Nobel de Physique 2025 Pour Pionniers des Technologies Quantiques

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Nobel de Physique 2025 Pour Pionniers des Technologies Quantiques
Nobel de Physique 2025 Pour Pionniers des Technologies Quantiques

Africa-Press – CentrAfricaine. L’attribution du prix Nobel est souvent le fruit d’une longue attente. Dans le cas des trois lauréats 2025 pour la physique, on peut donc dire qu’ils voient enfin le bout du tunnel. Mais un tunnel quantique. John Clarke, Michel Devoret et John Martinis sont récompensés pour avoir mis en évidence, en 1985 à Berkeley, des propriétés que l’on croyait réservées au monde des particules, et qui s’exercent pourtant au niveau macroscopique: l’effet tunnel, et la quantification de l’énergie.

Un effet tunnel macroscopique

L’effet tunnel a été mis en évidence en 1928 grâce aux travaux du physicien George Gamow, qui l’a utilisé pour expliquer la désintégration alpha de certains noyaux radioactifs: une particule peut s’échapper du noyau en franchissant une barrière d’énergie pourtant infranchissable en théorie. Tout se passe alors comme si la particule se frayait un tunnel à travers cette barrière (c’est une image…) pour passer de l’autre côté.

Inspiré par les travaux théoriques d’Anthony Leggett (prix Nobel de physique 2003) sur l’effet tunnel dans une jonction Josephson (composée de deux supraconducteurs séparés par un isolant, ndlr), John Clarke, dans son laboratoire de Berkeley, observe en 1985 que le circuit supraconducteur qu’il étudie avec Michel Devoret (alors postdoctorant) et John Martinis (doctorant), censé rester dans un état stable sans produire de tension, se met soudain à générer une tension mesurable. Autrement dit, le système a réussi à franchir tout seul la barrière d’énergie, constituée par l’isolant, qui le bloquait. C’est la preuve qu’un effet tunnel s’est produit, mais cette fois à l’échelle d’un objet macroscopique.

En couple, les électrons perdent leur individualité

Pour comprendre ce tour de passe-passe, il faut plonger dans la physique étrange des supraconducteurs. À très basse température, les électrons cessent de se comporter comme des particules isolées: ils s’apparient deux à deux pour former ce qu’on appelle des paires de Cooper. En couple, les électrons perdent leur individualité: ils se fondent tous dans une même onde quantique, un seul « train » qui file sans résistance, comme s’il creusait son propre passage à travers la matière. C’est cette cohésion parfaite qui permet au système, dans l’expérience de Berkeley, de franchir la barrière d’énergie d’un seul tenant.

Mais ce n’est pas tout. En étudiant de près la tension produite par leur circuit, ils remarquent que celui-ci ne change pas d’état de façon continue. Il « saute » d’un niveau à un autre, comme s’il montait ou descendait les marches d’un escalier invisible. Chaque marche correspond à une quantité d’énergie bien précise, un quantum, exactement comme dans les atomes. Un résultat fascinant: les lois de la physique quantique, jusque-là confinées au monde des particules, s’appliquent ici à un objet que l’on peut littéralement tenir entre les doigts.

L’avènement des technologies quantiques

En révélant que leur circuit ne pouvait échanger l’énergie qu’en paquets bien définis, John Clarke, Michel Devoret et John Martinis ont posé les fondations d’une nouvelle physique appliquée. Leurs minuscules circuits sont devenus les ancêtres directs des qubits supraconducteurs, de véritables atomes artificiels utilisés comme unités d’information capables d’exister à la fois dans deux états, 0 et 1, à la base des ordinateurs quantiques.

Plus généralement, l’émergence des propriétés quantiques à l’échelle macroscopique irrigue désormais les technologies comme la cryptographie ou les capteurs quantiques extrêmement sensibles… En récompensant les pionniers du genre, le comité Nobel salue, un siècle après la naissance de la mécanique quantique en 1925, le moment où elle sort enfin du laboratoire pour s’introduire dans notre quotidien.

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