Africa-Press – Côte d’Ivoire. “L’un des principaux défis de la tuberculose n’est pas seulement la détection de la maladie, mais plutôt le suivi de son évolution dans les poumons du patient, tout au long du traitement,” expose Ben Davis, chercheur au Rosalind Franklin Institute, lors d’une interview pour Sciences et Avenir. Avec son équipe, il a conçu un nouveau moyen d’identifier avec précision les zones pulmonaires infectées, au millimètre près. Une information cruciale pour adapter la durée du traitement.
En effet, la tuberculose nécessite bien souvent des traitements longs, de plusieurs mois. Cette contrainte aboutit parfois à un arrêt prématuré des soins, très lourds pour le patient. “Une vision précise de l’état des poumons du patient est précieuse. Elle permettra aux médecins de prolonger le traitement si une région est encore infectée, ou au contraire de l’arrêter si le patient est guéri”, déclare le chercheur, enthousiaste. Les résultats de cette étude, portant sur la souris, ont été publiés dans la revue Nature Communications. De nouveaux travaux débutent à présent pour tester cette méthode chez l’être humain.
Le suivi de la tuberculose, parfois biaisé
Il existe actuellement deux méthodes pour diagnostiquer la tuberculose. D’une part, la recherche de bactéries responsables de cette maladie dans la salive. Et de l’autre, la recherche de signes d’inflammation dans les poumons. Mais dans certaines circonstances, les bactéries passent sous leurs radars. “Un test de salive peut donner un résultat négatif bien avant que la maladie ne soit complètement traitée au niveau des poumons, ce qui peut amener les patients à terminer le traitement trop tôt”, indiquent les chercheurs.
Quant aux signes d’inflammation des poumons, ils ne sont pas spécifiques à la tuberculose et peuvent être causés par d’autres affections. De plus, “l’inflammation peut également persister dans les poumons après l’élimination des bactéries de la tuberculose, ce qui conduit à poursuivre le traitement plus longtemps que nécessaire”, ajoutent-ils. Mais grâce à leur récente découverte, les chercheurs parviennent aujourd’hui à distinguer précisément et uniquement les zones infectées par la bactérie responsable de la tuberculose.
Un PET-scan spécifique à la tuberculose
La tuberculose est une maladie infectieuse, due à la bactérie Mycobacterium tuberculosis. C’est cette bactérie, aussi appelée “bacille” car elle a une forme de bâtonnet, que les chercheurs sont parvenus à révéler au scanner. Mais comment ? L’équipe de Ben Davis a fabriqué un sucre qui est absorbé par ces bactéries, alors visibles au scanner. Si les bactéries apparaissent à l’écran, c’est que le sucre est modifié. On lui associe un atome de fluor qui émet des radiations, un “radio isotope”. C’est le principe du PET-scan, notamment utilisé pour détecter les tumeurs cancéreuses et les métastases.
“Nous avons trouvé un moyen de concevoir un sucre sélectif, c’est-à-dire qu’il n’est consommé que par les bactéries de la tuberculose”, indique le scientifique. Plus précisément, cette molécule agit comme de la peinture. Elle s’incorpore à la paroi de la bactérie, et émet des radiations au contact des enzymes qu’elle contient. De cette manière, les chercheurs ont pu distinguer les régions où les bactéries étaient encore actives.
Un diagnostic à moindre coût
La découverte est d’autant plus intéressante que la technique est abordable. D’abord, les PET-scan sont de plus en plus répandus dans les hôpitaux du monde entier. Mais en plus, la molécule utilisée est particulière: “Nous avons cherché à concevoir une molécule facilement accessible dans le monde”, se réjouit Ben Davis. Elle peut être produite sans expertise, ni laboratoire spécialisé.
En 2021, plus de 10 millions de personnes ont contracté la tuberculose, et 1,6 million sont décédées des suites de la maladie. Il s’agit de la deuxième maladie infectieuse la plus meurtrière au monde, après le Covid-19. 80% des cas de tuberculose sont recensés dans les pays à revenus faibles et intermédiaires. “Ce diagnostic efficace pourrait être déployé dans la plupart des systèmes de santé du monde entier – et surtout, dans les endroits où cette maladie fait encore le plus de victimes”, conclut le chercheur.
Ces premiers résultats encourageants devront donc être confirmés dans de nouveaux travaux, sur l’être humain cette fois-ci, dans les mois à venir.
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