Balolé (Tanghin Dassouri) : Incertitude sur l’arrêt des activités de l’abattoir des ânes

Balolé (Tanghin Dassouri) : Incertitude sur l’arrêt des activités de l’abattoir des ânes
Balolé (Tanghin Dassouri) : Incertitude sur l’arrêt des activités de l’abattoir des ânes

Africa-PressBurkina Faso. L’année 2016 a été marquée par un “génocide” d’ânes au Burkina Faso, précisément dans le village de Balolé (situé dans la commune de Tanghin Dassouri). Depuis ce drame, l’Etat burkinabè a adopté des lois en vue de mettre un terme à ces pratiques dans le pays. Cherchant à savoir ce que devenait l’abattoir d’ânes de Balolé de nos jours, une équipe de y était dans la matinée du mercredi 16 juin 2021.

Perché sur une colline, à droite du bitume qui mène au dépôt de la SONABHY de Bingo, l’abattoir d’ânes de Balolé n’a pas bougé d’un iota depuis sa création. A notre arrivée aux environs de 10h, nous apercevons un homme à proximité des lieux qui mène tranquillement ses travaux champêtres. Lorsque nous demandions à renter à l’intérieur pour constater l’arrêt ou la continuité des activités de cette unité d’abattage d’ânes, un homme nous accoste.

Il s’agit du gardien des lieux. Echangeant avec lui, nous nous sommes présentés tout en expliquant l’objet de notre présence. « Bonjour ! Nous sommes une équipe du média et nous venons pour voir si l’abattoir fonctionne toujours ou pas. » La réponse à notre requête a dû attendre. Le gardien devrait joindre par téléphone les promoteurs afin de nous situer. Au terme de sa conversation avec ‟son patron”, l’accès aux locaux de l’abattoir nous est refusé. Dans le même temps, un homme présent sur les lieux et assis sur son vélo, nous confie : « Cela fait quatre ans que l’abattoir ne fonctionne plus ».

N’ayant pas d’autres alternatives, nous décidions alors de rebrousser chemin, lorsqu’à une centaine de mètres de l’écorcherie nous apercevions trois jeunes assis au bord de la voie bitumée. Nous marquons donc une halte pour recueillir leurs réactions sur l’existence de cet établissement d’abattage des ânes installé dans leur village. L’un d’entre eux se porte volontaire pour parler, puis tout d’un coup se résigna. Quand nous lui demandons la raison de son silence, il répond en ces termes : « Je suis peur (J’ai peur : Ndlr) ».

Aux mêmes instants, ces jeunes nous disent de patienter, le temps qu’arrive un homme qui se trouvait en contrebas de l’endroit où nous étions. Dès son arrivée, nous lui expliquons les motifs de notre venue. Aussitôt compris, il répond : « Depuis les dégâts qu’ils ont commis là-bas là, cela fait deux ans qu’ils n’ont pas encore repris. Quand ça fonctionnait, nous tous ici présents, on gagnait ce qu’on gagnait là-bas. C’était bon ! Maintenant que ça ne travaille plus, qu’est-ce qu’on va dire. Mais bon, comme c’est de leur faute, parce que si l’usine fonctionne et nous les voisins n’arrivons pas à respirer, comment allons-nous faire ? C’est ça le problème là, sinon quand ça fonctionnait c’était bon ! »

Ce dernier nous suggère d’aller rencontrer le chef du village pour en savoir plus. Une fois à la résidence du chef de Balolé, on nous fait savoir qu’il s’est rendu à Ouagadougou et ne reviendra que le lendemain.

Lorsque nous reprenons la route pour regagner Ouagadougou, nous constatons en contrebas de la voie sur notre droite, quelques attroupements de jeunes dont certains dans les buissons, tenaient en main des machettes. Une question nous vient à l’esprit, que font-ils avec ces armes blanches ? Sont-ils là pour les ânes qui sont de plus en plus rares dans la région, ou est-ce pour nous dissuader d’aller plus loin dans notre quête de la vérité ?

En tout cas, les différentes allégations que nous avons entendues, les gens que nous avons abordés et le refus de notre accès à l’abattoir de Balolé, en disent long.

Lire aussi : A l’abattoir d’ânes de Balolé, « même les ânesses en gestation sont abattues »

Pour mémoire, le 13 juillet 2016, une équipe de s’était rendue dans la localité et a découvert que même les ânesses en gestation étaient abattues pour la commercialisation de leurs peaux vers l’Asie, notamment la Chine. Cette situation avait troublé la quiétude des populations qui avaient désormais du mal à respirer du fait d’une odeur suffocante provenant du sang des ânes abattus. En cette même année, le Burkina Faso a connu un trafic clandestin de l’espèce asine sans précédent, entraînant la perte de centaines voire de milliers d’asins.

Le Burkina Faso n’est pas le seul pays concerné dans cette affaire. D’autres pays africains comme le Kenya sont confrontés à ce fléau. La forte demande de peaux de l’espèce asine est consacrée à la fabrication d’un produit cosmétique dénommé ‟éjiaoˮ dont la matière première est une gélatine extraite de ces peaux très prisées. Ce qui a engendré aussi bien la hausse du prix de l’âne que de sa peau dans la sous-région, mais aussi une grande perte pour les populations dépendantes, pour certaines activités notamment champêtres.

Lire aussi : Préservation de l’espèce asine en Afrique : « Il faut une réponse régionale », insiste Emmanuel Bouré Sarr de l’ONG Brooke

Selon l’ONG Brooke, les populations asines en Afrique de l’Ouest sont insignifiantes face à la croissance exponentielle de l’exportation de leur espèce hors du continent. Une de leurs études révèle que la population asine au Sénégal n’est qu’environ 500 000 et 1 200 000 au Burkina, pendant que la demande mondiale de peaux d’âne est d’environ 4,8 millions par an. Afin de trouver une solution plus que jamais efficace pour mettre fin à ce phénomène, l’ONG recommande une réponse régionale pour venir à bout non seulement de l’abattage mais aussi du commerce de la peau d’âne. Si certains pays ont adopté des textes qui régissent cette pratique, nombreux sont ceux qui traînent encore les pas.

 

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