Africa-Press – Burkina Faso. Si vous devez vous blesser, évitez de le faire la nuit ! Car les cycles circadiens, ces horloges biologiques qui régulent une grande partie des fonctions biologiques des animaux, jouent aussi un rôle important dans la réparation du corps. Tout dans l’organisme suit un emploi du temps très précis: pour que les processus biologiques fonctionnent sans entrave, on est censé manger seulement à certaines heures, on doit dormir durant certaines heures, et ainsi de suite. Au point que des dérèglements de ces cycles peuvent entrainer de graves problèmes de santé.
Tout comme on doit respecter les bons horaires des repas, pour ne pas surprendre le corps à un moment où il ne serait pas prêt à faire la digestion, il y aurait aussi de bons horaires pour se blesser ! Selon une étude publiée le 5 mars 2025 dans la revue Science Advances par des chercheurs de l’Université Northwestern (Etats-Unis), les blessures survenues durant les heures de repos ont plus de mal à être réparées, car le cycle circadien des processus de réparation serait optimisé pour se déclencher durant les heures d’activité, donc le jour.
La réparation musculaire passe par l’activation d’un grand nombre de gènes
Lorsqu’il y a une blessure du tissu musculaire, un processus de régénération cellulaire est déclenché. Des cellules souches sont activées suite à la blessure, afin de produire des cellules musculaires qui puissent remplacer les cellules endommagées. Et des cellules immunitaires, les neutrophiles, accourent au site de la blessure pour le nettoyer et préparer le terrain pour la réparation. Les auteurs ont étudié ce phénomène de plus près chez des souris, observant que l’activation des cellules souches suite à la blessure passait par l’expression de plusieurs milliers de gènes. Notamment ceux impliqués dans la réponse inflammatoire, qui attirent les neutrophiles vers la blessure.
Or les horloges biologiques ont aussi un grand impact sur l’expression génétique. Car au niveau moléculaire, l’expression d’un grand nombre de gènes est régulée en fonction de l’heure, afin de les activer au moment de la journée où ils sont le plus nécessaires. Les auteurs ont donc voulu savoir si ces deux processus d’activation génétique pouvaient interférer mutuellement.
Certains gènes s’activent plus lentement durant les heures de repos
Ils ont donc analysé la réponse cellulaire lors des blessures survenues à différentes heures de la journée, correspondant aux heures de repos et aux heures d’activité (la nuit et le jour, donc, qui sont inversés chez la souris). Un total de 88 gènes s’exprimaient différemment en fonction de l’heure, notamment deux gènes essentiels dans la division cellulaire des cellules souches: Cdk1 et Mki67, qui codent pour deux protéines qui activent ce processus de prolifération cellulaire. La blessure activait l’expression de ces deux gènes plus rapidement lorsque la blessure survenait durant le temps actif des souris.
Ce qui veut dire que les cellules souches prennent plus de temps à remplacer les cellules endommagées si la blessure se passe à des heures où la souris est censée dormir. En quelque sorte, on pourrait imaginer que ces cellules dorment elles aussi, et ont donc du mal à se mettre au boulot si elles sont réveillées en plein milieu de la nuit. Sur le long terme, des blessures réitérées durant les heures de repos étaient moins bien réparées, faisant perdre aux souris en force musculaire.
La communication cellulaire est moins fluide durant les heures de repos
Un autre gène important s’activait plus lentement durant les heures de repos: Ccl2, qui code pour une cytokine attirant les cellules immunitaires vers le site de la blessure. « La signalisation entre ces cellules (cellules souches et neutrophiles) était beaucoup plus forte si la blessure survenait pendant la période d’éveil des souris, résume dans un communiqué la directrice de l’étude, Clara Peek. C’était un résultat passionnant, qui montre que la régulation circadienne de la régénération musculaire dépend de cette communication entre les cellules souches et les cellules immunitaires. »
Désormais, les auteurs veulent étudier si cette association entre cycle circadien et réparation musculaire pourrait jouer un rôle dans la moindre capacité de régénération musculaire observée dans certaines maladies métaboliques, telles que l’obésité ou le diabète, où les rythmes circadiens sont dérégulés. Cela pourrait aussi être le cas chez les personnes âgées, car le vieillissement perturbe aussi ces horloges biologiques. Autant de pistes qui pourraient peut-être ouvrir la voie vers des traitements pour aider le corps de ces personnes à se soigner plus rapidement, améliorant leur qualité de vie.
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