Ces Béninois de la diaspora qui font rayonner le pays

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Nous respectons votre vie privée
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Africa-PressBenin. Bella Agossou est actrice en Espagne, Ian Mahinmi est champion NBA, Sinatou Saka journaliste à RFI et Arnauld Akodjenou conseiller spécial du HCR en Suisse… Ces Béninois ont rencontré le succès à des milliers de kilomètres de Cotonou, mais ils n’en ont pas pour autant oublié leurs origines.

• Bella Agossou, le cinéma au service du Bénin

Bella Agossou a fait de la promotion du Bénin son cheval de bataille. Ici dans « Adù » (juin 2020), du réalisateur Salvador Calvo. © Antonio Garrido/MARINA PRESS/REX/SIPA

« Je n’aurais jamais cru devenir cette actrice qui joue avec les plus grands du cinéma espagnol. » À 30 ans tout ronds, Bella Agossou n’en revient toujours pas. Elle se revoit encore petite fille, lorsqu’elle récitait son premier monologue extrait de L’Enfant Noir, de l’auteur guinéen Camara Laye, sur les planches de son école primaire, à Cotonou.

Pour les besoins de sa carrière, cette native de Savalou s’envole pour Barcelone en 2002, apprend le catalan et l’espagnol. En 2013, elle se fait remarquer dans Un Cuento de Navidad, téléfilm dans lequel elle tient le rôle principal. Une dizaine de rôles dans des productions espagnoles plus tard, elle n’en oublie pas pour autant son pays natal.

Créatrice de NOK, marque d’accessoires en pagne distribuée dans sa boutique de Cotonou, Bella Agossou a fait de la promotion du Bénin son cheval de bataille. Une mission qu’elle met aussi au service du cinéma.

Dans Adù (juin 2020), signé du réalisateur Salvador Calvo, la comédienne ne tient qu’un petit rôle. Car c’est dans les coulisses qu’elle a tenu à apporter sa pierre à l’édifice en convainquant la production de tourner au Bénin.

« La majorité des films espagnols dont l’histoire se passe en Afrique sont tournés au Sénégal, au Ghana ou en Ouganda. J’ai voulu montrer que le Bénin pouvait servir de plateau de tournage grâce à la richesse de ses paysages, mais aussi de carrefour cinématographique grâce aux professionnels qui sont sur place », se félicite celle qui espère défendre prochainement un autre projet de cinéma en collaboration avec des productions béninoises.

• Arnauld Akodjenou, au nom des peuples africains

Le Béninois Arnauld Akodjenou, Coordinateur régional et conseiller spécial du Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) du Sud-Soudan. © DR

Rétablir la paix et l’État de droit, telles sont les missions que s’est fixées l’humanitaire, trente ans de carrière à son actif. Coordinateur régional et conseiller spécial du Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) du Sud-Soudan jusqu’en 2019, Arnauld Akodjenou, 70 ans, s’est investi pour négocier un accord de paix en 2018 en donnant la parole aux réfugiés des sept pays de la zone.

Désormais, c’est au sein de la Fondation Kofi Annan que ce docteur en sciences politiques, diplômé de l’Institut universitaire de hautes études internationales et du développement de Genève (Suisse), officie en tant que conseiller spécial pour l’Afrique chargé de l’initiative sur l’intégrité électorale.

« Kofi Annan en personne m’a confié le dossier sur l’Afrique », glisse l’ancien directeur de la division des opérations du HCR pour l’ensemble du globe. Depuis 2011, c’est donc sur le continent qu’Arnauld Akodjenou concentre ses efforts pour améliorer les pratiques de bonne gouvernance.

« Il y a eu des reculs démocratiques en Afrique de l’Ouest ces deux dernières années. L’ensemble des pays, excepté le Burkina Faso, connaît des tensions avant ou après les périodes électorales », regrette ce fervent défenseur de la sécurité, de la justice et des droits humains, « les trois piliers de l’État de droit ».

S’il n’intervient pas au Bénin, Arnauld Akodjenou n’en demeure pas moins concerné par la situation de son pays natal. « C’est un grand pays, mais qui vit une crise politique énorme. Il survit car ses institutions sont fortes. Il faut continuer ce travail pour que le peuple s’y retrouve. »

• Ian Mahinmi, inspirer la jeunesse béninoise

Ian Mahinmi consacre une bonne partie de son temps à promouvoir les jeunes talents béninois en organisant chaque été un camp de basket sur place. © Will Newton/Getty Images

Joueur de basketball français né d’un père béninois et d’une mère jamaïcaine, Ian Mahinmi s’est fait un nom aux États-Unis. Champion NBA avec les Mavericks de Dallas en 2011, il intègre l’équipe des Wizards de Washington en 2016 et signe un très gros contrat de 64 millions de dollars sur quatre ans. Mais les saisons sont marquées par des baisses de régime et une blessure au talon d’Achille. Le pivot de 34 ans est condamné au banc de touche pendant plusieurs matches.

À la fin de l’année 2019, la carrière de ce gaillard de 2,10 m prend un autre tournant. Il bat son record personnel avec 25 points marqués contre le Heat Miami. Aujourd’hui libre de tout engagement, Ian Mahinmi consacre une bonne partie de son temps à promouvoir les jeunes talents béninois en organisant chaque été un camp de basket sur place. « Depuis trois ans, je vais au Bénin avec ma fondation [I Am, NDLR] pour essayer d’inspirer la jeunesse, mais aussi pour apprendre d’elle et me ressourcer », a-t-il signalé dans un tweet posté en mai 2020 sur son compte.

Ce projet a fait l’objet d’un documentaire intitulé Ian Mahinmi Basketball Camp, publié sur la chaîne YouTube du sportif. Grâce à cette initiative, deux jeunes Béninois ont eu l’occasion de jouer en France, un joueur s’est s’expatrié aux États-Unis et trois autres ont pu représenter le Bénin dans le cadre des Basketball Without Borders (BWB), un camp organisé en partenariat avec la NBA qui réunit les meilleurs jeunes joueurs africains.

• Sinatou Saka, lutter contre l’impérialisme linguistique

La journaliste Sinatou Saka est chargée des podcasts et des projets éditoriaux chez RFI et France 24. © Upendo « Afrofuturismes », « Dianké », « Bas les pattes »… En quelques années, Radio France Internationale (RFI) s’est fait une place dans le petit monde en pleine expansion des podcasts innovants et visant le public des « digital natives » du continent. Un succès à mettre en partie au crédit de l’implication de Sinatou Saka. « Les podcasts sont des aventures collectives », glisse-t-elle humblement quand on lui demande si elle n’est pas, désormais, la « Mme Podcast » de RFI.

Entrée dans le giron de la radio du monde par la « petite porte » – elle est repérée pour la qualité de ses écrits sur Mondoblog, le réseau de blogs de RFI –, elle sera littéralement « débauchée » par le directeur des environnements numériques de la radio, qui lui propose de faire son alternance au sein de l’entreprise. « J’ai été biberonnée à RFI, pour moi, avoir le badge, c’était un rêve. J’ai accepté de tout faire », s’amuse-t-elle.

Familière de l’écosystème « tech », elle ne tarde pas à lancer un concours d’innovation, le Challenge App Afrique. Chaque année depuis cinq ans, le concours récompense les meilleures applications créées par de jeunes développeurs africains. Une somme d’argent, mais aussi de la visibilité et de la crédibilité pour les lauréats. « C’est quelque chose de très concret, on change la vie de ceux qui créent les applis, mais aussi de ceux qui les utilisent, s’enthousiasme Sinatou Saka. Et cela change la manière dont ces jeunes se voient eux-mêmes : ils créent des applications qui séduisent Orange ou Microsoft. »

Quand elle n’est pas cheffe de projet éditorial digital pour RFI, la jeune Béninoise a un autre cheval de bataille : la défense des langues africaines dans les environnements numériques. Citant pêle-mêle Boubacar Boris Diop ou Wole Soyinka comme sources d’inspiration, elle a mis sur pied le collectif Idemi Africa, qui s’est donné pour mission de rendre ces langues plus visibles sur le net.

« Je suis Yoruba, et dans ma famille, dans ma culture, il y a des choses qui ne peuvent s’exprimer que dans ma langue, explique-t-elle. Les moteurs de recherche, les outils de traduction, marginalisent les langues africaines. » Pour lutter contre cet impérialisme linguistique, Idemi Africa multiplie les initiatives : « hackatons », conférences, mobilisation sur les réseaux sociaux… Avec un espoir : « Que nos langues, si vivantes, ne soient plus des langues digitalement mortes. »

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