’intelligence émotionnelle et la disposition au bien inscrites dans l’être humain qui lui permettraient de reconnaître la mélodie de sa perfection. Et la grandeur de l’Homme réside non seulement dans la réussite d’une tâche par une utilisation ingénieuse des moyens à disposition mais aussi dans sa capacité à s’orienter par sa propre loi dans son existence.

En matière de développement, la croyance courbe l’échine devant la raison. Tel n’est pas présentement le cas. Mais lorsqu’on peine à proposer une solution qui n’habite pas le monde où vivent les croyances, convoquer Dieu est un argument d’autorité devant lequel chacun est convié à s’incliner. C’est le corollaire de la construction symbolique d’un instrument de légitimation du pouvoir. D’une stratégie de la diversion, la rhétorique religieuse qui cache mal l’impuissance politique monte en puissance.

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