Africa-Press – CentrAfricaine.
La compagnie nationale d’électricité centrafricaine traverse une période d’instabilité du jamais vue. Après la tragédie du lycée Barthélemy Boganda le 25 juin 2025, où l’explosion d’un transformateur a coûté la vie à 29 personnes selon les chiffres officiels du ministère de la Santé, l’ENERCA connaît une valse des dirigeants qui prouve une fois de plus les tensions profondes du système politique centrafricain.
Thierry Patient Béndima, directeur général de l’entreprise publique, a été arrêté et écroué suite à cette catastrophe. Le conseil d’administration avait alors désigné Thierry Befio Namdenganana pour assurer l’intérim. Cet administrateur chevronné avait réussi à rétablir la stabilité du réseau électrique en l’espace d’une semaine, redonnant espoir quant à la capacité technique de l’ENERCA à surmonter ses difficultés.
Pourtant, cette nomination n’a pas résisté aux calculs politiques. Les cadres du parti au pouvoir ont rapidement exprimé leur mécontentement face à ce qu’ils percevaient comme une nomination trop indépendante. Thierry Befio Namdenganana, reconnu pour sa compétence technique, n’appartenait pas aux cercles d’influence politique et ethnique du pouvoir en place. Son approche professionnelle et son détachement des considérations partisanes ont fini par jouer contre lui.
Moins de quinze jours après sa nomination, un nouveau remplaçant a été désigné lors d’une réunion d’urgence du conseil d’administration à la demande du ministre Bertrand Arthur Piri. Bienvenu Monibeya, directeur de production à l’ENERCA, a été choisi pour prendre désormais les rênes de l’entreprise. Son profil diffère sensiblement de celui de son prédécesseur: il entretient des liens étroits avec le parti présidentiel. Les registres du Mouvement Cœurs Unis (MCU) attestent de sa contribution de 100 000 FCFA pour le congrès de juillet 2025, un geste qui témoigne de son alignement politique.
Cette succession rapide d’intérims dévoile les dysfonctionnements profonds qui gangrènent l’ENERCA. L’entreprise publique devient l’otage de considérations politiques et ethniques qui priment sur les impératifs techniques et sécuritaires. Les réseaux d’influence transforment la direction générale en terrain de règlements de comptes, écartant régulièrement les profils jugés trop indépendants.
Thierry Patient Béndima demeure incarcéré à l’Office central de répression du banditisme, symbole d’une justice expéditive qui frappe d’abord avant d’établir les responsabilités. Son sort témoigne de la brutalité avec laquelle le système traite ceux qui se retrouvent au centre des polémiques.
Les familles endeuillées par la tragédie du lycée Barthélemy Boganda attendent toujours des réponses concrètes sur les causes exactes de l’accident. Pendant que les responsables politiques se disputent le contrôle de l’ENERCA, les questions techniques et sécuritaires passent au second plan. Cette instrumentalisation de la crise énergétique alimente les interrogations sur la gestion volontairement défaillante des infrastructures publiques.
La situation actuelle de l’ENERCA reflète un mal plus profond du pays: la prédominance des logiques claniques sur l’intérêt général. Dans un pays où l’accès à l’électricité reste un défi quotidien pour la majorité de la population, ces querelles internes compromettent davantage la modernisation du secteur énergétique. Les citoyens centrafricains paient le prix fort de cette gouvernance approximative qui sacrifie l’efficacité technique aux considérations politiques….
Source: Corbeau News Centrafrique
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