Indice de perception de la corruption au Burkina : La police municipale, championne « indétrônable »

Indice de perception de la corruption au Burkina : La police municipale, championne
Indice de perception de la corruption au Burkina : La police municipale, championne "indétrônable"

Africa-Press – Burkina Faso. Le Réseau national de lutte anti-corruption (REN-LAC) a rendu public son rapport 2020 sur l’état de la corruption au Burkina, ce jeudi 11 novembre 2021 à Ouagadougou. Selon les résultats d’une enquête d’opinion sur la perception qu’ont les usagers des services publics, la police municipale garde la première place des services les plus corrompus, comme en 2019. Ainsi le top 5 se présente comme suit : la police municipale (75,21%) ; la police nationale (28,96%) ; la douane (27,63%) ; la Direction générale des transports terrestres et maritimes -DGTTM- (22,14%) et enfin la gendarmerie (20,28%).

Depuis l’an 2000, le REN-LAC produit un rapport annuel sur l’état de la corruption au Burkina Faso. Ce rapport est devenu un baromètre incontournable de la gouvernance dans notre pays. Il fait ressortir les résultats d’une enquête d’opinion des populations urbaines et semi-urbaines sur la gouvernance dans le service public. Ce rapport analyse également les actions de lutte anti-corruption des acteurs étatiques et non étatiques.

Pour l’année 2020, l’enquête d’opinion a été effectuée dans les 13 chefs-lieux de régions et la ville de Pouytenga. Elle a adopté une démarche méthodologique combinant les méthodes quantitatives et qualitatives. Dans le but d’avoir des résultats transposables à l’ensemble de la population, la méthode des quotas marginaux a été utilisée, permettant ainsi de toucher 2 000 personnes dont 48,3% de femmes, a expliqué le secrétaire chargé des études et des enquêtes, Issouf Paré.

Toujours selon M. Paré, l’étude s’est essentiellement focalisée sur des entretiens semi-directifs auprès de certains enquêtés dans le souci d’approfondir les analyses quantitatives et les descriptions des expériences de corruption.

A l’écouter, ces résultats ont montré que le niveau de la corruption, selon la perception citoyenne, est très élevé. Il a mentionné que dans le rapport, « 81,95% des enquêtés estiment que les pratiques de corruption sont fréquentes voire très fréquentes. Cette proportion était de 75,7% en 2019 et de 67,2% en 2018. Plus de 4 personnes sur 10 estiment que la corruption est en augmentation par rapport à l’année 2019, tandis qu’un quart des enquêtés estiment qu’elle a régressé. »

La corruption est en constante augmentation depuis 2016

Selon les dires du secrétaire exécutif du REN-LAC, Sagado Nacanabo, l’Indice synthétique de perception de la corruption (ISPC), calculé à partir de la perception des enquêtés sur la fréquence et l’évolution du phénomène, montre qu’elle est en constante augmentation depuis 2016. Il est passé de 10,1 en 2016 à 42,4 en 2020. Par ailleurs, 26,1% des répondants déclarent avoir vécu au moins une expérience de corruption.

Cette proportion était de 20,8% en 2019, soit une hausse de 5,3 points de pourcentage. En 2020, 20% des enquêtés ont déclaré avoir été témoins directs d’actes de corruption lors de leurs fréquentions des services publics, contre 16,7% l’année précédente.

Le Mouvement pour le peuple (MPP) en tête de la corruption électorale

Le secrétariat exécutif a noté également que 371 cas de pratique de corruption ont été rapportés par les enquêtés. Parmi ces actes, 59,8% des cas ont consisté en la distribution d’argent aux potentiels électeurs. Le MPP, à lui seul, a été impliqué dans 60,9% des actes de corruption électorale, suivi du CDP (11,6%) et de l’UPC (9,2%). Selon eux, l’analyse des actions de lutte anti-corruption des acteurs étatiques fait ressortir une inertie de l’exécutif face au développement du phénomène.

Le REN-LAC dénonce un manque d’engagement du législatif et de l’exécutif

« Alors que le pays connait un approfondissement de la crise sécuritaire, le pouvoir exécutif peine à impulser une dynamique de bonne gouvernance au sommet de l’État. En témoignent les nombreux scandales de malversations et de fautes de gestion qui ont éclaboussé certains membres du gouvernement en 2020. Quant à l’Assemblée nationale, elle a eu très peu d’actions perceptibles en matière de lutte anti-corruption, en dehors de deux commissions d’enquête parlementaire sur la téléphonie mobile et la promotion immobilière. Le manque d’engagement de ces deux institutions a été atténué par les actions de certains corps de contrôle et de la justice », a dénoncé M. Nacanabo.

« Notre gouvernement fait la promotion de la médiocrité »

Bassolma Bazié, secrétaire de la Confédération générale du travail du Burkina (CGT-B) était présent à la cérémonie de présentation. Il a estimé que le REN-LAC est à féliciter et encourager. Car, justifie-t-il, malgré le contexte sécuritaire assez précaire, il a pu parcourir les chefs-lieux des 13 régions pour pouvoir rendre effectif cette étude. Cependant, il a regretté le fait que la publication du rapport soit liée au manque de ressources financières car, dit-il, « dans notre pays, ce ne sont pas les ressources financières qui manquent. C’est la mauvaise gestion du bien commun par les dirigeants actuels à travers les organisations farfelues qui sont sans impact réel sur la vie des populations. »

Pour ce qui concerne le classement des structures perçues comme étant les plus corrompues par les enquêtés, à savoir les polices municipale et nationale, la douane, la DGTTM et la gendarmerie, il a regretté que, pendant que des gens se battent pour restaurer l’intégrité du territoire, au même moment, « on décore des assassins, on libère des pilleurs de l’Etat sans justificatif réel. Tout ça nous amène à dire que les politiques en face font la promotion de la médiocrité », a martelé Bassolma Bazié

Jean-Pierre Salembéré, représentant de l’Institut suisse au Burkina, a réaffirmé l’engagement de son institution à accompagner le REN-LAC vers l’atteinte de ses objectifs.

Il a laissé entendre qu’il y a des défis à relever pour renforcer la confiance entre la population, les forces de défense et de sécurité et les acteurs de la justice. De son avis, il faut une volonté politique pour pouvoir assainir le milieu judiciaire.

Pour rappel, en 2017, la police était en tête du peloton. En 2018, une égalité de rang s’impose entre elle et la douane. En 2019, elle se place encore à la première place et enfin en 2020, elle détient toujours le trophée de la corruption au pays des hommes intègres.

Il faut aussi savoir que la production du rapport de la corruption 2020 au Burkina a été soutenue financièrement par le Danemark, le bureau de la coopération suisse et l’ONG Diakonia. Cliquez ici pour lire l’intégralité du rapport 2020 du REN-LAC D.A.K Innocent Alloukoutoui (Stagiaire )

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