Le Sud-Soudan est devenu un point névralgique pour les réseaux de trafic humain en Afrique de l’Est, facilitant l’immigration illégale vers l’Europe. Malgré les efforts des autorités pour renforcer la sécurité aux frontières, la situation reste précaire, avec de nombreux migrants interceptés lors de leur passage vers des destinations européennes.
Dans un tournant notable des itinéraires de migration illégale en Afrique de l’Est, le Sud-Soudan est apparu comme un nouveau maillon dans la chaîne des réseaux de trafic humain vers l’Europe.
L’administration des passeports et de l’immigration a annoncé l’arrestation de centaines de migrants érythréens et éthiopiens tentant de traverser la ville d’Aweil, au nord-ouest du pays, en direction du Darfour, puis vers la Libye et enfin vers les côtes européennes via la Méditerranée.
Malgré les efforts déployés par les autorités de Juba en coordination avec l’Organisation internationale pour les migrations, le Bureau des Nations Unies contre la drogue et le crime, et la Mission des Nations Unies, ce développement met en lumière la fragilité du contrôle aux frontières et l’expansion des activités des réseaux transnationaux, dans un contexte où les considérations humanitaires se mêlent aux préoccupations sécuritaires et régionales.
Le directeur de l’immigration du Sud-Soudan, le général Elia Costa Faustin, a déclaré que les autorités avaient intensifié les mesures aux points de passage frontaliers pour réduire le trafic, avertissant que les réseaux criminels continuent d’exploiter l’étendue des frontières et la faiblesse des capacités techniques.
Il a ajouté: “Le Sud-Soudan partage des frontières avec six pays, et de nombreux points de passage restent ouverts ou insuffisamment surveillés, ce qui en fait un couloir facile pour les mouvements illégaux.”
Costa a indiqué que les forces de sécurité avaient arrêté 109 migrants en provenance d’Érythrée, de Somalie et de Djibouti au cours des dernières semaines alors qu’ils tentaient de se rendre au Soudan puis en Libye, suggérant que l’Europe pourrait être leur destination finale.
Il a précisé que l’administration de l’immigration travaille en coordination avec les agences nationales et les organisations internationales pour renforcer le contrôle des frontières et élargir l’utilisation des systèmes de surveillance et de suivi.
Concernant le cadre légal, Faustin a confirmé que l’adhésion du Sud-Soudan en 2023 à la Convention des Nations Unies contre la criminalité organisée et le début de l’élaboration d’un projet de loi sur la lutte contre la traite des êtres humains représentent des étapes essentielles pour renforcer le cadre juridique national et respecter les engagements internationaux.
Un rapport du Département d’État américain pour 2024 indique que le Sud-Soudan n’est plus seulement un pays d’origine ou de destination pour les victimes, mais est également devenu un point de transit majeur dans les itinéraires de migration illégale vers l’Afrique du Nord et l’Europe.
Le rapport souligne que la faiblesse des institutions étatiques, la persistance des conflits internes et l’ampleur des déplacements ont rendu les migrants plus vulnérables à l’exploitation.
Dans une étude du ministère de la Justice, Sabri Wani Ladu, co-président de la Commission nationale de lutte contre la traite des êtres humains, a indiqué que le projet de loi sur la lutte contre la traite des êtres humains de 2024 représente une avancée importante, mais nécessite un renforcement des capacités institutionnelles et une coordination entre les agences pour être appliqué efficacement et protéger les victimes, notamment les femmes et les enfants.
Le Sud-Soudan est considéré comme l’un des principaux itinéraires de trafic humain dans la région, avec 368 migrants interceptés en 2024 à la frontière entre le Soudan et la Libye, la plupart étant des femmes et des enfants.
L’expert juridique Deng John estime que la propagation de ce phénomène est due à des facteurs complexes, notamment l’étendue des frontières, la faiblesse de la surveillance et la prolifération des conflits, soulignant que la coopération entre le gouvernement de Juba et les organisations internationales est étroite et efficace.
Le journaliste spécialisé Taban Daniel confirme que le point de passage “Majok Ngin Tio” à la frontière de l’État du Nord Bahr el Ghazal est exploité par des réseaux de trafic dirigés par des citoyens du Darfour, qui coordonnent les mouvements des migrants jusqu’à leur entrée sur le territoire libyen.
Depuis son indépendance en 2011, le Sud-Soudan a été confronté à des conflits internes et à une instabilité politique qui ont exacerbé les conditions de vie.
Ces facteurs ont poussé de nombreux citoyens à fuir vers d’autres pays, rendant le Sud-Soudan un carrefour pour les réseaux de trafic humain.
L’absence de contrôle efficace des frontières a permis à ces réseaux de prospérer, exploitant la vulnérabilité des migrants en quête d’une vie meilleure.
En 2023, le pays a rejoint la Convention des Nations Unies contre la criminalité organisée, marquant une étape importante dans la lutte contre le trafic d’êtres humains.





