avec le reboisement, Abidjan se met au vert

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avec le reboisement, Abidjan se met au vert
avec le reboisement, Abidjan se met au vert

Africa-Press – Côte d’Ivoire. Dans certains kiosques d’Abidjan, de vieilles cartes postales en Technicolor, légèrement oxydées par l’humidité et le temps, donnent une idée de ce que la capitale ivoirienne était dans les années 1980. Quelques tours de béton lui donnaient déjà son allure américaine, entourées d’importants halos de verdure… Abidjan respirait. L’écrivain et journaliste Venance Konan n’a pas oublié cette époque. « Au Plateau, il y avait encore, à côté des bâtiments modernes, de très vieux arbres qui rappelaient ce qu’avait pu être la ville avant la coupe sauvage de ses arbres, pour certains multicentenaires, par des habitants qui n’avaient pas encore conscience de leur importance, pas plus sur le plan vital que sur le plan esthétique. »

Acacias, tecks et bambous

Les premières campagnes de reboisement à Abidjan ont commencé sous l’impulsion d’une femme, Adrienne Soundele, qui, dès 2013, lance le projet “Une école pour cinq hectares”. L’idée est simple : il s’agit de conscientiser la jeunesse en faisant appel aux élèves des principaux collèges de la capitale pour reboiser. Originaire d’Aboisso, Adrienne Soundele a grandi dans la forêt. C’est en observant disparaître avec tristesse des pans entiers de celle-ci qu’elle a décidé de s’engager d’abord à Abidjan, dans son quartier des Deux-Plateaux. « J’ai commencé par planter des acacias, des tecks, des bambous chez moi. Au début, les voisins me prenaient pour une folle. Ils disaient que les branches les gênaient. Jusqu’au jour où j’en ai surpris un s’abritant dessous lorsqu’il pleuvait. À partir de ce moment, on m’a fichu la paix. J’ai alors vendu deux Rolex pour créer ma fondation et agir à une plus grande échelle. »

Adrienne Soundele est très vite remarquée par le ministère des Eaux et Forêts, qui soutient alors son action de sensibilisation dans les écoles. En 2015, la fondation Soundele reçoit le premier prix du reboisement, remis par le président Alassane Ouattara en personne. Mais la tâche est immense. En cinquante ans, la Côte d’Ivoire a perdu près de 90 % de ses forêts, selon les chiffres du ministère de l’Environnement. En mai 2021, à l’instigation de l’Institut national des administrateurs de Côte d’Ivoire (INAD-CI), le Plan vert est lancé par le ministère des Eaux et Forêts pour inciter les sociétés à engager leur RSE (responsabilité sociale des entreprises) dans la reforestation, afin de recréer des puits de carbone.

RÉSULTAT, LES CAMPAGNES DE REBOISEMENT ONT SI BIEN FONCTIONNÉ QUE PRÈS DE 40 HECTARES DE FORÊT ONT DÉJÀ VU LE JOUR

Ted Azouma, le visionnaire directeur exécutif de l’INAD-CI, est à l’origine de ce projet. « Nous demandons aux entreprises membres de notre association un financement et de participer directement au reboisement. On essaie de planter des espèces locales, comme le niangon ou l’okoumé. Pour aller plus loin, nous faisons sortir nos partenaires de leurs bureaux. Nous avons déjà organisé cinq campagnes avec des administrateurs, des banquiers, des députés, des hommes d’affaires… Ils viennent planter des arbres le week-end avec leurs enfants, c’est utile et joyeux à la fois. » L’objectif initial visait à replanter 10 hectares de forêt par an, sur dix ans, de 2021 à 2032…

Campagnes de sensibilisation
Résultat, les campagnes de reboisement ont si bien fonctionné que près de 40 hectares de forêt ont déjà vu le jour ! La BFCI et le cabinet Deloitte notamment, sont partenaires d’une action dont les effets commencent à se faire sentir dans le quartier de Cocody, du côté de l’université Houphoüet-Boigny. En juillet, 3 hectares ont aussi été plantés dans la forêt classée d’Audouin, sur la commune de Jacqueville. À l’avenir, les campagnes de reboisement devraient cibler davantage les quartiers populaires d’Abidjan. « En Côte d’Ivoire, les gens n’ont pas encore la culture du reboisement. Au début, ils ne comprennent pas trop, car, dans leur esprit, on plante d’abord un arbre qui rapporte. Avant toute chose, nous organisons des campagnes de sensibilisation dans les quartiers pour gagner la confiance des habitants », précise Ted Azouma.

Petit à petit, le reboisement, considéré désormais « d’utilité publique », s’est institutionnalisé. Afin d’enrayer la dégradation des forêts, un accord de prêt et de don pour un montant de 7,5 milliards de F CFA (11,4 millions d’euros) a été signé récemment entre le ministère ivoirien de l’Économie et des Finances et la Banque mondiale. « Ça commence à bouger, se réjouit Venance Konan, on voit de plus en plus de clôtures de protection autour des parcs forestiers abidjanais. Récemment, un groupe hôtelier a dû renoncer à s’implanter au parc Dahlia Fleur, près de Bingerville, grâce à la forte mobilisation citoyenne ! » Et ce 22 septembre, c’est l’Aga Kahn Development Network qui s’est joint à l’effort en signant avec les autorités ivoiriennes un engagement matérialisant son intention de participer au financement du projet. Comme il se doit, la cérémonie de la signature du document a été suivie d’une opération de « planting ».

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