La situation au Niger après le coup d’Etat militaire : Le dernier espoir pour Bazoum !

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La situation au Niger après le coup d'Etat militaire : Le dernier espoir pour Bazoum !
La situation au Niger après le coup d'Etat militaire : Le dernier espoir pour Bazoum !

Anouar CHENNOUFI

Africa-Press – Niger. Le sommet de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), tenu à Abuja, au Nigeria, le 30 juillet 2023, a lancé un ultimatum aux putschistes du Niger pour qu’ils remettent le pouvoir dans une semaine au président déchu Mohamed Bazoum, tout en menaçant de recourir à la force si cette demande ne soit pas respectée.

Dans le même contexte, la France, l’Union européenne et les États-Unis se sont joints à la décision de la CEDEAO et ont suspendu toute forme de coopération militaire et économique avec le Niger, à un moment où les pays sahéliens voisins se rangeaient du côté de leurs pairs les autorités militaires au pouvoir.

Perspectives de la situation politique au Niger

C’est ainsi qu’à la lumière des transformations accélérées en cours au Niger et dans la région du Sahel, trois scénarios sont susceptibles d’émerger de cette situation, comme tels :

• 1-Le scénario de l’escalade et de l’affrontement

Avec la menace africaine en passe de s’épuiser, et la réunion des chefs d’état-major des armées de la CEDEAO tenue le 1er août, l’option militaire apparaît bien forte et probable, et a déjà été adoptée par plusieurs parties influentes de la région avec le soutien français et la bénédiction américaine.

Cependant, cette option se heurte à de nombreuses difficultés, notamment : l’unité et la cohésion de l’institution militaire nigérienne suite à l’échec de la stratégie adoptée pour la diviser et de s’appuyer sur la direction de l’armée en échange de la garde présidentielle pour passer le chemin de l’intervention pour restaurer l’ancien régime, et le soutien populaire écrasant au conseil militaire qui construirait une ceinture interne solide pour le régime militaire, ainsi que la position des pays sahéliens voisins (Mali, Burkina Faso et Guinée) et l’Algérie, qui rejettent l’intervention militaire.

• 2-Le scénario d’un règlement et d’une solution négociée

Alors que l’ancien président Mahamadou Issoufou poursuit les tentatives de règlement de la situation politique afin de ramener Bazoum au pouvoir en échange de quelques concessions à l’armée, il reste possible de parvenir à un accord consensuel garantissant aux militaires des rôle politique dans l’élaboration de l’avenir du régime aux dépens du président évincé Bazoum, qui pourrait être contraint à la démission afin d’ouvrir de nouveaux horizons à une solution politique qui permettrait la reprise de l’expérience démocratique et la survie du Niger dans l’alliance occidentale.

Il semble d’ailleurs que l’Algérie ait commencé à soutenir cette option, et certains centres influents du pouvoir en France l’ont conseillée aux autorités politiques en place.

Néanmoins, cette solution semble encore lointaine, et selon toutes les indications, il ne semble pas que le président déchu Bazoum soit prêt à court terme à renoncer volontairement au pouvoir, et il a déjà subi de fortes pressions de la part des dirigeants de certains pays africains qui l’ont mis en garde contre la soumission aux putschistes.

• 3-Le scénario russe

En cas d’échec du scénario de règlement politique, la seule option disponible pour un régime militaire reste de rejoindre les pays sahéliens voisins dans une stratégie de rapprochement avec la Russie et d’éloignement des partenaires occidentaux traditionnels, avec le lourd coût économique et stratégique que cette option puisse entraîner dans un pays qui est l’un des pays africains les plus pauvres et les plus nécessiteux qui a le plus besoin d’aide de l’extérieur.

L’Intervention militaire serait-elle la « bonne solution » ?

Selon le commissaire de la CEDEAO chargé des affaires politiques et de la sécurité, Abdel-Fatau Musah, « L’option militaire est la dernière option à négocier sur la table », ajoutant dans ce sens : « Nous devons être préparés à cette éventualité », a rapporté l’Agence France Presse.

Il importe de noter que les dirigeants ouest-africains, réunis dimanche 2 Août en sommet extraordinaire dans la capitale nigérienne, Niamey, ont condamné le coup d’État et donné une semaine aux putschistes pour rétablir le président déchu, Mohamad Bazoum.

Lors de cette réunion, qui s’était poursuivie de mercredi à jeudi, les chefs de ces armées n’ont pas exclu la possibilité de recourir à la force, même si avant, ils ont publié une déclaration à la télévision d’Etat, mettant en garde contre toute intervention militaire dans leur pays.

A noter, par ailleurs, que « l’objectif de la réunion de la CEDEAO était d’approuver un plan d’agression contre le Niger par une intervention militaire imminente à Niamey en coopération avec d’autres pays africains non membres de la CEDEAO et certains pays occidentaux », a déclaré le porte-parole de la junte, Amadou Abdel Rahman.

Sauf que le Mali et le Burkina Faso ont tous deux refusé de menacer d’intervenir militairement au Niger, estimant que cela équivaudrait à leur déclarer la guerre à eux.

Une délégation de la CEDEAO arrive à Niamey dans le cadre de négociations

Niamey a accueilli une délégation de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) dans le cadre d’une tentative de négociations avec les putschistes.

Cette délégation de haut niveau est conduite par Abdulsalami Abubakar, général et homme d’État nigérian (Il a été à la tête de son pays du 8 juin 1998 au 29 mai 1999), a confirmé la CEDEAO.

Mais il semble bien que la délégation de la Communauté économique des États d’Afrique de l’ouest, qui était arrivée jeudi soir à Niamey pour trouver une sortie de crise au Niger, est repartie quelques heures plus tard, dans la nuit de jeudi à vendredi, et n’ont vu ni le chef des militaires qui ont pris le pouvoir la semaine dernière, notamment le général Abdourahamane Tchiani, ni le président renversé Mohamed Bazoum, a expliqué vendredi l’un de ses membres.

Dernière tentative du président nigérien déchu Mohamed Bazoum

Après le départ de la délégation de la CEDEAO venue à Niamey pour négociation, Mohamed Bazoum, qui est toujours retenu par les putschistes et vit cloîtré dans sa résidence présidentielle, surveillé par sa propre garde, en compagnie de sa femme et de son fils, s’est exprimé jeudi soir à travers une tribune publiée par le média américain « The Washington Post ».

Le président nigérien, renversé le 26 juillet à la suite d’un coup d’État militaire, a mis en garde contre les « conséquences dévastatrices » du putsch pour le monde et le Sahel africain, exprimant également son inquiétude quant au risque d’un rebond du terrorisme et d’une zone toute entière qui pourrait passer sous « l’influence » de la Russie via le groupe paramilitaire privé de « Wagner », si le putsch réussissait.

« J’appelle le gouvernement américain et l’ensemble de la communauté internationale à aider à restaurer l’ordre constitutionnel », écrit-il, tout en se qualifiant, par la même occasion, d’«otage» des putschistes, dans sa première déclaration publique depuis son renversement.

France Info a déclaré à son tour que : « Selon ses proches, contactés vendredi après-midi, Mohamed Bazoum va bien et refuse catégoriquement de démissionner. Mais ses conditions de vie se sont drastiquement durcies et, toujours selon ses proches, le président Bazoum n’a désormais plus d’électricité et la personne chargée de lui transmettre de la nourriture ne peut, aux dernières nouvelles, plus accéder au palais » (propos écrits par le journaliste de France Info présent au Niger).

Rappel des réactions du voisinage

Les réactions au putsch se sont caractérisées par un rejet sans précédent et décisif, qu’il soit lié aux partenaires africains du Niger (ou encore aux grandes puissances internationales. Les pays de la Communauté économique de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) ont pris l’initiative de condamner le coup d’État et de ne pas le reconnaître, tout en menaçant de recourir à la force militaire si nécessaire pour restaurer le régime précédent.

Dans ce cadre, les trois présidents civils suivants ont été distingués :

• le président du Nigéria, Bola Tinubu,

• le président de la Côte d’Ivoire, Alassane Ouattara,

• et le président du Sénégal, Macky Sall.

Ces présidents furent rejoints par le président tchadien Mahamat Idriss Deby Itno, qui a tenté de persuader l’armée nigérienne d’abandonner le coup d’État, alors que la Mauritanie s’est contentée d’une condamnation, plutôt clémente, d’une part.

Médiation du Président tchadien au Niger

Le Président tchadien à Abuja avec le Président du Nigeria et de la CEDEAO Bola Tinubu

Après avoir effectué un séjour éclair de consultation à Abuja au Nigeria, dans la matinée du lundi 31 juillet 2023, sur l’invitation du président Nigérian, Président en exercice de la CEDEAO, j’ai bouclé mon déplacement par une visite au Niger qui traverse une crise politique majeure.

À Niamey, j’ai eu des échanges approfondis avec les leaders du Conseil National de Sauvegarde de la Patrie (CNSP), notamment le Général Abdourahamane Tchiani, avec le Président Mohamed Bazoum ainsi que l’ancien Président Mahamadou Issoufou dans une approche fraternelle qui vise à explorer toutes les pistes afin de trouver une issue pacifique à la crise qui secoue ce pays voisin.


Le Président tchadien s’entretenant avec le Général Abdourahamane Tchiani

Par ailleurs, plusieurs armées ouest-africaines comme le Sénégal se sont dites prêtes à envoyer des soldats, tout comme la Côte d’Ivoire, selon une source proche de la délégation ivoirienne à Abuja qui n’a pas précisé le nombre éventuel d’hommes mobilisés.


Le Président tchadien rencontrant l’ancien président nigérien Mahamadou Issoufou

D’autre part, les trois pays de la région dirigés par des régimes militaires, à savoir le Mali, le Burkina Faso et la Guinée, ont annoncé leur soutien au gouvernement militaire et leur rejet de toute ingérence extérieure dans les affaires du Niger, considérant toute intervention militaire comme une agression contre lui.

L’Algérie, quant à elle, a rejoint cette position malgré sa condamnation de principe du coup d’État.

Réactions internationales

A ce stade là, la France, les pays de l’Union européenne et les Etats-Unis d’Amérique, avaient annoncé leur ferme condamnation du coup d’Etat et l’arrêt de toute forme de coopération et de partenariat avec le Niger.

Toutefois, il faut dire que cette position radicale s’explique par la stratégie de confrontation préventive avec l’expansion du régime militaire en Afrique et la pénétration croissante de la Russie sur le continent. Parmi ces raisons figure également l’importance des intérêts économiques du Niger, qui fournit 25 % des besoins de l’Europe en uranium, et qui est la troisième ressource française de ce minerai vital, dont elle supervise l’exploitation depuis un demi-siècle.

Bien que la plupart des pays africains et les grandes puissances internationales aient condamné le coup d’État et que les pays de la CEDEAO aient fait allusion à une intervention militaire pour rétablir le président Mohamad Bazoum au pouvoir, ce scénario se heurte à de nombreux obstacles et il est possible de parvenir à une solution politique qui conduirait à l’éviction de Bazoum du pouvoir, et en cas de tension accrue, ils pourraient recourir au gouvernement militaire pour se rapprocher de la Russie et s’éloigner de ses partenaires occidentaux.

Certes, le Niger est à ce jour l’un des derniers pays alliés des États-Unis et de la France dans la lutte contre les groupes terroristes dans la région du Sahel, mais Niamey se rapproche de plus en plus de la Russie, sachant que peu de temps après le coup d’État du 26 juillet, des jeunes favorables aux putschistes ont arboré dans les rues de la capitale des drapeaux russes.

Une organisation liée au groupe Wagner aurait même diffusé un message présumé de leur patron, Evgueny Prigozhin, dans lequel il aurait affirmé que le putsch au Niger, tenait de la « lutte contre les colonisateurs » (non confirmé).

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