Alzheimer, Parkinson : quand la réalité virtuelle permet de diagnostiquer la maladie plus tôt

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Alzheimer, Parkinson : quand la réalité virtuelle permet de diagnostiquer la maladie plus tôt
Alzheimer, Parkinson : quand la réalité virtuelle permet de diagnostiquer la maladie plus tôt

Africa-Press – Burundi. En France, près d’1,5 million de personnes sont directement concernées par les maladies neurodégénératives non rares, telles que Parkinson, Alzheimer et les pathologies apparentées, selon le ministère de la Santé. Ces maladies, qui touchent principalement les personnes âgées, nécessitent une prise en charge précoce, car les symptômes surviennent lorsque le cerveau est déjà affecté par la perte neuronale.

Détecter les tout premiers signes d’une maladie neurodégénérative

L’Université de Caen s’est ainsi lancée sur la piste de la détection des signes avant-coureurs de ces maladies neurodégénératives, grâce à la réalité virtuelle. Pour ce faire, elle a mis à disposition de l’équipe de neuroscientifiques de l’université une salle de réalité virtuelle, le Cireve (le Centre Interdisciplinaire de Réalité Virtuelle), installé depuis 2006 initialement pour un projet de reconstitution de la ville de Rome.

C’est ainsi qu’est né en 2019 le programme de recherche Presage. Celui-ci vise tout particulièrement à améliorer notre compréhension du syndrome du risque cognitivo-moteur, un état de transition entre le vieillissement “normal” et le trouble cognitif léger. Ce syndrome est donc le premier stade d’évolution vers une maladie neurodégénérative.

En se basant sur des environnements créés par la réalité virtuelle, les chercheurs peuvent repérer des signes précurseurs de l’évolution de la maladie chez les personnes atteintes du syndrome. Ce qui permettrait d’initier une prise en charge individualisée à un stade précoce.

Le syndrome du risque cognitivo-moteur, un état de transition préoccupant

La prévalence moyenne du syndrome du risque cognitivo-moteur dans le monde est de 9,7 %, et, est estimée à 16% en France, selon une étude publiée dans la revue The Lancet. Il se caractérise par la présence conjointe d’une plainte cognitive subjective (lire l’encadré ci-dessous) et d’une vitesse de marche ralentie, en l’absence d’altérations cognitives et fonctionnelles avérées, selon une étude parue dans Neurology.

Un trouble neurocognitif (TNC) est le déclin d’une ou plusieurs fonctions cognitives, telles que l’attention, la mémoire, les fonctions exécutives, la cognition sociale ; ce déclin est significatif, évolutif, non expliqué par un état confusionnel ou par une maladie mentale. Une plainte cognitive est la perception subjective d’un déclin cognitif, le plus souvent de la mémoire, de l’attention et de la concentration, sans qu’un trouble cognitif soit objectivé.

Le syndrome du risque cognitivo-moteur intéresse les chercheurs puisque l’association de la plainte cognitive subjective et du ralentissement moteur chez une personne âgée la rend trois fois plus à risque de développer un trouble neurocognitif majeur (TNCM, anciennement “démence”) et 12 fois plus à risque de développer une démence vasculaire (un type de démence causé par des problèmes de circulation sanguine dans le cerveau), selon une étude publiée dans The Journals of Gerontology.

De plus, parmi les personnes âgées autonomes de 60 ans et plus souffrant de ce syndrome, environ 16,5 % à 19,5 % développent des problèmes légers de mémoire et de pensée dans les deux ans. Ce syndrome est aussi lié à un risque plus élevé de chutes, de fragilité, d’invalidité et de décès.

“Notre hypothèse de recherche est que ce syndrome pourrait être, au moins partiellement, dû à un défaut dans le contrôle exécutif de l’attention, affectant à la fois les sphères cognitives (mémoire) et motrices (locomotion)”, explique le Dr Leslie Decker directrice adjointe du Cireve et maître de conférences. La validation de cette hypothèse pourrait ouvrir des perspectives pour la détection précoce de ce syndrome.

Analyser finement les mouvements d’une personne grâce à la réalité virtuelle

Pour vérifier cette hypothèse, l’équipe du Cireve fait converger les sciences du mouvement, les sciences de l’ingénieur, la réalité virtuelle et l’intelligence artificielle au sein du programme de recherche Presage. La première partie de la recherche, qui était plus théorique, a été achevée en 2023. Elle a ouvert la voie à la deuxième partie, qui sera plus pratique et débutera en 2025.

“Nous disposons d’une salle immersive dans laquelle se trouve un tapis roulant à double bande avec deux plateformes de force intégrées, et qui, couplé aux caméras positionnées au-dessus des écrans, permettent de capturer et d’analyser finement les mouvements, et plus particulièrement la manière dont la personne régule la variabilité (fluctuations) de ses pas pendant la marche. Cette variabilité a une structure temporelle dont les caractéristiques constituent un indicateur clé de la santé de la personne”, décrit le Dr Leslie Decker.

Au cours de l’expérimentation, la personne marche sur le tapis tout en réalisant une tâche cognitive de difficulté variable. Ces deux tâches simultanées sont difficiles à exécuter. “Lorsqu’un carré apparaît sur l’écran du drone dans l’environnement virtuel, le participant doit lire le mot. Lorsqu’un losange est affiché, il doit nommer la couleur de l’encre avec laquelle le mot est écrit. La nature et l’agencement des stimuli dans la séquence ont été paramétrés pour solliciter les capacités d’inhibition et de flexibilité mentale (souvent touchées précocement dans les maladies neurodégénératives, ndlr), explique le Dr Leslie Decker. Le contrôle de la marche demande également des ressources cognitives, et le fait de placer la personne en situation de double tâche constitue un véritable défi, surtout pour celle qui serait à un stade très précoce d’une maladie neurodégénérative”, développe-t-elle.

“Ce syndrome pourrait préexister 12 à 15 ans avant l’objectivation d’un déclin cognitif”

Ces données aident à comprendre pourquoi les capacités cognitives et motrices déclinent avec l’âge, à identifier les profils de risque associés au syndrome cognitivo-moteur, et à trouver de nouveaux indicateurs qui prédisent comment ces profils évoluent.

“L’objectif de cette recherche est d’aboutir à terme à la conception et à la validation d’un système d’aide à la décision médicale. Ce système, basé sur des biomarqueurs détectables en population grâce à l’utilisation des technologies mobiles (tels que la vitesse de la marche, la fréquence cardiaque, les schémas de sommeil, l’activité cérébrale, ndlr), est construit avec des médecins et des professionnels de santé impliqués dans le parcours de soins des personnes âgées”, révèle le Dr Leslie Decker.

Identifier plus tôt les personnes âgées à risque de troubles cognitifs permet de commencer des interventions préventives et personnalisées, qu’elles impliquent des médicaments ou non, puisque ce syndrome pourrait être présent 12 à 15 ans avant que des signes de déclin cognitif ne soient observés. Une telle détection permettrait de reculer de plusieurs années le début des premiers symptômes cliniques, et donc d’avoir un impact significatif sur la qualité de vie des seniors.

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