Africa-Press – Burkina Faso. Après cinq heures d’audience à huis clos, la justice militaire burkinabè a tranché. Le lieutenant-colonel Emmanuel Zoungrana, dont la défense demandait la remise en liberté provisoire, devra encore attendre. « Il reste en prison », a confirmé à Jeune Afrique Me Paul Kéré, avocat de l’officier incarcéré à la Maison d’arrêt et de correction des armées (Maca).
Douche froide
Pour les dizaines de ses partisans qui s’étaient massés devant le tribunal militaire de Ouagadougou, scandant des slogans réclamant une libération, la décision du juge militaire a fait l’effet d’une douche froide. C’est aussi un sérieux revers pour Emmanuel Zoungrana, détenu depuis le 10 janvier dernier.
« Ils ont confirmé l’ordonnance de refus de la demande liberté provisoire pour mon client, poursuit son avocat. Je suis très déçu, c’est inexplicable. J’ignore s’ils attendent l’audience devant la Cour de cassation, prévue le 27 octobre prochain. Mais dans le contexte actuel, c’est très grave. Il n’y a aucune preuve contre Emmanuel Zoungrana. »
« Dossier politique »
Interpelé le 10 janvier dernier par le pouvoir de Roch Marc Christian Kaboré, accusé de tentative de déstabilisation et d’atteinte à la sureté de l’État, Zoungrana se trouve, depuis, derrière les barreaux. Les premières charges ont depuis évolué, la justice l’accusant désormais de complot, mais aussi de blanchiment, d’enrichissement et d’usage de faux en écriture. Preuve, pour Me Paul Kéré, que « le dossier est vide et donc politique ».
Ancien chef de corps du 12e régiment d’infanterie commando, Emmanuel Zoungrana avait été relevé de ses fonctions en décembre à la suite de l’attaque d’Inata, qui a coûté la vie à 53 gendarmes et qui a précipité la chute de Kaboré. Il avait auparavant officié en tant que commandant du secteur Ouest du Groupement des forces de sécurisation du Nord et avait dirigé le 25e régiment parachutiste commando, basé à Bobo-Dioulasso.
Un rôle dans la transition ?
En janvier, l’interpellation d’Emmanuel Zoungrana avait constitué l’un des éléments qui avaient poussé Paul-Henri Sandaogo Damiba et ses hommes à renverser le président Kaboré, et son ombre avait plané sur le putsch. Les nouveaux maîtres du pays s’étaient toutefois gardées de remettre en liberté cet officier qui passait pour être l’un des plus prometteurs de l’armée burkinabè.
La perspective d’une remise en liberté avait, ces derniers jours, fait couler beaucoup d’encre à Ouagadougou. Le capitaine Ibrahim Traoré, tombeur de Damiba le 30 septembre, allait-il le faire sortir de prison, alors que doivent se tenir, les 14 et 15 octobre, les assises nationales à l’issue desquelles le président de la transition doit être désigné ? Et si oui, Zoungrana pouvait-il être amené à jouer un rôle dans la nouvelle période de transition qui s’annonce ?
La question était posée, même si certains de nos interlocuteurs en doutaient. « Je ne pense pas que Zoungrana puisse être désigné pour présider la transition, nous avait ainsi déclaré l’un de ses proches. Il n’y a jamais eu aucune coordination entre lui et le MPSR [Mouvement patriotique pour la sauvegarde et la restauration], ni avant ni après la chute de Damiba. »
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