Africa-Press – Benin. À l’approche des élections générales de janvier 2026, une question divise profondément la classe politique béninoise: que se passera-t-il si aucun parti ne franchit le seuil des 20 % de suffrages exigé dans chaque circonscription électorale pour être éligible au partage des sièges parlementaires?
Le président Patrice Talon, face à la jeunesse béninoise le 28 juillet dernier, a esquissé une réponse qui ne rassure guère l’opposition. Pour le président Talon: « L’impasse est impossible »
Lors de cette rencontre, le chef de l’État a répondu aux inquiétudes exprimées, notamment par Guy Mitokpè, représentant du parti Les Démocrates, sur le risque d’un Parlement monocolore. M. Talon a assuré que la révision du Code électoral ne visait pas à exclure, mais à encourager les partis politiques à former des alliances stratégiques pour franchir les seuils électoraux.
« Le code électoral n’empêchera pas qu’il y ait des députés en 2026. Ceux qui veulent absolument être au Parlement doivent réfléchir à la stratégie, aux accords, aux alliances », a-t-il déclaré avec fermeté.
Et s’il arrivait qu’aucun parti ou coalition ne parvienne à satisfaire les conditions imposées? Le président rassure:
« L’impasse est impossible. La Cour constitutionnelle sera saisie pour trancher. Elle peut retirer les critères qui bloquent et permettre le partage des sièges. »
Selon lui, toute loi étant humaine, elle peut avoir des limites, et c’est dans ces cas que les institutions en l’occurrence, la Cour constitutionnelle doivent intervenir pour adapter la légalité aux réalités du moment.
Une réforme électorale pour « forcer à travailler ensemble »
Patrice Talon défend une réforme qu’il qualifie d’héritage structurant, incitant à la maturité politique et à la coopération:
« Je veux vous forcer à travailler ensemble. Vous voulez faire la politique? Travaillez ensemble. C’est tout. »
Mais cette vision ne passe pas pour tous
Le principal parti d’opposition, Les Démocrates, rejette catégoriquement cette approche. Lors d’une rencontre avec leurs militants, Nourénou Atchadé, l’un des visages majeurs du parti, a critiqué avec virulence la posture du chef de l’État.
« Les propos du président Talon sont extrêmement graves. Il veut faire de la Cour constitutionnelle un organe législatif. Or, nulle part au monde une Cour constitutionnelle ne légifère. Ce rôle revient exclusivement aux députés. »
Selon lui, en maintenant ce Code électoral sans possibilité de révision, le président poursuit un objectif clair: l’exclusion programmée du parti Les Démocrates.
« Ce n’est pas de la réforme, c’est du verrouillage. Nous légiférons pour renforcer la démocratie, pas pour éliminer des adversaires politiques. », a martelé Atchadé.
Le parti voit dans cette disposition un risque de déstabilisation institutionnelle, voire un glissement vers un Parlement contrôlé uniquement par la mouvance présidentielle.
Mais il prévient:
« Nous ne nous laisserons pas faire. Les Démocrates resteront debout, prêts à défendre la démocratie et à prendre part aux élections, malgré les obstacles. »
Cette controverse révèle l’ampleur des tensions autour du nouveau Code électoral, révisé en début d’année 2024. Celui-ci impose qu’une liste électorale obtienne au moins 20 % des suffrages dans chaque circonscription électorale pour participer à la répartition des sièges à l’Assemblée nationale.
Toutefois, la loi prévoit une ouverture: les partis ayant signé et déposé un accord de coalition parlementaire à la Céna peuvent voir leurs scores additionnés, dès lors qu’ils ont obtenu au moins 10 % au niveau national.
Mais pour les observateurs, le débat reste vif: le seuil est-il trop élevé dans un paysage politique fragmenté? Le mécanisme de la coalition est-il réaliste? Et surtout, la solution par la Cour constitutionnelle est-elle juridiquement défendable?
Alors que le compte à rebours électoral est lancé, les appels à la révision du Code se multiplient, mais le président reste inflexible. Le climat politique s’en trouve déjà polarisé. Le mois d’août s’annonce déterminant dans la clarification des intentions et l’alignement des forces politiques.
Dans tous les cas, la vigilance des acteurs et le sens des responsabilités seront cruciaux pour préserver la stabilité institutionnelle et la légitimité du prochain Parlement.
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