Sauvetages in extrémis en milieu botanique

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Sauvetages in extrémis en milieu botanique
Sauvetages in extrémis en milieu botanique

Africa-Press – Niger. En 1992, le silène de Gibraltar, une plante vivace « capable de croître dans les milieux les plus hostiles à toute conquête végétale » était porté disparu. Le canelillo est un arbre feuillu du Costa Rica qui n’a fait l’objet d’une étude scientifique qu’en 2005. A l’époque, on n’en compte plus que deux spécimens. En 1814, le botaniste Stephen Elliott a le triste privilège d’observer pour la dernière fois des arbres de Franklin en milieu naturel, dans la vallée de l’Altamaha en Géorgie, aux Etats-Unis. Dans les années 1990, suite à des opérations de déforestation au profit de l’agro-industrie dans le sud de la Tanzanie, l’érythrine, un arbre épineux découvert en 1934, est devenu introuvable.

Un parti pris original

Ces quatre espèces font partie de la dizaine sélectionnée par David Happe dans le livre qu’il publie ce mois de septembre 2025, Plantes rescapées (éditions « Le mot et le reste »). Expert arboricole indépendant depuis 2017 après avoir exercé sa spécialité près de trente ans à l’Office national des forêts et dans diverses collectivités territoriales, l’auteur a pris un parti pris original pour parler de biodiversité menacée. Dans des contextes tristement connus de ravages causés par l’industrialisation, de prédation humaine sur les ressources ou de réchauffement climatique, il a choisi dix histoires de spécimens sauvés de l’extinction totale, un peu partout dans le monde, de la Belgique à la Chine en passant par l’île Maurice ou la Grande-Bretagne. Le tout en y associant des commentaires de botanistes interrogés pour le livre.

Mais cette diversité botanique et géographique va de pair avec celle des circonstances de ces « sauvetages », qui prennent des détours parfois étonnants. Où le pur hasard peut côtoyer l’expertise.

Horticulteur irakien et employé des postes belge

Nombre d’espèces doivent certes leur salut à des actions scientifiques en bonne et due forme. Par exemple celles d’une équipe de biologistes de l’ONG Osa Conservation pour préserver le canelillo, ou d’experts des jardins botaniques de Gibraltar, Londres et Cadix unissant leurs efforts autour du silène de Gibraltar. En revanche, le naturaliste William Bartram ne savait pas, en envoyant des graines à son père à Philadelphie, dans les années 1770, qu’il serait à l’origine du sauvetage de l’arbre de Franklin (qui ne pousse cependant qu’en pépinière).

Après la guerre du Golfe, anticipant de futurs conflits dans la région, un horticulteur irakien (que David Happe a tenté en vain de contacter) expédie par précaution des graines de la pastèque Ali Baba à la société américaine Baker Creek Heirloom Seeds, spécialisée dans la préservation de semences. La belle de Thuin, un prunier dont on ne connaît pas l’origine, est toujours parmi nous parce qu’un employé de direction régionale des Postes de Charleroi, en Belgique, en avait un unique spécimen dans son jardin.

Un arbre sous protection militaire

Quant à la delissea d’Hawaï, qui ne pousse que sur l’île d’Oahu, elle est sous la garde de… l’armée américaine, qui a sur place une mission d’étude et de protection de la biodiversité en péril.

Il n’y a toutefois pas de mystère. Aucune de ces histoires ne se déroule sans heurts ni sans détermination. Les scientifiques doivent persévérer, prospecter, renouveler leurs efforts. Comme pour l’érythrine, anéantie une première fois, redécouverte puis anéantie à nouveau ! Ou avec les huit tentatives de réintroduction de la cylindrocline de Lorence dans son milieu naturel mauricien. « En mobilisant le savoir naturaliste, la volonté des acteurs et les technologies les plus pointues, l’Homme peut faire des miracles ! Reste à savoir s’il peut – et veut encore – s’en donner les moyens », prévient David Happe, se gardant de tout angélisme. Ses récits n’en restent pas moins enthousiasmants.

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