Prix des cartes d’identité réduit après violations légales

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Prix des cartes d'identité réduit après violations légales
Prix des cartes d'identité réduit après violations légales

Africa-Press – CentrAfricaine. Après cinq ans de tarifs illégaux, le gouvernement ramène enfin le prix de la carte nationale d’identité à ses tarifs légaux.

Le gouvernement centrafricain vient de ramener le prix de la carte nationale d’identité à 4 500 FCFA, conformément à la loi des finances 2020. Cette décision, formalisée par l’arrêté interministériel n°017/MISP/DIRCAB/SP.25 du 26 juin 2025, met fin à cinq années de pratiques illégales où les citoyens payaient entre 6 000 et 6 750 FCFA pour obtenir ce document essentiel.

L’histoire débute en 2020 quand l’Assemblée nationale vote un tarif de 4 500 FCFA pour la carte d’identité. Pourtant, la société libanaise Almadina, partenaire du gouvernement dans le cadre d’un accord public-privé, impose des prix majorés. Le gouvernement cautionne cette violation, ignorant délibérément la volonté des élus du peuple.

En août 2020, les députés menés par Thierry-Georges Vackat saisissent le tribunal administratif de Bangui. Le magistrat Michel Anihibié rend un jugement sans appel le 4 septembre: l’arrêté gouvernemental est “arbitraire” et viole les engagements internationaux du pays. Le tribunal ordonne l’alignement sur les tarifs légaux. Almadina et le gouvernement persistent dans leur refus.

Cette obstination pousse la société civile à s’organiser. Le collectif M4500 naît en octobre 2020, menant des manifestations pacifiques pour exiger le respect de la loi. La réponse des autorités est brutale: lors du sit-in du 13 octobre 2020, trois membres du mouvement sont arrêtés et maltraités avant leur libération.

L’année 2021 confirme l’entêtement gouvernemental. Lors des débats sur la loi des finances, l’Assemblée nationale rejette une nouvelle fois toute légalisation des tarifs majorés. Une commission mixte gouvernement-parlement est proposée pour réviser l’accord avec Almadina. Aucune suite n’est donnée.

Les années suivantes voient se répéter le même schéma. En 2022, le député Joseph Bendounga dénonce une “parodie de démocratie”, révélant que parlementaires et personnel de l’Assemblée obtiennent leurs cartes à prix réduit ou gratuitement, tandis que les citoyens ordinaires subissent les tarifs majorés.

Le Groupe de travail de la société civile, dirigé par Gervais Lakosso, lance plusieurs ultimatums. Les menaces de manifestations sont systématiquement réprimées. Kossimatchi, griot du régime, promet même de “broyer les tibias” des contestataires.

Cette résistance gouvernementale s’inscrit dans un contexte plus large de restriction des libertés. Depuis la révision constitutionnelle de 2023, qui supprime la limitation des mandats présidentiels, l’espace démocratique se réduit. Les manifestations d’opposition sont interdites ou réprimées, tandis que les rassemblements pro-gouvernementaux se déroulent librement.

La décision de juin 2025 survient à un moment particulier. L’Autorité nationale des élections peine à produire une liste électorale définitive, compromettant la crédibilité du scrutin de décembre. La carte d’identité étant indispensable pour les centrafricains de circuler librement d’aller voter, cette baisse tarifaire ressemble à une manœuvre électorale pour apaiser une population exaspérée.

Les citoyens ne s’y trompent pas. “Pendant cinq ans, ils nous ont volés avec des prix illégaux. Maintenant, à quelques mois des élections, ils baissent les prix. C’est une insulte à notre intelligence”, confie un membre du collectif M4500.

L’accord avec Almadina pose d’autres questions. Au-delà des tarifs illégaux, la société libanaise bénéficie d’exonérations fiscales et douanières dont la légalité peut être contestée. Cette opacité alimente les soupçons sur la nature réelle de ce partenariat.

Les nouvelles mesures réduisent également d’autres tarifs: la carte de séjour privilégiée passe de 650 000 à 480 000 FCFA pour deux ans. Ces ajustements, bien que tardifs, restent insuffisants aux yeux de ceux qui ont subi cinq années d’abus.

Le collectif M4500, tout en saluant le retour au tarif légal, exige des comptes. “Cette décision ne doit pas faire oublier les violations passées. Nous voulons une enquête sur la gestion du contrat avec Almadina et des sanctions pour les responsables”, insiste un cadre de cette société civile.

Cette affaire montre les dysfonctionnements profonds de la gouvernance centrafricaine. Un parlement vote une loi, un tribunal confirme sa légalité, mais l’exécutif persiste dans la violation pendant cinq ans. Cette séquence interroge sur le respect de l’État de droit dans le pays.

L’approche des élections de 2025 transforme subitement l’impossible en réalité. Ce qui était juridiquement intenable pendant cinq ans devient soudainement applicable. Cette volte-face confirme le caractère électoraliste de la décision.

Pour les observateurs de la vie politique centrafricaine, cet épisode illustre une méthode de gouvernance basée sur l’ignorance des institutions jusqu’au moment où l’intérêt politique commande le contraire. Les citoyens, victimes de cette approche, gardent en mémoire ces années d’abus légalisés.

La baisse du prix des cartes d’identité constitue une victoire pour les défenseurs de la légalité. Elle met fin à un scandale de cinq ans où gouvernement et partenaire privé ont piétiné la loi avec impunité. Mais cette décision tardive, intervenant à quelques mois des élections, questionne la sincérité du geste et révèle une gouvernance opportuniste qui adapte son respect de la loi aux échéances électorales…….

Source: Corbeau News Centrafrique

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