Sitarail Burkina : Face au préavis de grève des cheminots, la direction générale prône le dialogue

Sitarail Burkina : Face au préavis de grève des cheminots, la direction générale prône le dialogue
Sitarail Burkina : Face au préavis de grève des cheminots, la direction générale prône le dialogue

Africa-Press – Burkina Faso. Les travailleurs de la Société internationale de transport africain par rail (SITARAIL) disent ne pas être satisfaits de leurs conditions de vie et de travail au sein de cette société ferroviaire. Selon eux, c’est face au silence de leur hiérarchie vis-à-vis de leurs préoccupations qu’ils ont décidé de déposer auprès de la direction générale de la Sitarail un préavis de grève de 120 heures. Face à la presse ce vendredi 21 octobre 2022 à Bobo-Dioulasso, ils ont voulu apporter des éléments d’information sur la situation qu’ils vivent au sein de la société, ainsi que les motivations “réelles” de cette grève.

Les travailleurs de la Société internationale de transport africain par rail (SITARAIL), dans une note en date du 5 octobre dernier, informaient leur direction générale de leur intention d’observer une grève de 120 heures à compter du mardi 25 octobre au dimanche 30 octobre 2022. Cela pour plusieurs motifs dont la rupture du dialogue entre les comités Confédération générale du travail du Burkina (CGT-B) et la direction générale autour de leur plateforme revendicative. Face à la presse, les membres syndicaux ont donc voulu éclairer l’opinion nationale et internationale sur les motivations de ce préavis de grève.

« Ce préavis de grève intervient dans un contexte marqué par la violation depuis août 1995, date de l’avènement de la Sitarail, de ses engagements vis-à-vis des Etats (le Burkina Faso et la Côte d’Ivoire) et aussi vis-à-vis des travailleurs », a ainsi planté le décor Florentin Badolo, secrétaire général des comités de la CGT-B/Bobo-Dioulasso. Selon lui, depuis l’avènement de la Sitarail, le climat socio-économique des travailleurs et des populations riveraines du chemin de fer n’a cessé de se dégrader. Il en veut pour preuve la convention de concession qui connaitrait des manquements graves dans son application. Cette convention est le protocole qui définit les conditions et modalités de l’exploitation du service public du transport national et international ferroviaire sur l’axe Abidjan-Kaya.

Cette situation, dit-il, est exacerbée par les intimidations des responsables syndicaux, l’instauration d’un climat de méfiance ou de défiance de certains travailleurs vis-à-vis de leurs responsables, le non-respect du code du travail, une culture du favoritisme avec pour corollaire la démotivation de la masse des laborieux travailleurs. « Malgré l’interpellation répétée des travailleurs à l’endroit de l’employeur quant à l’amélioration de leurs conditions de vie et de travail, Sitarail est restée sourde et insensible à la détresse des cheminots qui ne réclament juste que de meilleures conditions. Et pendant ce temps, Sitarail embauche des expatriés payés à coup de millions alors qu’il y a la compétence locale », a déploré Florentin Badolo au cours de cette conférence de presse.

Selon les conférenciers, ce préavis de grève se justifie par un « refus répété » de la direction générale de la société de recevoir leurs représentants pour échanger sur les préoccupations des travailleurs. A en croire ces derniers, cela fait déjà plusieurs mois qu’ils ont tenté d’avoir un dialogue avec la direction générale qui, jusque-là est restée silencieuse face à leurs préoccupations. C’est pourquoi, ils ont jugé nécessaire de déposer ce préavis de grève de 120 heures pour exiger la satisfaction totale de leurs points de revendications.

Neuf points sont évoqués dans leur plateforme revendicative parmi lesquels on peut retenir principalement le problème lié à la « disparité salariale catégorielle entre les travailleurs ; l’organisation mafieuse et corrompue du concours de recrutement d’aide-conducteurs ; le maintien en permanence en contrat à durée déterminée de certains travailleurs admis à la retraite ; la fermeture de la majorité des gares au Burkina et l’arrêt du train voyageur ; la non application de l’indemnité spéciale de transport pour le personnel travaillant de nuit ; la suppression sans motif valable de la prime de prévention déraillement ; le non-respect de l’engagement pris par la direction générale en 2019 concernant l’indemnité compensatrice de facilité de circulation », etc. Selon le porte-parole des conférenciers, la reprise des activités du train voyageur est simplement un manque de volonté de la part de la direction générale de la Sitarail qui avait déjà, dit-il, montré sa volonté de suspendre les activités du train voyageurs car elle estimait qu’elles (les activités) n’étaient pas rentables.

A l’en croire, ce préavis de grève était une manière pour eux de forcer la main à la direction générale pour un dialogue, en vue de trouver des solutions à leurs différentes préoccupations. Malheureusement, déplore-t-il, cette manière de faire n’a pas eu d’écho favorable et les cheminots disent maintenir leur préavis de grève et appellent à la mobilisation le mardi 25 octobre prochain au siège syndical de Sitarail Bobo.

La Sitarail invite les cheminots à prôner le dialogue

Après la conférence de presse des cheminots et dans un souci de l’équilibre de l’information, nous avons joint l’administration de la Sitarail pour avoir sa version. En retour, c’est une note de droit de réponse du directeur général de la Sitarail à la CGT-B/Sitarail qui a été mise à notre disposition pour exploitation. Sur cette note, la direction générale invite les travailleurs au sens de l’intérêt collectif et de la responsabilité, à privilégier les voies du dialogue et de la négociation. Elle les invite à renoncer à « ce projet de nature à compromettre les intérêts de l’ensemble des travailleurs de l’entreprise et de sa pérennité, surtout dans un contexte déjà très compliqué ».

Face à certains points de revendication évoqués par les conférenciers, la direction a tenu à apporter sa part de vérité. D’emblée, la direction générale dit être surprise par la démarche des travailleurs qu’elle considère « inopportune et regrettable » au regard des raisons. Selon elle, la grève annoncée est illégale. Car évoquant le code du travail du Burkina Faso, en ces articles 367 et suivants, qui prévoit impérativement une procédure de résolution des différents collectifs comme c’est le cas en l’espèce. Conformément à cette procédure, tout différend collectif doit faire l’objet d’une tentative de conciliation par l’inspecteur du travail ou par le directeur du travail, selon la note. A en croire la direction, les travailleurs font l’impasse sur les étapes d’une conciliation et d’un arbitrage en déposant un préavis de grève. Toutefois, elle se réserve le droit d’en tirer toutes les conséquences juridiques si elle (la grève) venait à être mise en œuvre.

Par rapport à l’organisation du concours de recrutement d’aide conducteurs qui a été qualifié de « corrompue et mafieuse », l’administration estime que ce sont des allégations qui visent à porter atteinte à l’image et à la réputation de la société. « Prétendre que l’organisation du concours en vue du recrutement d’aides conducteurs a été corrompue et mafieuse alors même que ce concours a fait l’objet d’annonce par l’Agence nationale de la promotion de l’emploi (ANPE) au Burkina Faso et par l’Agence emploi jeune (AEJ) en Côte d’Ivoire et surtout, sans en apporter la moindre preuve, est tout simplement diffamatoire. Ces allégations visent à porter atteinte à l’image et à la réputation de la société », peut-on lire sur la note adressée aux membres syndicaux.

« En outre, les motifs tirés de la conclusion des CDD avec des travailleurs admis à la retraite, de la fermeture de certaines gares et de l’arrêt du train de voyageurs, consécutifs aux mesures étatiques faisant suite à la pandémie de la covid-19 et à la fermeture de la frontière, sont une entrave au pouvoir de direction et d’organisation de l’entreprise, reconnu à l’employeur par la législation du travail. Nous rappelons que toute entreprise a le droit d’employer une personne apte à offrir les services dont elle a besoin pour sa bonne marche et cette situation ne saurait justifier une grève », poursuit la note.

A en croire la note, le motif selon lequel le dialogue serait rompu entre le syndicat et la direction générale de Sitarail ne reflète pas la réalité. En effet, sur la note adressée aux travailleurs, la direction de la Sitarail rappelle avoir tenu quatre rencontres courant l’année 2022 avec le syndicat dont la dernière s’est tenu les 15 et 16 septembre dernier. Lors de cette rencontre, les discussions ont porté sur des points de revendication faisant l’objet d’une instance d’arbitrage en cours au Burkina Faso. La note rappelle par ailleurs, qu’antérieurement à ce cadre de dialogue, une négociation a eu lieu entre Sitarail et la CGT-CI Rail et a permis d’obtenir des résultats significatifs, dont l’indemnité de logement, qui a également bénéficié à l’ensemble du personnel du Burkina Faso.

L’administration de la Sitarail a réitéré sa disponibilité à privilégier le dialogue avec ses partenaires sociaux « dans le seul but de l’amélioration continue de leurs conditions de vie et de travail, tout en œuvrant pour la survie de l’entreprise et la préservation des emplois ».

Romuald Dofini

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